Violente charge du général Ali Ghediri contre Gaïd-Salah à partir de la prison
Par Abdelkader S. – Le général à la retraite Ali Ghediri, arbitrairement emprisonné sur ordre de l’ancien chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd-Salah, a adressé une lettre au président de la République dans laquelle il dénonce le prolongement de son incarcération. «Après une année de détention, l’on est venu me signifier, pour la quatrième fois consécutive, la prorogation, nonobstant la forme, de la durée de confinement politique auquel je suis soumis et désigné par euphémisme mandat de dépôt, cette mesure exceptionnelle que le législateur, conscient de l’usage abusif qui pourrait en être fait, a, par prévenance, soumise à des conditions strictes et bien définies».
L’ancien candidat à la présidentielle annulée d’avril 2019 pointe, dans sa lettre remise aux médias par son avocate, un «abus» qu’il affirme être «en train de subir dans [sa] chair, dans les geôles d’El-Harrach, au motif inavoué que [sa] présence sur la scène politique n’était pas sans incommoder certains décideurs», allusion à Gaïd-Salah. «Il en va ainsi […] dans tout pays où les garde-fous institutionnels font défaut», a-t-il écrit. «Sans de telles conditions, les ressentiments personnels et les ambitions inhibent les consciences et laissent libre cours à l’omnipotence pour s’imposer aux lieu et place des lois et règlements régissant l’ordre républicain», a ajouté Ali Ghediri, selon lequel «il devient alors loisible aux maîtres du moment d’instrumentaliser les institutions et les organismes de l’Etat et d’en soumettre le fonctionnement à leur seul bon vouloir».
«Telle est la vérité […], en effet, attenter à la compétence et à l’intégrité du corps des magistrats que d’admettre qu’il puisse s’agir d’une décision judiciaire prise sur la base de faits et charges dûment établis», souligne encore le prisonnier politique que Gaïd-Salah a accablé sous une volée d’accusations fallacieuses. «C’est d’une décision éminemment politique dont il s’agit, insiste-t-il, car seule la politique se considère, quand elle est pratiquée dans de pareilles conditions, aux règles morales, non tenues». «De la sorte, d’honorables citoyens, serviteurs toute une vie durant de l’Etat, autant moralement intègres que patriotes engagés, se retrouvent arbitrairement taxés de traîtres à la nation et, par la seule omnipotence des décideurs, sont jetés sans preuve aucune en pâture à la vindicte populaire, coupables de crimes qui n’ont d’existence que dans l’imaginaire des commanditaires», s’insurge l’ancien directeur du personnel au ministère de la Défense nationale, connu pour son opposition farouche à l’ex-chef d’état-major dont il connaît le passé peu honorable.
Pour Ali Ghediri, les faits qui lui sont attribués sont «dénués de sens» et «irréels» et «sont avancés pour servir d’habillage juridique à une accusation qui prend racine dans le terreau fertile des pulsions individuelles, des calculs de basse politique et du besoin vital de satisfaire certains égos hypertrophiés n’obéissant qu’à leurs instincts». «Dans de pareils cas, écrit-il, l’avis contraire est perçu comme forcément subversif et tout opposant politique comme traître en puissance.» «Il en a été ainsi de ma candidature aux élections présidentielles avortées du 18 avril 2019 : un droit citoyen appréhendé, par les décideurs du moment, comme un crime de lèse-majesté, une outrecuidance, un défi à leur suprême autorité en tant que gardiens autoproclamés du temple», s’indigne Ali Ghediri, en estimant que ces derniers, allusion à Gaïd-Salah et son aréopage, «ne pouvaient, ni ne sauraient admettre cette manière d’envisager la politique». «Ils ont trouvé en mes positions contre le cinquième mandat et en mon engagement ferme et résolu pour une nette rupture avec le système en place prétexte pour m’accabler d’accusations d’extrême gravité relevant de la haute trahison», souligne-t-il.
Ali Ghediri dénonce une cabale montée contre lui. «Un véritable montage de mensonges grotesques et sans intelligence aux relents de règlement de comptes dans le seul but de me salir et me tenir éloigné du processus des élections présidentielles», écrit-il en pointant un doigt accusateur vers «les décideurs (qui] ont pêché par excès de confiance en la puissance que leur offrait la conjoncture qu’ils pensaient éternelle et, à ce titre, à même de forcer à leur seul profit les portes de l’histoire afin qu’elle soit écrite à leur guise».
«Cela étant, Monsieur le Président de la République, j’ose dire, malgré mon état de confiné politique et face à l’acharnement dont je fais l’objet, que je ne suis pas sans croire que l’on ne saurait assurer une transcendance politique réelle – indispensable élan salvateur pour l’édification d’une République nouvelle, authentiquement démocratique – sans liberté et sans justice, elles en sont le socle», a ajouté Ali Ghediri, qui conclut sa missive en espérant avoir fait parvenir au président Tebboune, à partir des geôles d’El-Harrach, après une année de silence qu’il s’est imposé «au seul regard de la situation du pays», «non pas une imploration, mais un appel pour une justice équitable, sereine et diligente qui puisse s’exercer sans injonctions, d’où qu’elles puissent émaner».
A. S.
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