Islamisme-système politique : le virus solidaire
Par Saadeddine Koudri – On peut penser que le Covid-19 a plutôt sauvé le système politique. En général, la majorité des médias dits d’opposition ne se braquent sur le pouvoir et l’Armée que pour éviter de critiquer l’ennemi mortel de la République. Dans mon pays où le général algérien dit fièrement au général américain venue lui rendre visite hier : «L’Algérie a pu vaincre le terrorisme seule, sans aucune aide étrangère quelle qu’elle soit, et ce grâce à la détermination, l’abnégation de ses forces armées et l’étroite coopération entre les différents services de sécurité ainsi que les grandes convictions de son peuple.» La victoire dont parle le général remonte à la fin du siècle passé et en son temps, le chef d’état-major d’alors, Mohamed Lamari, avait précisé que la victoire sur l’intégrisme reste à faire. Cette idée n’était conforme ni à celle de son nouveau président Bouteflika ni à celle du responsable des services.
Le démocrate algérien est dans l’obligation de dénoncer l’antidémocratie du pouvoir et de condamner la violence et l’obscurantisme des islamistes. Le mouvement citoyen algérien du 22 Février allait vers la «double rupture», avec l’antidémocratie et l’islamisme. Dans les premières marches du Hirak du vendredi, les islamistes étaient peu nombreux et, au fil du temps, ils prenaient de l’ampleur avec la connivence du pouvoir. Cette connivence devenait flagrante, jusqu’à faire voir des dirigeants de l’ex-FIS, les assassins, sortir de leur clandestinité. Le débat sur l’islamisme entre démocrates n’a jamais été entamé, ni au sein des partis politiques et encore moins en public. Il s’invita lors des dernières semaines et, si le mouvement avait continué, les assassins du peuple des années 1990 auraient été démasqués plus que jamais. Les dirigeants, de Rachad, une organisation islamiste, installée à l’étranger et proche du FIS, a cru opportun de s’immiscer à travers les plateaux de TV et du Web dans le Hirak. Mal lui en pris.
Pendant 20 ans, Bouteflika pratiquait, avec les islamistes et pas uniquement, grâce à la rente, la réconciliation alliée à la corruption jusqu’à se permettre d’élever un des chefs terroristes au rang de personnalité nationale pour dire à l’armée et aux patriotes que leur victoire sur le terrorisme n’est qu’éphémère.
Effectivement, la victoire sur le terrorisme sans la victoire sur l’islamisme invite le pays à un éternel recommencement. Ceux et celles qui disaient que l’acte politique des démocrates était à la fois celui de dénoncer l’acte antidémocratique et condamner l’islamisme ne pouvaient le dire que dans leur bunker du Télemly. Aujourd’hui, grâce au Hirak, il est débattu en public, y compris à Paris. Le Covid-19 a donc sauvé le système ou du moins sa frange réactionnaire dont les médias évitent d’en parler pour plaire aux patrons, aux bourgeois.
Hubert Reeves affirme que «l’homme est fou, il adore un Dieu invisible et détruit une nature visible, inconscient que la nature qu’il détruit est le Dieu qu’il vénère».
Qualifier l’homme de fou, adorer un Dieu ou vénérer la nature revient au même. C’est le langage codé de la bourgeoisie. Dieu est une puissance virtuelle transformée par les puissants en une arme pour la soumission des peuples. L’Homme, qui fait partie de la nature, est passé de l’état sauvage à l’état civilisé grâce aux instincts sociaux et particulièrement à l’instinct maternel comme nous l’enseigne Darwin dans son livre La Filiation de l’homme. L’homme n’a pas à adorer, ni à vénérer mais juste respecter. Se respecter, c’est respecter la vie, toute vie, celle de l’homme, de l’animal, de l’arbre, de la plante. Celui qui ne respecte pas la vie n’est pas encore civilisé. Il reste étranger à la liberté, étranger à la démocratie et doit être éduqué. C’est le cas de l’écrasante majorité des dirigeants politiques actuels dans le monde et de leurs intellectuels, qui ne sont en fait que des sbires.
De «grands» philosophes, professeurs, journalistes sont des victimes du système capitaliste comme les millions de pauvres de la planète. Si ces derniers le savent de plus en plus, les intellectuels du système semblent l’ignorer puisqu’ils continuent à nous parler de la morale des ancêtres. Une morale qui n’a pas évolué depuis l’antiquité et qui est de plus en plus favorable à l’obscurantisme.
S. K.
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