Coronavirus : quand la panique des faibles fait le bonheur des puissants
Par Mesloub Khider – Certes, la pandémie du coronavirus est grave. Mais elle est loin d’être dramatique. Son taux de létalité est proche de celui de la grippe. C’est une épidémie saisonnière. Pourtant, en quelques semaines, elle a réussi à détrôner les autres maladies encore plus meurtrières. D’autres catastrophes sociales plus funestes.
Sur le chapitre de la santé publique, les maladies cardiovasculaires tuent 17 700 000 millions de personnes chaque année. Tout aussi mortel, le cancer provoque 10 millions de décès chaque année, soit 2 000 fois plus que le coronavirus. Si le taux de mortalité par cancer est-il aussi dramatiquement élevé, c’est parce que les gouvernements des pays industrialisés capitalistes autorisent la dissémination de nombreux polluants chimiques cancérigènes. Sur le chapitre de la malnutrition, il ne faut pas oublier les personnes mortes de famine, actuellement évaluées à plus de 3 millions depuis le 1er janvier 2020. D’ici la fin de l’année, on dénombrera 12 millions de décès. Ne pas oublier également les victimes de la guerre, dont le nombre est incommensurable.
Sur le chapitre de la sécurité routière, chaque année, plus de 1 350 000 millions de personnes perdent la vie dans un accident de la circulation, dont 90% dans les pays pauvres. Soit 1 mort toutes les 21 secondes. A cela il faut ajouter 20 à 50 millions de blessés. Au rythme actuel, selon les estimations des experts, la route décimera 2,5 millions de personnes chaque année. Ces accidents de la route coûtent aux pays pauvres 5% de leur PIB, privent les familles des victimes de revenus, pèsent sur le système de santé. Or, les pouvoirs des différents pays n’ont jamais pris des mesures d’interdiction de vente de véhicules responsables de ces effrayantes hécatombes. Chaque Etat continue à obliger les personnes à se confiner dans ces cercueils ambulants pour le bien des industries de l’automobile, souvent subventionnées avec l’argent des contribuables. Aucun gouvernement n’a décrété l’arrêt total de la production des voitures, de leur circulation, pour favoriser les transports en commun, moins onéreux et moins nuisibles.
Pourtant, ces différentes maladies mortelles et catastrophes meurtrières ne suscitent jamais d’affolement, de psychose. Ni des mesures drastiques de protection. Ni des politiques de confinement. Ni des crises économiques. Ni des décisions de restrictions des libertés. Qui pourrait croire qu’un microscopique virus invisible est à l’origine de la déstabilisation de l’ordre social et économique mondial actuel ? Le coronavirus a bon dos. Pour le moment, c’est le peuple qui est contraint de ramper, infantilisé par les puissants.
La mort n’a pas la même valeur pour tous, surtout pour les classes dominantes pour qui la vie du peuple constitue un coût, une charge. Particulièrement vrai pour les populations surnuméraires, sans travail, les personnes à la santé fragile, les retraités. La mort de ces populations excédentaires improductives permet, aux yeux du capital, la régénération du corps social rentable, parasité, selon les gouvernants, par cette engeance populacière grabataire et sénile. Et si le coronavirus était l’élixir de jouvence des classes dominantes ?
En effet, en cette période de pandémie, les classes dirigeantes tentent de redorer leur blason, éclaboussé par la corruption et étrillé par les contestations, en frappant les esprits, en essayant de se représenter devant le peuple comme les sauveurs – de vies menacées par le coronavirus. Par cette entreprise de captation politique, elles veulent nous faire oublier leur pouvoir dictatorial, leur illégitimité institutionnelle, leur incurie notoire. Elles tentent de passer en pertes et profits leurs politiques prédatrices et leurs mœurs répressives.
Cette société macabre se réincarne constamment par la manipulation mentale généralisée. Surfant sur la crise sanitaire du Covid-19, les médias du pouvoir provoquent des vagues de panique, pour nous faire oublier le tsunami de la crise économique et les tempêtes de la politique répressive. La panique des populations fait le bonheur des puissants, toujours aux commandes des entreprises, de l’Etat. Dans le système capitaliste, la crise est la norme. Or, cette énième crise était prévisible, annoncée de longue date. Les puissants et spéculateurs se sont servis du coronavirus pour déclencher cette crise, avec la perspective d’en tirer des profits financiers et des bénéfices politiques, quitte à ébranler l’équilibre économique mondial, mais reconstruit à leur profit. Pour preuve. Depuis des années, l’économie réellement productive représente moins de 10% des richesses. Les 90% restant s’affairent dans la spéculation de la haute finance qui génère plus de profits que l’économie réelle. Au reste, les boursicoteurs ne sont pas condamnés au confinement pénitentiaire. Ainsi, au moment où de nombreux perdent, une minorité gagne. Pendant que les populations sont confinées, soumises au contrôle social, au harcèlement policier et à l’encerclement militaire, la circulation de l’argent s’accélère, les spéculations financières s’envolent.
Insidieusement, la militarisation de la société tisse sa toile dictatoriale jusque dans la petite demeure familiale, sous couvert de lutte contre le coronavirus, cet ennemi invisible. Les populations sont condamnées à mourir à petit feu dans leur prison domiciliaire, pour permettre aux classes possédantes de prolonger leur existence parasitaire. Le confinement est le vaccin soporifique administré à la population pour permettre aux classes dirigeantes de continuer à vivre dans le raffinement. Les populations sont séquestrées, prises en otage par les gouvernants. Elles sont devenues les victimes expiatoires d’un système moribond qui tente de se reconstituer une éphémère jeunesse sur le sacrifice social de millions de travailleurs livrés aux Vaux d’or assoiffés de profits.
M. K.
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