Progrès insupportable
Par Nouredine Benferhat – La modification des modes de vie qu’a entraînée l’urbanisation, l’accès aux médias étrangers, le développement d’Internet et l’accès aux réseaux sociaux proposent d’autres modèles culturels. La proximité des biens de consommation mais non leur accès est source de frustration.
Par ailleurs, les conditions de vie qui nous sont imposées – surpeuplement, chômage, problèmes de logement, d’eau, de transport, rapport avec l’administration, dégradation des missions de l’Etat, particulièrement en matière de santé publique et du rôle dévoyé de la justice – rendent insupportable le progrès qui nous environne dans le monde et semblent constituer une barrière infranchissable et sont certainement la cause de la harga (émigration clandestine).
On ne peut faire vivre les gens dans les conditions où ils vivent et espérer que l’Algérie atteigne un jour la modernité. Enfin, un certain nombre de pesanteurs sociales, croyances religieuses décalées et superstitieuses, inégalités entre les femmes et les hommes, xénophobie latente freinent la marche vers la modernité.
«Il n’y a pas de modernité, dit l’ethnologue et sociologue Georges Balandier, sans une progression des techniques, ni sans progression du savoir positif.» Le progrès des connaissances et des techniques, l’environnement scientifique mondial dans lequel nous évoluons nous font prendre conscience de la dimension de notre retard, tant en ce qui concerne les domaines purement scientifiques et techniques que sociaux.
De même, en effet, que le retard est créateur de retard, les méthodes d’apprentissage modernes sont elles-mêmes créatrices de modernité, dans la mesure où elles font progresser les connaissances et évoluer les mentalités, parce qu’elles introduisent dans l’apprentissage des matières qui ouvrent vers l’art et le civisme. Il faut apprendre à apprendre et, comme dit un pédagogue, «il faut enseigner pour apprendre et apprendre à enseigner».
Mais aussi lutter contre les affirmations théologiques fondamentalistes qui sont, comme le dit Balandier, «à porte-à-faux avec la modernité, parce qu’elles introduisent nécessairement une négation de l’histoire».
Cela suppose une rupture avec les pratiques autoritaires et les réflexes archaïques et une politique volontariste par la mise en place d’outils favorisant l’accès à l’information scientifique et technique, ainsi que vers les activités artistiques.
Cela consisterait à créer des musées d’histoire naturelle, de la découverte scientifique et technique, d’anthropologie, etc., installer des conservatoires et des salles de théâtre à travers tout le territoire.
Enfin, développer le tourisme en mettant les moyens pour rendre notre pays attractif en y facilitant l’accès, mais aussi en mettant les infrastructures hôtelières et de transport au niveau des standards internationaux. Le tourisme est non seulement un facteur d’ouverture pour la société, mais également une source non négligeable de revenus et d’emplois.
Le retard que connaît notre société n’est pas inéluctable. Les moyens existent. Ils attendent une politique audacieuse qui veuille bien les mettre en œuvre.
N. B.
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