Le coronavirus est le symptôme visible d’un capitalisme en phase dégénérative
Par Mesloub Khider – Toute l’élite bourgeoise, depuis les politiques jusqu’aux économistes en passant par les médecins et autres prétendus experts scientifiques, incrimine le coronavirus d’être responsable de la crise sanitaire et économique. Le Covid-19 a bon dos. En vérité, le coronavirus constitue un simple symptôme visible d’un capitalisme en phase dégénérative. Et nullement la cause de la crise du capitalisme moribond. Déjà, les premiers signes alarmants s’étaient manifestés lors de la crise 2007-2008, devant laquelle la crise actuelle est autrement plus foudroyante et dévastatrice. Si la crise de 2007-2008 a affecté principalement le secteur financier, illustrée par l’effondrement de plusieurs banques, la crise présente est protéiforme ; elle frappe le poumon de l’économie, en l’espèce, la production. L’effondrement est général.
Au-delà de la chute des bourses, de la finance, du secteur touristique, des compagnies aériennes, des groupes pétroliers, se profile la débâcle du commerce mondial, le recul de la production. Dans de la majorité des pays, les usines sont fermées. Aucune région du monde n’échappe à l’effondrement de son économie. C’est tout le système capitaliste qui s’écroule. «Les Banques centrales ont remis sur le feu les recettes qu’elles avaient appliquées avec succès lors de la crise de 2008 pour calmer les marchés financiers, mais leur bazooka peine cette fois à atteindre son objectif. Plus globalement, même s’ils ont agi de manière coordonnée, les grands argentiers du monde n’ont pu enrayer la chute des Bourses mondiales», écrit Le Monde dans son édition du 16 mars dernier.
Dans son édition du 13 mars, Le Monde précise, dans un article signé par un économiste et un sociologue, que ce n’est pas une seule crise mais quatre crises enchâssées qui expliquent cette déconfiture globale : «L’enchaînement d’événements dans lequel le monde est entré dans le sillage de la pandémie due au coronavirus procède de l’emboîtement de quatre logiques de crise – sanitaire, économique, énergétique et financière. Elles mettent en lumière les limites des marchés. Après une décennie perdue au lendemain de la crise financière, on assiste aux turbulences actuelles. Les exportations chinoises ont plongé de 17 % au cours des mois de janvier et de février et des ruptures d’approvisionnement apparaissent, notamment pour des composants électroniques ou des principes actifs de médicaments. Les analystes s’attendent à ce que les difficultés s’intensifient dans les semaines qui viennent, notamment en Europe, avec l’effet en cascade des mesures déjà adoptées en Italie et maintenant en France».
L’ampleur de l’effondrement économique est tellement catastrophique que les Etats capitalistes envisagent de nationaliser plusieurs entreprises pour éviter une débâcle sanglante. Les règles économiques et d’échanges sont devenues inopérantes. Il n’existe plus de «libre économie» possible. Seule l’étatisation totale de l’économie peut maintenir artificiellement en vie le corps productif capitaliste. Néanmoins, en dépit de l’injection de milliers de milliards de dollars et de l’étatisation capitaliste de l’économie, l’effondrement du système est inéluctable. Certes, la pandémie du coronavirus a contribué à l’éclatement foudroyant du système économique capitaliste, mais la chute avait entamé sa dégringolade depuis des mois. En effet, en réalité, le coronavirus n’a joué qu’un rôle d’accélérateur d’une tendance baissière à l’œuvre depuis plusieurs années.
Dans son édition du 6 mars 2020, le journal Les Echos écrit : «C’est un beau plongeon. L’observation en temps réel de la position des navires de transport et les statistiques relatives aux marchandises qu’ils transportent montrent un net recul du commerce international depuis fin janvier. Tel est le constat d’Abudi Zein, directeur général de Clipper Data, dans une note publiée par la Cnuced. Les entreprises de transport maritime ont réduit leur capacité depuis environ août 2018 sur la plupart des voies commerciales. Les tensions commerciales ont ralenti la demande mondiale de capacité de fret. Dans la seconde moitié de janvier et début février, cette baisse s’est fortement accélérée».
De toute évidence, la pandémie du coronavirus vient à point nommé pour servir de couverture et d’argumentation explicative à l’effondrement de l’économie capitaliste mondiale depuis longtemps prévisible. Cette explication idéologique incriminant un microscopique et invisible virus d’être responsable de la débâcle économique est ridicule. La bourgeoisie ne peut admettre son incapacité notoire à faire fonctionner son système capitaliste devenu chaotique et irrationnel. Bien entendu, aujourd’hui, en cette période de crise aigüe, les classes dirigeantes capitalistes soutiennent être à la hauteur de la situation. Elles prétendent disposer de solutions économiques pour résorber la crise, notamment au moyen de l’injection de milliards de dollars dans le circuit anémié de l’économie exsangue. Mais toutes ces mesures illusoires ne pourront jamais réanimer le corps malade capitaliste. Pire, elles contribuent seulement à favoriser de nouvelles bulles spéculatives, avec comme ultime conséquence un énième krach boursier. En vérité, on assiste à une crise économique systémique historique. Des pans entiers de la société capitaliste s’écroulent.
Aujourd’hui, la question du dépassement de ce système se pose avec acuité. Cependant, du fait de la politique de restriction de circulation et de rassemblement imposée par les classes dirigeantes, sous couvert de lutte contre le coronavirus, de terrorisation psychologique infligée à la population, notamment par les campagnes de dramatisation du climat sanitaire viral et par les politiques d’encadrement sécuritaires et militaires, les classes populaires sont temporairement tétanisées pour engager le combat final en vue de la transformation sociale, du renversement de ce système capitaliste mortifère. Cette impérative nécessité d’émancipation sociale est plus que jamais à l’ordre du jour. Une fois passée la phase de désorientation psychologique et de psychose généralisée actuelle, rapidement la nécessité historique de remplacer ce mode de production devenu irrationnel s’imposera à l’ensemble de la force ouvrière, aujourd’hui seule victime de cette catastrophe sanitaire et sociale capitaliste.
Les travailleurs sont la seule classe disposant du potentiel et de la capacité à éradiquer ce système, par leur lutte, le développement de leur conscience politique, leur solidarité. Seule la révolution ouvrière peut et doit remplacer les relations humaines basées sur la division et la concurrence par de nouveaux rapports sociaux égalitaires, sur un nouveau mode de production plus humain. Le peuple laborieux opprimé doit s’auto-organiser pour gérer collectivement la société sur de nouvelles bases économiques. Ce système nous infantilise en nous enfermant dans des rôles sociaux subalternes, en nous confinant dans des figurations politiques, tenus en laisse policière et muselés par la répression militarisée, en nous traitant comme des handicapés mentaux contraints de subir l’internement.
M. K.
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