Etat d’exception ou d’urgence sanitaire : que va décider le président Tebboune ?
Par Nabil D. – La première batterie de mesures annoncées par Abdelmadjid Tebboune semble ne pas avoir donné l’effet escompté. Le Haut Conseil de sécurité vient de se réunir à la veille du vendredi, jour de manifestations, pour imposer de nouvelles restrictions qui vont de l’interdiction des moyens de transports interurbains et entre les wilayas à la mise au chômage technique de nombreux travailleurs pour ne garder que ceux qui occupent des fonctions sensibles et nécessaires.
Des témoins signalent d’ores et déjà une présence inhabituelle de militaires dans la capitale, ce qui fait dire à certains que le chef de l’Etat pourrait, dans une prochaine étape, activer l’article 107 de la Constitution qui stipule que «lorsque le pays est menacé d’un péril imminent dans ses institutions, dans son indépendance ou dans son intégrité territoriale, le président de la République décrète l’état d’exception» et que «l’état d’exception habilite le président de la République à prendre les mesures exceptionnelles que commande la sauvegarde de l’indépendance de la nation et des institutions de la République».
La crise politique s’étant mêlée à la crise sanitaire, le pouvoir, qui souffre d’une absence de légitimité et qui est donc rejeté par la majorité, peine à imposer les mesures barrières collectives seules à même de limiter le risque d’aggravation de la pandémie. Si les citoyens ont limité leurs déplacements et pris l’initiative de nettoyer les immeubles et les quartiers par peur d’être contaminés, il n’en demeure pas moins que les appels des responsables politiques – président de la République, Premier ministre, ministres et walis – sont un coup d’épée dans l’eau.
Des voix se sont même élevées pour dénoncer la fermeture des mosquées, tandis que de nombreux internautes remettent en cause la sincérité du pouvoir dans ses déclarations visant à rassurer la population sur la prise en charge sérieuse de l’épidémie, le discours des autorités contredisant la réalité du terrain, où les conditions les plus élémentaires ne sont pas réunies pour faire face à une situation de crise sanitaire de grande ampleur.
Cette dichotomie entre les citoyens et le pouvoir rend difficile la lutte contre le coronavirus. Aussi le président Tebboune semble-t-il forcé de griller les étapes et de recourir directement à l’état d’urgence sanitaire qui l’autorisera à prendre des mesures autrement plus drastiques, en forçant les citoyens à se confiner chez eux, en interdisant les déplacements entre les wilayas, en réquisitionnant les infrastructures nécessaires pour permettre la mise en quatorzaine des personnes atteintes par le Covid-19 et en faisant intervenir l’armée dans la mise en application de ces nouvelles restrictions.
N. D.
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