Aguila Saleh court chez Mohammed VI après avoir été «chassé» par Tebboune
Par Mohamed K. – Le froid qui s’est installé entre Alger et le Parlement de Tobrouk se confirme. Après avoir été prié d’annuler sa visite prévue en Algérie le 18 juillet dernier, Aguila Saleh s’est rendu au Maroc où il s’est réuni avec le ministre marocain des Affaires étrangères, chargé par le roi de court-circuiter une nouvelle fois les efforts de l’Algérie visant à éviter une dangereuse escalade dans laquelle le Makhzen s’investit pleinement.
Officiellement, le Maroc, par la voix de Nasser Bourita, s’oppose à «toute ingérence étrangère en Libye». Mais dans les faits, Rabat s’inscrit dans la même logique des pays qui entravent toute solution politique sérieuse dans ce pays en proie aux appétits voraces d’un certain nombre de capitales qui lorgnent les immenses gisements naturels présents dans ce vaste espace géographique peu peuplé. Si, en effet, la Turquie et l’Egypte disposent d’armées et d’alliances stratégiques capables d’imposer leurs agendas dans l’ancienne Jamahiriya, le Maroc, en revanche, fait jouer sa rouerie habituelle pour faire accroire à une très hypothétique capacité à influer sur le cours des événements en Libye en se présentant comme un interlocuteur «fiable».
Inconstant et versatile, le Makhzen a pourtant démontré que l’«accord» de Skhirat a été un flop total et son absence à la conférence de Berlin, où Mohammed VI n’a pas été invité – et pour cause – est une preuve supplémentaire du rôle tout à fait secondaire et inconsistant qu’il joue dans cette crise dont la solution est loin d’être à sa portée.
Dans son interview au journal français L’Opinion, le président Tebboune avait répondu de manière claire, quoiqu’indirecte, aux agissements de l’Egypte et des autres sponsors qui soutiennent Khalifa Haftar. En affirmant que l’Algérie refusait le fait accompli et les demandes de soutien de la part de ceux qui n’ont pas consulté la partie algérienne, le chef de l’Etat pointait du doigt le président égyptien, Abdelfattah Al-Sissi, et son initiative unilatérale qui a consisté à inviter le chef de l’Armée nationale libyenne (ANL), Khalifa Haftar, et le président du Parlement de Tobrouk, Aguilla Saleh.
Pour Alger, en effet, il n’y a qu’un seul cadre pour le règlement de la crise libyenne : celui du processus de Berlin, placé sous l’égide de l’ONU, dans lequel l’Algérie est partie prenante, ne déviera pas de sa posture d’équidistance vis-à-vis des parties belligérantes et ne se rangera pas aux côtés de l’une contre l’autre.
Tebboune a, en outre, mis en garde contre l’aventurisme et les dangers d’embrasement pour la Libye, ainsi que pour les pays du voisinage, qui découleraient de l’armement des tribus libyennes, estimant que cela conduira inéluctablement à la somalisation du pays et constitue un appel d’air à tous les terroristes de la région et aux trafics transfrontaliers d’armes, notamment. Ce jeu dangereux de l’Egypte contribue à l’escalade, alors que ce pays, qui adopte une posture feinte, n’arrête pas d’appeler à la désescalade.
C’est pour ces raisons que la visite d’Aguila Saleh avait été annulée, avaient révélé des sources proches du dossier à Algeriepatriotique. «La visite du président du Parlement de Tobrouk en Algérie visait notamment à solliciter le soutien ou, du moins, la compréhension des autorités algériennes en ce qui concerne les initiatives de l’Egypte et, éventuellement, d’user de l’influence de l’Algérie auprès de la Turquie et de l’homme-lige des Emirats arabes unis, Khalifa Haftar, afin que la bataille de Syrte n’ait pas lieu», avaient précisé nos sources.
M. K.
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