Description caricaturale des hommes de Bouteflika un an après sa déchéance
Par Dr Abderrahmane Cherfouh – Il y a exactement une année, Bouteflika renonçait au pouvoir. La nouvelle est tombée le mardi 2 avril 2019. Il avait présenté sa démission au Conseil constitutionnel. Dès sa diffusion dans les médias, l’annonce surprise et inattendue avait commencé à circuler parmi la population qui avait réclamé son départ et qui ne voulait plus du cadre. Poussé dans ses derniers retranchements, acculé par un peuple vaillant et courageux qui avait juré de lui porter l’estocade, Bouteflika avait fini par lâcher prise. Dans une ultime tentative de résistance, il avait tenté de repousser l’échéance qui s’annonçait inéluctable mais voyant l’étau se resserrer autour de lui, il n’opposa aucune résistance. Le pays venait de se débarrasser d’un mégalomane qui avait déclaré à maintes reprises qu’il incarnait l’Algérie tout entière. Le peuple venait de remporter sa première bataille. Gaïd-Salah, qui était le principal soutien de Bouteflika et son dernier rempart, avait décidé de le sacrifier pour sauver le système.
C’en était fini de cet homme moribond complètement déconnecté de la réalité. Revanchard, inconscient, sans envergure, sans vision politique, incompétent, il a semé pendant vingt ans de règne sans partage le chaos et a permis à la mafia politico-financière de prospérer et d’accaparer toutes les richesses du pays. Il a fait de l’Algérie la république des coquins et des copains, la République des oligarques et des intouchables, la République de l’impunité et de la justice aux ordres. Il a encouragé les détournements, les malversations et le pillage. Il a érigé la corruption en institution et a fait d’elle son instrument, son outil, son terrain de prédilection pour conserver le pouvoir. Il avait d’autres principales armes : l’hypocrisie, la fourberie et les manigances. Narcissique et égocentrique, il est arrivé au pouvoir par un vrai concours de circonstances. Il cherchait la célébrité et il est arrivé à la réaliser en devenant la risée du monde entier, portant dans le même temps un rude coup au prestige de l’Algérie qui était le fer de lance et la Mecque des révolutionnaires un certain temps. Il a quitté le pouvoir par la petite porte, humilié et chassé par le peuple.
Ses principaux hommes
Saïd Bouteflika : le président bis. Le véritable président bis, le décideur de l’ombre vers lequel convergeaient tous ceux qui gravitaient autour du système. Il doit tout à son frère. C’était le faiseur des ministres. Omniscient et omniprésent, il était partout, veillait sur tout et contrôlait tout. Il était l’œil et la gâchette de son frère. Homme le plus puissant du clan après le Président, il était sans foi, ni loi. Ses courtisans lui devaient tout. L’obéissance, l’allégeance, la soumission, la loyauté à toute épreuve sont les critères de référence pour faire partie du clan. Gare à celui qui tenterait de rompre le contrat ! Il serait exclu et jeté aux orties. Benflis et Belkhadem en savent quelque chose.
Ali Haddad : le trésorier du clan. Ami inconditionnel de Saïd Bouteflika, il est le plus grand affairiste du clan, sorti du néant, complètement absorbé par l’argent et le gain facile, pourvoyeur de fonds de la clique – retour d’ascenseur –, placé à la tête du FCE pour distribuer la rente aux délateurs et aux prédateurs. Il rêvait d’ouvrir une agence matrimoniale pour marier les Algériennes aux Chinois.
Amar Saïdani : le tambourineur. Il était le porte-parole officieux du clan. Un autre exécuteur des sales besognes. Dépourvu de scrupule, c’est lui qui véhiculait et transmettait les messages conçus dans les laboratoires de Saïd Bouteflika. L’écouter parler est une véritable torture pour les oreilles et le cœur. Parachuté au sommet de l’échelle par un miracle de la fratrie Bouteflika, il est un véritable cas psychopathologique.
Amar Ghoul : l’islamiste bon chic, bon genre. Ami de tous ceux qui sont cités dans cette liste, il est l’homme de «l’auto-déroute». Il tourne casaque au gré du vent. Impliqué dans des scandales à répétition, il a pourtant survécu à tous les remaniements ministériels. Son allégeance à Saïd Bouteflika est devenue quasi légendaire. Il cultive le culte du chef ; c’est sa principale arme. Il est assujetti corps et âme à son bienfaiteur. Il n’a aucun principe moral, aucune dignité. Ses interventions hystériques, son crétinisme donnent la nausée. Un autre cas psychopathologique.
Amara Benyounes : l’IRM du cerveau de Bouteflika. L’homme IRM, défenseur inconditionnel de la supériorité du cerveau de Bouteflika sur celui des 40 millions d’Algériens réunis. Pour lui, les Algériens sont au bas de l’échelle comparativement à l’intelligence hors du commun du gourou qui «n’a pas besoin de jambes pour réfléchir».
Abdeslam Bouchouareb : Monsieur bakchich. Le controversé ministre de l’Industrie, le collectionneur d’appartements huppés à Paris et amateur des pots-de- vin, est celui par qui les scandales arrivent. Chargé de mission au service de Saïd Bouteflika à qui il doit son ascension, il n’a jamais été inquiété par la justice, ni dans l’affaire Khalifa ni dans celle des «Panama Papers». Il faisait partie de la garde rapprochée du clan et défenseur attitré de la pseudo-industrie algérienne. Il distribuait la rentre aux plus offrant.
Chakib Khelil : le pote à Boutef’. L’ami d’enfance de Bouteflika a fait de la Sonatrach sa boîte privée. Il a découvert l’Algérie trente-six ans après sa naissance. Il est l’exemple parfait de ceux qui n’ont jamais voulu répondre au devoir national quand l’Algérie avait besoin d’eux. Un cas rare à l’époque. Aussi surprenant que cela puisse paraître, on peut refuser de répondre au devoir national et revendiquer un destin national. Bouteflika et son frère Saïd sont des faiseurs de miracles, capables de transformer le coupable en victime. Pour ce nouveau converti à la vertu, la laïcité et la démocratie sont des concepts américains. Ils ne sont pas applicables en Algérie. Comme son ami président-roi, il est un adepte des zaouïas.
Djamel Ould-Abbès : le médecin malgré lui. L’homme qui ne blêmit jamais, qui ne rougit jamais. Il ment comme il respire. Il a fait du prestigieux parti FLN de la Guerre de libération nationale et des vingt-deux pères de la Révolution un fonds de commerce spécialisé dans la vente de sièges au Parlement. Ubique, il peut être ici et ailleurs en même temps ; à la fois condamné à mort, poseur de bombes, camarade d’université de la chancelière allemande Angela Merkel, major de promotion, inventeur de l’appareil D350 commercialisé à travers la planète, il est l’auteur de hauts faits d’armes dont lui seul est capable. Magouilleur, hâbleur comme son mentor, il excelle dans les détournements et les malversations. Partout où il passe, il rafle la mise.
Ahmed Ouyahia : l’exécutant des sales besognes. Lui aussi est sans foi, ni loi. Grand collectionneur de vestes, il les retourne au gré du vent. Il cultive l’art du dribble et de l’esquive. Homme politique le plus détesté par les Algériens, il rêvait d’un destin national. Il méprise ces concitoyens qu’il a invités à ne plus manger de yaourt. Homme sans remords, il est incapable de demander pardon.
Abdelmalek Sellal : le pitre du clan et l’amuseur public. Il a gravi tous les échelons à force de persévérance et d’allégeance. De chef de daïra à Tamanrasset, dans l’extrême-sud du pays, il est devenu le Premier ministre de l’Algérie de Bouteflika. Il est un grand collectionneur de bêtises, de gaffes et de bourdes.
A. C.
(Montréal)
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