Les médias lourds français passent le revers de Total en Algérie sous silence
Par Nabil D. – Motus et bouche cousue. C’est le mot d’ordre qu’ont adopté les médias lourds français qui n’ont pas relayé l’information révélée par le président-directeur général du groupe pétrolier Total au sujet de l’affaire des actifs de la major américaine Anadarko en Algérie. Ce n’est pourtant pas une mince affaire. La France a perdu le tiers du gisement des hydrocarbures dans le pays et ce revers est d’autant plus amer pour les Français qu’il intervient après que Paris eut cru, un moment, que la nouvelle direction politique qui a succédé au régime Bouteflika allait cautionner le rachat des parts d’Anadarko par Total.
Au moment de l’annonce par Alger de son intention de faire valoir son droit de préemption, les médias français étaient unanimes à considérer la réaction des autorités algériennes comme un «acte hostile». Des responsables français avaient commenté ce «blocage» en affirmant que des discussions avaient été lancées avec la partie algérienne pour permettre la concrétisation de cette OPA. Ces sources avaient même laissé entendre que ces pourparlers étaient «sur la bonne voie», en se référant à une déclaration du ministre de l’Energie, Mohamed Arkab, qui avait affirmé que le dossier était à l’étude et que toutes les portes n’étaient pas fermées.
Quelques mois plus tard, le couperet est tombé, et le PDG de Total a dû annoncer que le groupe pétrolier français, très actif en Afrique, jetait l’éponge. La déclaration de Patrick Pouyanné n’a pas eu l’effet retentissant qu’il espérait apparemment. Hormis quelques médias spécialisés et agences de presse, les chaînes d’information en continu et les télévisions généralistes n’ont pas relayé ce qui semble être un message à l’endroit des décideurs politiques pour «faire bouger les choses» dans le sens des intérêts de la France en Algérie. Ce blackout des médias lourds est-il symptomatique d’un désaccord entre le gouvernement et la direction du groupe Total qui se sentirait ainsi lâchée par les politiques ? Possible.
S’il est difficile pour le PDG du groupe pétrolier français de digérer ce qui ne peut être perçu par lui que comme un cuisant échec et une défaite face à Sonatrach et Anadarko, l’Elysée et le Quai d’Orsay, par contre, semblent avoir préféré ne pas s’engager dans un nouveau bras de fer avec Alger dans ce contexte marqué par une nouvelle brouille, confirmée par les derniers propos du président Tebboune qui a, de nouveau, accusé la France de vouloir mener une action de déstabilisation en Algérie. Ni Macron ni Jean-Yves Le Drian n’ont répondu à cette nouvelle charge du successeur de Bouteflika, la priorité semblant être à la gestion de la crise sanitaire mondiale qui a durement affecté la France.
Paris réserve-t-il sa «réponse» pour l’après-Covid-19 ? On le saura lorsque les mesures de confinement dans ce pays où le coronavirus a fait plusieurs milliers de morts seront levées et que les questions économiques reprendront leur place prépondérante dans les relations internationales.
N. D.
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