Affaire Total-Anadarko en Algérie : ce que le ministre de l’Energie ne dit pas
Par Nabil D. – L’affaire Total-Anadarko en Algérie n’a pas révélé tous ses secrets. La décision des autorités algériennes d’empêcher l’OPA du groupe pétrolier français sur la firme américaine est-elle d’ordre politique ou économique ? En apparence, le «revers» de Total est dû à une tendance de la nouvelle direction politique en Algérie à minimiser l’emprise de l’ancienne puissance coloniale sur l’économie nationale. Mais, en réalité, notent des sources informées, il est surtout question d’une guerre larvée que se livrent Américains et Français pour l’exploitation du gaz de schiste en Algérie.
Nos sources en veulent pour preuve le fait – non relevé par les médias – que l’Algérie n’a pas exercé son droit de préemption mais a plutôt convaincu Anadarko, filiale d’Occidental Petroleum, de rester. Il y a donc eu négociations secrètes entre le ministère de l’Energie et le géant américain pour que ce dernier accepte de poursuivre son activité en Algérie. De quoi peut-il s’agir ? Quelles garanties les Américains ont-ils obtenues pour revenir sur leur décision, sachant que l’Algérie aurait eu du mal à entraver les intérêts de deux puissances économiques mondiales sans risquer de subir des représailles ?
Selon nos sources, aussi bien Total qu’Anadarko se tournent vers l’exploitation du gaz de schiste. «Il faut rappeler que c’est l’ancien ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, qui a évoqué le recours par l’Algérie aux énergies non-conventionnelles, avant même que les autorités algériennes n’en fassent l’annonce», soulignent nos sources. Or, les experts du secteur énergétique définissent Occidental Petroleum comme un «géant du pétrole de schiste», dont la présidente-directrice générale, Vicki Hollub, est considérée en Equateur, où la firme prospère depuis de longues années, «presque comme la maire d’une petite ville alors qu’elle gérait des opérations de forage dans la jungle amazonienne». Allusion à la grande influence politique locale de la patronne d’Oxy.
La non-conclusion de l’accord entre Total et Anadarko est saluée par certains milieux en Algérie comme une victoire contre «l’ancienne puissance coloniale». Une attitude démagogique qui occulte les graves crimes contre l’humanité commis par les Etats-Unis dans de nombreux pays occupés et détruits par la première puissance militaire mondiale. «Cela revient au même, rectifient nos sources, la France comme les Etats-Unis sont les deux faces d’une même pièce, les deux Etats ayant bâti leur puissance sur la colonisation de territoires étrangers.» «Par ailleurs, soulignent nos sources, la maison mère d’Anadarko a été condamnée en 2012 au Nicaragua à indemniser les victimes d’une contamination au pesticide DBCP, alors qu’en 2017 Occidental Petroleum a été identifiée par l’ONG Carbon Disclosure Project comme la huitième entreprise privée émettant le plus de gaz à effets de serre dans le monde».
«Que le gaz de schiste soit exploité par Total ou Anadarko, cela ne change rien au fait que ce sont les firmes étrangères qui tireront le plus gros bénéfice et qui pollueront le Grand Sud qu’ils abandonneront une fois qu’ils auront asséché la nappe albienne, pollué le sol et siphonné nos richesses souterraines», concluent nos sources pour lesquelles «il n’y a vraiment pas de quoi s’enorgueillir d’offrir deux tiers de nos gisements au pays qui a opposé son véto à la nomination de Ramtane Lamamra par l’ONU en Libye».
N. D.
Comment (49)