Le limogeage du directeur de l’Anep était dans l’air depuis plusieurs jours
Nous avons appris de sources informées que le limogeage du directeur général de l’Agence nationale d’édition et de publicité (Anep) était prévisible. Nous sources expliquent qu’une ambiance délétère régnait au sein de l’entreprise ces derniers jours, sans donner plus de détails. Si l’éviction de Larbi Ounoughi n’a été annoncée que ce dimanche, la décision de son départ a été prise il y a plusieurs jours, indique-t-on.
Aucune raison de ce limogeage n’a été donnée par le ministère de la Communication. Mais on nous signale déjà une effervescence dans le milieu de la presse écrite dont la survie est tributaire de la publicité institutionnelle distribuée par cette entreprise en apparence commerciale, mais en réalité politique, les annonces institutionnelles et la rente qu’elle génère servant de soutien direct aux journaux qui montrent patte blanche et s’interdisent toute critique envers le pouvoir en place.
Larbi Ounoughi avait défrayé la chronique en révélant les chiffres des énormes bénéfices engrangés par un certain nombre de patrons de presse, lesquels s’élèvent à plusieurs dizaines de milliards de centimes. Il a également pointé une mafia étrangère à la corporation qui a profité de la manne publicitaire publique bien qu’elle n’ouvre pas droit à la publication de journaux. Il a notamment cité les fils de l’ancien vice-ministre de la Défense nationale, le général Gaïd-Salah, dont le journal insignifiant paraissant à Annaba a amassé d’énormes sommes d’argent durant de longues années, ses propriétaires privilégiés se rendant ainsi coupables de trafic d’influence et de détournement déguisé de fonds publics.
L’instabilité qui affecte l’Anep est symptomatique des enjeux que cache cette «machine à sous» dont le rôle a été des plus néfastes pour le journalisme en Algérie. Déviée de sa mission principale, celle de gérer le portefeuille des annonces institutionnelles, notamment des ministères et des collectivités locales, cette agence est devenue, au fil des années, une source de revenus illicites pour des apparatchiks du système qui se sont servi à n’en plus pouvoir dans ses caisses aujourd’hui vides.
Malgré la crise économique qui a gelé les nombreux projets initiés du temps où les prix des hydrocarbures atteignaient des sommets, l’Anep a continué, jusqu’à il y a quelques semaines, à honorer ses «dettes» auprès d’organes de presse dont il est évident que la majorité d’entre eux mettront la clé sous le paillasson les uns après les autres. Les 180 journaux dont parle le président Tebboune dans chacune de ses déclarations ne sont, en fait, que des titres en quasi-faillite qui ne subsistent que grâce à un argent public de moins en moins abondant.
Malgré ses promesses de «réforme profonde» de l’Anep, son directeur général aura eu à peine le temps de révéler au grand jour les dérives d’un corps agonisant et infesté par les parasites. Quelle mission a été confiée à son successeur ? Se taire sur les détournements des fils de Gaïd-Salah ou faire avancer le dossier plus rapidement que son prédécesseur ?
A. S.
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