Vague, vaseux, menaçant : Tebboune a accentué la panique des Algériens
Par Mohamed K. – Abdelmadjid Tebboune n’a pas convaincu les Algériens lors de sa prestation télévisée de ce mardi soir. Son staff en charge de la communication, connu pour être peu professionnel, n’aide pas le successeur du tribun Abdelaziz Bouteflika dans le nécessaire effort d’amélioration de l’élocution, du choix des mots et de la préparation des discours et des interventions «spontanées». Face aux mêmes figurants incarnant le rôle des questionneurs, le locataire du palais d’El-Mouradia n’a pas apporté les clarifications et les assurances attendes par les citoyens, terrassés par une épidémie dont ils ne croyaient pas, jusqu’à un passé récent, qu’elle les atteindrait et qu’ils en étaient prémunis, on ne sait par quel miracle.
L’entrevue a été commandée par la présidence de la République suite à la contagion par la rumeur sur les réseaux sociaux qui a pris le dessus sur les médias gouvernementaux et les chaînes privées inféodées au pouvoir, lesquelles chaînes ne parviennent à enregistrer de fortes audiences que grâce à leurs émissions à caractère charlatanesque et à pulsion voyeuriste.
Abdelmadjid Tebboune s’est fourvoyé dans des approximations qui trahissent une absence de chiffres exacts sur l’épidémie du coronavirus et sur la gestion de la crise sanitaire à travers le pays. Le président de la République s’est contenté de donner le chiffre de deux quartiers de la capitale qui comptent «entre dix et onze cas», tandis que dans les autres, on dénombre «un à deux par-ci, un à deux par-là». Un «à-peu-près» agrémenté de sermons et de mises en garde à l’encontre des «récalcitrants» qui ne s’astreignent pas aux mesures de confinement et qui continuent de circuler malgré les mesures édictées par les autorités.
Abdelmadjid Tebboune a indiqué que 400 permis de conduire ont été retirés et menacé de prison toute personne qui se trouverait dans la rue et sa voiture serait mise en fourrière. Pourtant, l’orateur, commentent des observateurs, n’a pas été en mesure de démontrer que l’Etat a réellement mis en place les dispositifs nécessaires pour assurer la continuité de la vie sociale et permettre aux citoyens de s’approvisionner en denrées alimentaires et autres produits de première nécessité. «En Europe, au lieu des menaces, les chefs d’Etat et les Premiers ministres, veillant au bien-être de leurs administrés en ces temps difficiles, ont même prévu un chapitre à l’activité physique individuelle et à la promenade des animaux de compagnie», regrettent ces observateurs, qui soutiennent que «la menace comme acte de langage ne servira qu’à encourager les Algériens à braver encore plus les interdits, d’autant que les conditions de vie quotidiennes ne permettent par un confinement de longue durée à cause de la promiscuité et du nombre largement au-dessus de la moyenne d’occupants des appartements-cages par mètre carré».
Les Algériens, déjà paniqués, sont donc avertis : ils ont un pied en prison. Tebboune l’a dit avec la même suffisance que l’ancien chef d’état-major qui a fait de l’embastillement à tours de bras un acte ordinaire et de toute la chaîne de l’administration – du ministre au maire – qui en a pris de la graine. Entretemps, les files d’attente devant les stations-service s’allongent et la frénésie de l’avitaillement va en s’accentuant.
M. K.
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