Jeune Afrique se défoule sur l’Algérie : Soudan et Ben Yahmed font allégeance
Par Nabil D. – Le magazine Jeune Afrique tombe le masque et se positionne ouvertement dans le conflit armé qui oppose la République sahraouie au régime monarchique de Rabat. Après avoir gardé une certaine neutralité, l’hebdomadaire fondé par le Tunisien Béchir Ben Yahmed s’est fendu d’un éditorial signé par son directeur de la rédaction.
Le titre est éloquent et plante le décor dès l’abord «Sahara : l’Algérie doit sortir du déni». Pas besoin donc d’aller plus loin pour saisir la direction du vent. «Accuser le Maroc d’avoir rompu le cessez-le-feu, alors que ce dernier était de facto violé par les indépendantistes sahraouis depuis leur implantation illégale à Guergarate, revient à confondre le pompier avec le pyromane», écrit François Soudan. Il renchérit : «C’est un conflit d’un autre âge, sorti du congélateur de la guerre froide et issu des séquelles de la décolonisation, dont les braises viennent de se rallumer à l’extrême ouest de l’espace saharien.»
Il surenchérit, sarcastique et dédaigneux : «Comme sur une scène du théâtre aux armées, Brahim Ghali, 74 ans, président de la République et commandant suprême des forces armées (passage mis entre guillemets, ndlr) du Front Polisario est venu le 13 novembre, martial et les moustaches frémissantes, déclarer l’état de guerre et la reprise des hostilités à la suite du déblocage par l’armée marocaine du verrou de Guergarate.»
Jeune Afrique n’en est pas à son premier coup. En septembre dernier, dans le sillage de la vague de normalisation avec Israël, le média pro-marocain rebondissait sur la déclaration d’Abdelmadjid Tebboune qui affirmait que l’Algérie ne ferait jamais partie des pays arabes qui pactiseraient avec Israël, pour insinuer que la poignée de main furtive entre l’ancien président Abdelaziz Bouteflika et Ehud Barak à l’occasion des funérailles de Hassan II signifiait une sorte d’appel du pied à l’endroit de Tel-Aviv. Le magazine avait écrit : «Alors que les débats de la normalisation des relations avec Israël agitent le monde arabe, Abdelaziz Bouteflika avait initié un début de rapprochement avec l’ennemi juré dès son arrivée au pouvoir.»
Cet épisode vite enterré a été ressorti par le très subtile Jeune Afrique du fond du tiroir vingt ans plus tard pour faire accroire à la possibilité que l’Algérie puisse nouer des liens avec l’Etat hébreu, en tentant de démonter les propos fermes du Président algérien qui a clairement indiqué que l’Algérie ne dévierait jamais de sa politique proche-orientale fondée sur le soutien indéfectible à la cause palestinienne, au même titre, d’ailleurs, que le positionnement du pays aux côtés du peuple sahraoui dans sa lutte pour son indépendance.
Jeune Afrique, qui relevait dans une de ses éditions qu’«après les Emirats, d’autres pays arabes sont tentés d’amorcer un rapprochement diplomatique avec Israël», faisait remarquer que ce que le magazine édité à Paris qualifie d’«évolution», «se heurte au tabou de la question palestinienne». La noble cause palestinienne étant ainsi reléguée à l’échelon péjoratif de «tabou».
N. D.
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