Une «fatwa» pour pousser les Algériens à déclarer leur éventuelle atteinte par le Covid-19
Par Mounir Serraï – Face au non-respect des règles de confinement et, surtout, à la non-déclaration de la maladie du Covid-19 par certains Algériens, le gouvernement n’a pas trouvé mieux que de faire appel au ministère des Affaires religieuses, et plus précisément à sa commission interministérielle des «fatwas».
Ainsi donc, cette commission, dont ses membres se sont réunis aujourd’hui à distance, a déclaré comme «une transgression des règles religieuses qui font de la protection de la vie humaine un devoir et une obligation pour chaque individu». «Toute personne atteinte par le Covid-19 doit informer les autorités et les services sanitaires mais aussi son entourage, lequel aussi doit informer les personnes avec lesquelles il a été en contact pour prendre les mesures nécessaires inhérentes à la protection contre cette maladie très contagieuse», affirme la Commission nationale des fatwas pour laquelle «ne peut le faire, c’est commettre un péché. Car, ajoute cette Commission, causer du mal à autrui est interdit par la religion».
S’appuyant notamment sur quelques paroles de l’imam El-Malik mais aussi sur celles du Prophète Mohamed (QSSSL), cette Commission tente ainsi de convaincre des Algériens encore inconscients des effets ravageurs de cette maladie sur la nécessité d’appliquer les gestes barrières mais également de signaler les personnes qui ont été contaminées. Cette Commission affirme que toute personne qui ne dénonce pas des cas de contamination non déclarés est considérée, du point de vue religieux comme «complice» d’une œuvre maléfique qui porte atteinte à la santé d’autrui et de la société.
Le recours à cette commission cache mal toute la difficulté du gouvernement à gérer la situation et faire régner la discipline au sein de la société. Les mesures prises récemment pour renforcer le dispositif de lutte contre la propagation du Covid-19 ont rencontré beaucoup de résistance dans la société, notamment dans les quartiers populaires des grandes villes.
Même à Blida, où le confinement est total, tout le monde ne respecte pas cette mesure. Des images de marchés et de magasins bondés de monde en pleine journée ont fait le tour de la Toile. Certains internautes n’ont pas caché leur choc et leur consternation contre des comportements jugés irresponsables. Et de tels comportements n’ont pas été constatés uniquement à Blida.
A Alger et dans d’autres villes aussi, beaucoup de gens ne respectent pas la distanciation sociale et les autres gestes barrières qui éviteraient une propagation rapide de ce virus mortel, qui a fait des ravages dans le monde.
Cette «fatwa» va-t-elle remettre de l’ordre et aider les autorités à faire respecter les mesures de prévention en vigueur depuis un mois ?
M. S.
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