Le tapage fait autour des «dons» des dignitaires du régime suscite la colère
Par Mohamed K. – Les médias gouvernementaux et les chaînes de télévision inféodées au pouvoir saturent les citoyens depuis qu’Abdelmadjid Tebboune a informé l’opinion publique sur l’ouverture de deux comptes dédiés à la lutte contre le coronavirus et appelé aux cotisations pour les créditer.
Ces deux derniers jours, et suite à la réfraction – prévisible du reste – des citoyens après cet appel à la solidarité nationale, le pouvoir a instruit ses outils de propagande pour étaler les dons en numéraires du Président, du Premier ministre, des ministres, des walis, des hauts gradés de l’armée, des députés et même, apprend-on aujourd’hui, de l’ancien chef d’Etat par intérim, Abdelkader Bensalah, éclaboussé par le scandale des privilèges accordés à sa fille en France.
Les citoyens n’y vont pas de main morte pour décrire ce qu’ils qualifient d’hypocrisie, de manœuvre politicienne et de vaine action pour tenter de gagner l’empathie du citoyen. De nombreux internautes ironisent en affirmant que le moindre sac de semoule offert est immédiatement relayé par les médias comme s’il s’agissait d’une immense œuvre caritative. «Pourtant, objectent des observateurs, notre religion proscrit la publicité autour d’une contribution financière, quelles qu’en soient la destination et la valeur.»
«Il va de soi que ce tapage fait autour de ce mois de salaire sacrifié par les hauts dignitaires du régime vise à convaincre le plus grand nombre de suivre l’exemple, mais c’est un coup d’épée dans l’eau», soulignent des sources qui relèvent que cette approche niaise, au lieu d’inciter les gens à alimenter les comptes ouverts par le gouvernement, remue, en vérité, le couteau dans la plaie et rappelle l’immense écart qui sépare les plus petits salaires des plus élevés. «Le président de la République touche plus de 40 fois plus que le travailleur payé au SNMG», précisent des observateurs qui affirment que «le problème n’est ni dans la rémunération du chef de l’Etat ni dans le Salaire national minimum garanti, chaque pays le fixant selon ses capacités, mais dans la marge qui sépare les deux émoluments qui est au moins deux fois supérieure à la norme».
D’autres internautes vont jusqu’à prendre l’exemple de la mafia italienne qui a fait don de près de dix milliards de dollars à l’Etat «dans la discrétion la plus absolue alors qu’en Algérie le moindre masque jetable offert est filmé sous toutes les coutures», ironisent-ils. Il en va de même pour le battage fait autour de l’envoi de deux avions cargos militaires en Chine pour ramener du matériel nécessaire à la prise en charge des malades, « alors qu’Israël qui compte à peine huit millions d’habitants a mobilisé onze gros porteurs pour la même opération».
Encore une fois, le bourrage entrepris par les services de propagande du système a eu l’effet contraire à celui qui en était escompté. Un ratage médiatique de plus qui coïncide avec les doutes émis par les citoyens sur les chiffres des cas de contamination et sur le sérieux de leur prise en charge par des établissements sanitaires connus pour être incapables d’assurer le minimum aux Algériens, même en temps normal.
M. K.
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