Prédation, allégeances et caisses vides : la chute d’un empire dénommé Anep
Par Mohamed K. – Le directeur général de l’Agence nationale d’édition et de publicité (Anep) a indiqué que des cadres de l’entreprise sont entendus actuellement par les services de la Gendarmerie nationale et que l’Inspection générale des finances (IGF) enquête depuis plusieurs mois sur la «gestion catastrophique» de cette entité qui a longtemps servi de «vache à traire».
Larbi Ouanoughi, qui s’est exprimé dans les colonnes de deux quotidiens nationaux, El-Watan et El-Khabar, n’y est pas allé de main morte pour décrire la situation de cette entreprise relevant du ministère de la Communication qui frôle la faillite. Les créances pourries se chiffrent à plusieurs milliers de milliards de centimes, et redresser la barre semble impossible, laisse entendre le directeur de ce «géant aux pieds d’argile» qui annonce, tout de go, que «les caisses de l’Anep sont vides», en raison, explique-t-il, du «cumul de la mauvaise gestion» qui «a fait que l’argent de l’Agence n’est pas dans ses caisses», mais à l’extérieur.
Larbi Ouanoughi accuse ouvertement ses prédécesseurs de «n’avoir travaillé que pour leur compte, leur clique et ceux qui les ont placés». Les qualificatifs et les constats effarants sont nombreux, les solutions minimes : transgression grave des lois, recrutement qui n’obéit à aucun critère de compétence et de rendement, casemate, créances irrécouvrables, absence de bons de commande, villa louée à un bénéficiaire «fantôme» pour 300 000 DA/mois, fonctionnement au téléphone, anarchie indescriptible mais préméditée, pillage, logique d’allégeance, prête-noms, jeux d’influences, cupidité, prédation et conflit d’intérêts.
Selon le directeur de l’Anep, les premiers éléments et les premiers résultats des enquêtes en cours «sont effarants et effrayants». Il révèle, par ailleurs, que les services de sécurité «n’ont jamais cessé de travailler et gardaient les dossiers». Mais pourquoi a-t-on laissé faire ? Algeriepatriotique a été le premier média en Algérie à s’attaquer à ce mastodonte en 2012, du temps où le colonel Fawzi faisait office d’un roi indétrônable et dont la seule évocation de son nom faisait trembler la Maison de la presse. Un ancien ministre nous avait révélé, en off the record, que les plus hautes autorités de l’époque lui avaient enjoint de réduire le nombre pléthorique de journaux de trois quarts pour n’en garder que vingt-cinq mais que, dans le même temps, le haut gradé de l’ex-DRS créait des titres régionaux sous de prête-noms pour continuer de capter l’alléchante manne publicitaire.
Les chiffres révélés par Larbi Ouanoughi indiquent que des journaux insignifiants et sans aucune audience ont profité des 15 000 milliards distribués par l’Anep ces vingt dernières années : El-Balagh, La Tribune, La Dépêche de Kabylie, Reporters, El-Hayat, La Nouvelle République, La Tribune des lecteurs, El-Adjwa, Le Jour d’Algérie, etc., tandis que les quotidiens à fort tirage étaient «arrosés» en contrepartie de leur loyauté au pouvoir.
M. K.
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