L’Algérie réussira-t-elle à éviter la guerre entre l’Egypte et l’Ethiopie ?
Par Kamel M. – Si la présidente éthiopienne a jugé nécessaire de prendre langue avec son homologue algérien, c’est que la crise entre l’Ethiopie et l’Egypte est à son paroxysme. En effet, les armées des deux pays se tiennent prêtes pour tout imprévu et la guerre de l’eau risque d’éclater à tout moment. L’Egypte est sur plusieurs fronts tandis que l’Ethiopie tient à remplir son barrage, et cela risque sinon assécher du moins réduire considérablement le débit du Nil côté égyptien.
Comme pour la Libye, l’Algérie œuvrera sans aucun doute à inviter les deux parties au dialogue pour éviter d’envenimer la situation dans un contexte marqué par une instabilité mondiale rarement égalée. «Rien ne va plus depuis l’apparition de la pandémie du Covid-19 et les mesures draconiennes prises par la majorité des gouvernements à travers le monde pour en limiter les dégâts déjà considérables», notent des sources proches du dossier. «Cette phase d’après-confinement risque d’être fatale pour l’ensemble de l’humanité qui fait face aux conséquences dramatiques des mesures drastiques qui ont ruiné le monde, paralysé l’économie, provoqué des banqueroutes en série et augmenté le chômage de façon exponentielle», expliquent ces sources, qui soulignent que «de nouveaux conflits vont venir se greffer à cette situation alarmante».
Le Président égyptien a lancé une sévère mise en garde à la Turquie en brandissant la menace d’intervenir en Libye pour y «déloger les mercenaires» et «démanteler les milices». Mais la démonstration de force d’Abdelfattah Al-Sissi semblait s’adresser aussi à l’Ethiopie en laquelle l’Egypte, pays aride qui vit exclusivement de l’eau du Nil, voit un nouvel ennemi qui risque de provoquer une grave crise interne au cas où les Egyptiens étaient privés d’une partie de l’eau de ce fleuve de 6 700 kilomètres qui s’écoule vers le nord.
«Les nouvelles guerres au Moyen-Orient et en Afrique seront des guerres de l’eau et l’Egypte, avec bientôt ses cent millions d’habitants, n’aura pas d’autre choix que de recourir aux armes pour continuer d’accaparer une bonne partie de cette richesse naturelle qui fertilise ses terres sahariennes et sans laquelle les Egyptiens mourraient de soif», expliquent ces sources.
Outre l’Egypte et l’Ethiopie, le Nil traverse l’Erythrée, le Soudan, le Soudan du Sud, le Rwanda, la Tanzanie, l’Ouganda, le Burundi, la République démocratique du Congo et le Kenya. La répartition de ses eaux pour l’exploitation est régulée par un accord liant ces pays sous la bannière de l’Initiative du bassin du Nil (IBN). Il tire son origine d’un premier accord datant de 1929, définissant la répartition entre l’Egypte, formellement indépendante à cette époque, et le reste du territoire de l’Empire britannique riverain du Nil, donnant notamment un droit de veto à l’Egypte sur tout projet en amont.
Un second accord fut signé en 1959 entre l’Egypte et le Soudan, sans tenir compte des autres Etats concernés. L’Egypte accédait ainsi à 55,5 milliards de mètres cubes par an, et le Soudan à 18,5 milliards de mètres cubes, accaparant à eux deux plus des trois quarts de l’eau disponible. Cette répartition est remise en cause par les autres pays riverains du fleuve, souhaitant pouvoir mener leurs propres projets de développement. L’Egypte et le Soudan revendiquent, eux, des droits historiques, en en faisant même une question de sécurité nationale.
K. M.
Comment (37)