Youcef Aouchiche appelle le pouvoir à «prendre la mesure des graves périls qui guettent la nation»
Par Mounir Serraï – Le premier secrétaire du FFS, Youcef Aouchiche, met en garde contre les périls qui guettent l’Algérie. S’exprimant à l’occasion du double anniversaire du Congrès de la Soummam et l’insurrection nord-constantinoise, le premier secrétaire du FFS revient sur l’éloignement des pouvoirs successifs depuis l’indépendance des bases institutionnelles et doctrinales du futur Etat algérien telles que définies dans les résolutions de la Soummam. «Si les luttes fratricides et sanglantes autour du contrôle du pouvoir n’ont pas empêché l’Algérie de se libérer du joug colonial, elles ont, en revanche, contrarié la promesse historique d’édifier un Etat souverain, démocratique et social», souligne-t-il, expliquant ainsi la raison pour laquelle les fondateurs du FFS, à leur tête feu Hocine Aït Ahmed, avaient combattu le régime de Ben Bella-Boumediene.
«Peu après la libération, le coup de force constitutionnel de 1963 a porté un véritable coup d’arrêt à l’élan révolutionnaire avant que le pays ne soit brutalement placé, à la faveur du coup d’Etat de juin 1965, sous un nouveau joug, celui de l’autoritarisme», rappelle-t-il, précisant que c’était «pour s’opposer à cette violence politique ainsi qu’à la dépossession du peuple de son droit imprescriptible à l’autodétermination individuelle et collective que Hocine Aït Ahmed et ses compagnons ont proposé une initiative politique majeure en créant le Front des forces socialistes dès septembre 1963».
«Confondant Etat et régime, les différents clans qui se sont alternés aux commandes du pays, parfois au prix de règlements de compte meurtriers, ont tout mis en œuvre pour mettre en échec toute démarche politique qui aurait permis au pays de s’engager sur la voie de la construction de véritables institutions démocratiques», assure Aouchiche qui considère que les vingt dernières années ont été les pires en ce qui concerne la corruption et la dilapidation des richesses du pays. «En généralisant la corruption pour en faire l’un de ses principaux instruments de domination, le régime sous l’ère Bouteflika a transformé l’Algérie révolutionnaire en une immense jungle à ciel ouvert, où tout s’achète et se vend, y compris la dignité», ajoute-t-il tout en affirmant que «64 ans après la tenue du Congrès de la Soummam, la question cruciale de restituer l’Etat à la nation se trouve au centre des préoccupations nationales et nous projette dans une exigence à la fois politique et historique : celle d’un changement radical du système et du passage pacifiquement d’un système autoritaire fermé à un système démocratique ouvert en mesure de garantir l’autodétermination individuelle de chaque Algérienne et Algérien et l’autodétermination collective de notre peuple».
Le premier secrétaire du plus vieux parti de l’opposition appelle le pouvoir en place à prendre la mesure «des graves périls qui guettent la nation en cessant les ruses et les louvoiements». «Vouloir à tout prix maintenir un système moribond, c’est parier sur le pire», estime-t-il. Pour lui, «s’obstiner à vouloir imposer unilatéralement et au pas de charge une nouvelle Constitution et un agenda politique dans un climat extrêmement délétère, c’est prendre le risque non seulement d’échouer mais, plus grave, d’alimenter toutes les stratégies de déstabilisation du pays et faire paradoxalement le jeu des complots qu’il dénonce par ailleurs».
Pour le FFS, seul un processus constituant pourra garantir une stabilité politique, prélude d’un retour à la légitimité populaire. «L’Assemblée nationale constituante constitue une échéance incontournable pour sortir du provisoire et des incohérences politiques et juridiques et rendre irréversible la démocratie», précise Aouchiche, soulignant que la «nouvelle Algérie ne se construira pas sans le peuple, encore moins contre lui». Il conclut en dénonçant les multiples atteintes aux libertés.
M. S.
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