Quand le général De Gaulle voulait faire de l’Algérie un «Israël français»
Par Khaled Boulaziz et Kaerdin Zerrouati – «Seuls ceux qui ont la mémoire longue sont capables de penser l’avenir.» (Friedrich Nietzsche, philosophe allemand, 1844-1900). Le 1er Novembre nous donne la possibilité, chaque fois, de revenir sur l’histoire de notre pays qui n’a pas révélé tous ses secrets. Nous détaillerons séparément six faits historiques que nous considérons comme cardinaux. Ils donnent l’impression d’être déconnectés, mais leur essence constitue un continuum infinimum qui préside jusqu’à aujourd’hui.
Les dettes françaises pour le blé algérien (1)
Peu avant et ensuite sous Napoléon 1er, la France contracta l’achat de blé algérien pour son armée auprès de deux marchands juifs d’Alger, MM. Bacri et Bouchnak, et était en retard pour les payer. Ces marchands avaient eux-mêmes des dettes envers le dey et prétendaient être incapables de les honorer jusqu’à ce que la France payât les siennes.
Après une réunion contentieuse le 29 avril 1827, le dey frappa le consul français Duval avec un éventail. Le 5 juillet 1830, la France envahit l’Algérie.
Le décret Crémieux de 1870 (2)
Le 24 octobre 1870, le décret Crémieux accorda la nationalité française aux 37 000 juifs d’Algérie. Sa paternité en revient au ministre français de la Justice de l’époque, Isaac Crémieux, lui-même de confession juive. La raison principale de cette promulgation était l’élévation des juifs d’Algérie à la citoyenneté française pour qu’ils prissent main forte à la colonisation du pays.
Appel du FLN à la communauté Israélite d’Algérie
Le 1er octobre 1956, le FLN lança un appel à la communauté israélite d’Algérie en lui demandant d’affirmer solennellement son appartenance à la nation algérienne et d’être du côté du combat libérateur afin de dissiper tous les malentendus. L’appel resta sans écho.
Protocole de Sèvres (3)
Le protocole de Sèvres était un accord entre les gouvernements d’Israël, de la France et du Royaume-Uni, conclu entre le 22 et 24 octobre 1956 à Sèvres, en France. Il détaille leur alliance pour renverser Nasser en envahissant l’Egypte.
Israël s’y engagea aussi à fournir du renseignement sur les dirigeants du FLN à la France. En contrepartie, celle-ci promit d’armer l’Etat hébreu et une coopération totale dans le domaine nucléaire.
Pour rappel, le détournement de l’avion des dirigeants FLN a eu lieu le 22 octobre 1956.
Les essais nucléaires Français dans le Grand Sud Algérien (4)
Suite au protocole de Sèvres, le 27 mai 1957, Moshe Dayan et Shimon Peres, respectivement chef d’état-major des armées et directeur général au ministère des Affaires étrangères d’Israël visitèrent Béchar, dans le sud-ouest algérien, pour sceller l’alliance franco-israélienne.
Le 13 février 1960, à 7h04, dans la région de Reggane et durant la Guerre d’Algérie, la bombe atomique franco-israélienne fut explosée.
Le partage de l’Algérie (5)
A l’approche de l’indépendance et dans la rancœur et la colère contre la France, les juifs d’Algérie iront grossir les rangs de l’OAS.
Les responsables politiques français, souhaitant éviter des drames aux Européens d’Algérie une fois l’indépendance algérienne acquise, avancèrent l’option de la partition du pays que De Gaulle lui-même qualifia d’«Israël français».
Alain Peyrefitte, secrétaire d’Etat à l’Information et sous les conseils de David Ben Gourion, alors président d’Israël, rédigea en 1961 son fameux rapport intitulé «Faut-il partager l’Algérie ?».
Conclusion
Sans pour autant occulter les difficultés actuelles du pays, il ne faudrait pas oublier que ces mêmes difficultés ont une histoire aux acteurs multiples, sur plusieurs paliers et avec des manipulations à plusieurs niveaux.
Pour le peuple algérien, surtout pour sa jeunesse, revoir le passé donne la possibilité d’«apprendre de l’histoire» afin de mieux nous comprendre dans le présent, en comprenant les forces, les choix et les circonstances qui nous ont amenés à notre situation actuelle.
Ce qui importe, c’est de mettre à jour le fil conducteur qui est derrière l’histoire, la cause de ses effets : la force qui ramène la multiplicité apparente que nous constatons à une unité fondamentale imperceptible au regard commun, invisible à l’œil intelligent, inaccessible à la pensée qui ne sait pas penser.
C’est la grande tâche qui est dévolue à la jeunesse algérienne dans l’acte et la pensée.
K. B./K. Z.
(1) http://dspace.univ-eloued.dz/xmlui/handle/123456789/1987
(2) https://www.jeuneafrique.com/79685/archives-thematique/promulgation-du-d-cret-cr-mieux/
(3) https://www.duo.uio.no/bitstream/handle/10852/51583/Masteroppgave-DUO-Les-accords-de-S-vres-de-1956.pdf?sequence=1&isAllowed=y
(4) https://www.geo.fr/histoire/france-israel-l-accord-secret-189322
(5) https://excerpts.numilog.com/books/9782259275163.pdf
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