Notre régime aussi est un mauvais élève
Par Dr Abderrahmane Cherfouh – «L’impérialisme est un mauvais élève.» Cette sentence prononcée par le général Giap lors d’un discours qu’il a adressé au peuple algérien lorsqu’il a visité notre pays demeure toujours d’actualité. Il n’y a pas que l’impérialisme qui est un mauvais élève. L’hégémonisme, la dictature, l’amnésie, l’autoritarisme, l’imposture, le mensonge sont tous de mauvais élèves. Cette vérité peut nous donner l’occasion de voir à quel point elle illustre parfaitement la politique menée par le régime de notre pays et ses dirigeants qui n’apprennent jamais la leçon et qui persévèrent vaille que vaille dans leur fuite en avant, advienne que pourra.
Que faut-il encore faire pour amener ce régime à regarder la vérité en face ? Pourtant, ce ne sont pas les avertissements et les appels réitérés qui ont manqué. Tous les éléments se sont rassemblés pour pousser les décideurs à trancher et à revoir leur copie. Les millions de manifestants confirmés chaque vendredi et mardi en Algérie et partout dans le monde parmi la communauté émigrée, les appels réitérés des forces vives de la nation et de la quasi-majorité des citoyens n’ont pas encore eu raison de l’obstination des décideurs qui continuent à braver la volonté du peuple et cherchent à gagner du temps pour rester les maîtres de la situation.
Vomi, haï, poussé dans ses derniers retranchements, le régime commençait à vaciller et à perdre la boussole devant les assauts répétés que lui portait le peuple chaque vendredi. Seulement voilà, l’inattendu, l’imprévisible se sont produits ; le coronavirus est venu tout chambouler et tout remettre en question. Le peuple qui a démontré son pacifisme et sa maturité a vite compris le danger que véhiculait cette pandémie qui a ébranlé la planète tout entière et qui continue à frapper partout. Le nombre total des décès s’élève pour le moment à 29 000.
Avec beaucoup d’honneur et de dignité, mesurant l’ampleur de la crise sanitaire et conscient de la situation, le peuple a cessé de porter sa lutte dans les rues pour combattre un autre fléau ravageur qui est le coronavirus, né en Chine et qui s’est propagé vertigineusement à travers toute la planète.
Pour le système en place, c’est un rêve inespéré, une bénédiction venue d’ailleurs. Il va vite sauter sur l’occasion pour prendre des décisions qu’il ne pouvait se permettre avant l’apparition du coronavirus et qu’il justifie en brandissant la dangerosité de l’épidémie. L’interdiction des rassemblements, l’arrêt des manifestations, le confinement, c’est le peuple qui les a réclamés et revendiqués. Le régime, qui tire un avantage certain de cette situation qui n’est que temporaire, va certainement bénéficier d’un moment de répit pour mieux affûter ses armes et repartir au combat contre son propre peuple. Il va certainement élaborer une autre stratégie afin de se consolider. Il ne va pas hésiter à utiliser toutes ses pièces maîtresses pour mieux élaborer une autre approche afin de récupérer un crédit terni dans le but de se régénérer et de tenter de reprendre le dessus en utilisant tous les moyens colossaux qui appartiennent au peuple mais qu’il détournera à son profit.
Ce régime avait besoin de cette pandémie pour se remettre sur les rails et sauver sa peau. La manière discutable et médiatisée avec laquelle il est en train de gérer cette crise causée par cette terrible épidémie est une illustration vivante des efforts déployés pour soigner son image et redorer son blason. Tel un désespéré, ce régime aux abois est en train de perdre toute notion de la réalité, toute lucidité. Poussé par le désespoir et la peur, il va sombrer dans un monde imaginaire propre à lui et dont une personne dotée de toutes ses facultés mentales ne peut percer le secret. Ce sera le délire collectif. En période de transes et de convulsions, il va nous concevoir des scénarios dignes des films de Bollywood.
Après avoir essayé de salir les symboles de la Révolution tels que Lakhdar Bouregâa, il s’attaque maintenant aux personnalités émergentes et à tous les détenus politiques du Hirak, en instrumentalisant la justice à son profit et en téléguidant une presse docile, obéissante et aux ordres. Le procès de Karim Tabbou en est l’exemple le plus probant.
Oui, ce régime est un mauvais élève. Il va l’apprendre à ses dépens en temps opportun, une fois la crise de la pandémie passée. Ce n’est qu’une partie remise. Le peuple n’est pas un mauvais élève, il va revenir encore plus fort. Il a juré de le déloger. Il a prononcé sa sentence légendaire «yetnahaw gaâ». Ce n’est qu’une question de temps.
A. C.
(Montréal)
Comment (3)