Ne pas confondre partenariat public-privé avec privatisation et éviter les utopies du passé
Contribution d’Abderrahmane Mebtoul – La privatisation totale ou partielle est une cession d’actifs d’entreprises publiques en faveur du secteur privé, qu’il soit national ou étranger alors que dans le partenariat public-privé (PPP), l’Etat reste le maître d’œuvre.
Nous avons dans la terminologie anglo-saxonne trois types de partenariats : les partenariats institutionnels (création de sociétés à capitaux publics et privés telles que les sociétés d’économie mixte ou joint-ventures), les partenariats dans lesquels les entreprises privées conseillent les personnes publiques pour la valorisation de leurs biens et les contrats de Private Finance Initiative (PFI) qui sont la forme la plus répandue. Il s’agit de la différencier des délégations de service public qui sont des contrats par lesquels une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service.
Le cocontractant perçoit une rémunération mixte constituée d’une redevance fixe et d’un intéressement qui est fonction de l’amélioration de la qualité du service, du niveau des économies réalisées et du résultat financier de l’exploitation. Précisément, le contrat de partenariat est un contrat à long terme (de 10 à 35 ans ou plus) par lequel une personne publique attribue à une entreprise une mission globale de conception, réalisation, financement ainsi que d’entretien, maintenance et/ou d’exploitation de l’ouvrage. Le cocontractant est rémunéré par un paiement de la personne publique pendant toute la durée du contrat, pouvant être liée à des objectifs de performance et intégrant l’amortissement des investissements initiaux.
Le contrat de partenariat diffère de la concession dans la mesure où le cocontractant est uniquement chargé de l’exploitation et non de la gestion des ouvrages étant fondé sur une répartition optimale des risques : le risque de trafic incombe à la personne publique, le cocontractant prenant en charge le risque de construction et de performance. Comme il ne faudrait pas assimiler les PPP à la privatisation. Une privatisation est la vente ou cession par l’Etat au secteur privé d’une partie ou de la totalité d’une entreprise publique. Dans le cadre d’un PPP, l’Etat verse une somme au secteur privé en contrepartie de l’offre de service et de la prise en charge éventuelle de la construction et de la gestion des infrastructures. La privatisation suppose que le secteur privé soit le seul responsable d’assurer les services, alors qu’avec un PPP l’Etat conserve son rôle de responsable envers les citoyens et reste présent dans le projet étant donné qu’il fait partie du contrat.
En théorie, les principaux avantages découlant de l’utilisation des PPP résident dans l’optimisation du rapport coûts/résultats, la répartition des risques entre l’autorité publique et l’opérateur privé, la conservation par l’entité publique du contrôle stratégique du service et, enfin, le gain à traiter avec un secteur privé expérimenté. L’intérêt pour un Etat ou une collectivité locale est de développer une infrastructure économique pour assurer le développement d’un pays, tout en réduisant son emprunt et les risques associés. Cependant, ce recours croissant à l’usage des PPP ne se fait pas sans obstacles du fait que ce mode de financement et de gestion est relativement nouveau au niveau, notamment, de la zone méditerranéenne.
En effet, les cadres financiers et juridiques des PPP sont différents d’un pays à l’autre et les projets susceptibles de faire l’objet de PPP ne sont pas clairement identifiés et le secteur privé local ne semble pas outillé pour accompagner des projets d’envergure. Aussi le développement de tels mécanismes pourrait-il être favorisé à travers notamment l’élaboration et l’adoption d’un cadre régional harmonisé de PPP qui reste encore à définir. D’une manière générale, les PPP présentent un certain nombre d’avantages qui peuvent leur permettre d’optimiser le rapport coûts/résultats de l’intervention du secteur public dans le cadre des projets d’infrastructure, facilitent et encouragent la mise en œuvre des projets dans les délais et dans les limites du budget.
Mais afin d’éviter les dépassements, de s’assurer que le partenaire privé livre et exploite les actifs du projet dans les délais, cela suppose la maîtrise des coûts et une meilleure gouvernance. Cette réduction du coût des risques constitue le principal moyen d’optimiser le rapport coûts/résultats du secteur public et, dans le cadre de PPP réussis, elle compense généralement toute augmentation de coûts résultant d’un financement par emprunts privés et non par emprunts publics.
En d’autres termes, le secteur public doit être en mesure de s’assurer que le prix qu’il paie au partenaire privé au titre des investissements et des risques liés au projet correspond à un bon usage de l’argent des contribuables, ce qui n’est pas le cas souvent en Algérie où les surcoûts, surtout dans les infrastructures pouvant varier entre 10 à 30% par rapport aux standards internationaux, sont voilés par des transferts via la rente des hydrocarbures.
Ainsi, les PPP ne sont pas la panacée car la préparation des projets de type PPP prenant généralement plus de temps que des passations de marchés classique en raison de leur complexité, il est important de bien choisir les projets qui peuvent être effectués sous forme de PPP et de bénéficier de conditions favorables qui incluent des acteurs publics et privés compétents et solvables et un cadre macroéconomique et réglementaire stable.
Des dispositions légales et réglementaires doivent être prises ou adaptées pour permettre un développement harmonieux de ces opérations, dans le respect des spécificités des opérations de partenariat public/privé, notamment dans la loi sur les marchés publics. Cette reconnaissance n’a pas pour effet de sortir les opérations de partenariat de la réglementation sur les marchés publics, ni de créer une nouvelle catégorie de commandes publiques.
L’objectif est uniquement de réserver aux PPP un traitement juridique différencié des autres marchés publics en raison des particularités de ce type d’opérations. Des actions doivent être menées pour assurer la reconnaissance légale des PPP dont l’insertion d’un titre spécifique dans la loi relative aux marchés publics. Ce nouveau titre regroupera toutes les dispositions applicables aux marchés publics qui sont passés sous la forme d’un partenariat public/privé, dont notamment l’exigence pour le pouvoir adjudicateur concerné de mener une évaluation préalable complète et positive de son projet de PPP avant le lancement de la procédure, les règles spécifiques en matière de délai d’engagement et la rédaction de clauses spécifiques du cahier général des charges.
Le cadre juridique des PPP doit être complété par l’adoption d’un cahier général des charges qui traitera des dispositions spécifiques applicables à ce type de marché. Ces dispositions spécifiques porteront notamment sur les mécanismes de suivi et de contrôle de l’opération, le rôle du fonctionnaire dirigeant, sur les clauses de paiement, sur les situations de force majeure, sur les pénalités, sur les cas de dissolution du contrat, sur les conséquences d’éventuels changements législatifs devant miser sur la stabilité du contrat et éviter toute rétroactivité contraire au droit international.
Mais, en dernier ressort, le succès des PPP doit reposer sur l’organisation de la transparence du dialogue. Il est essentiel d’organiser le dialogue dans des conditions de transparence et de respect de l’égalité de traitement entre les entreprises participantes et ce par une information préalable et la plus complète possible des entreprises participantes sur la manière dont le dialogue sera structuré : l’objet et la portée précis du dialogue, la durée de la procédure, le nombre de réunions, leur caractère éliminatoire ou non, l’acceptation de variantes, une information intermédiaire, après chaque réunion, comportant une synthèse des principaux points traités de manière à s’assurer de la bonne compréhension des parties lors des réunions de travail et, enfin, la rédaction d’un procès-verbal après chacune des étapes.
En résumé, pour le cas de l’Algérie, le succès du PPP passe par la fin des injonctions bureaucratiques des pouvoirs publics, la révision du code des marchés publics, la dépénalisation de l’acte de gestion et une vision stratégique tenant compte tant du développement interne que des nouvelles mutations mondiales. Or, nous avons un tissu productif interne privé en ce mois de janvier 2021, peu performant où, selon l’ONS, plus de 80% du tissu économique sont constitués d’unités personnelles ou de petites SARL peu innovantes, ne pouvant créer en 2021, comme annoncé par un responsable du Premier ministère, entre 1 et 2 millions d’entreprises par décret, un projet PMI/PME pour sa maturation et sa rentabilité répondant aux normes coûts/qualité, dans le cadre concurrentiel où le dénominateur est le marché, nécessitant au minimum deux/trois années, les grands projets 5/7 ans et avec quel financement, prévision utopique qui ne sera jamais réalisée reposant sur une vision rentière du passé.
Comme ces déclarations, démontrant une communication institutionnelle non adaptée des années 1970-1980 avec l’effritement du système d’information, accentuant le divorce Etat-citoyens, du mythe de la privatisation partielle des banques déstructurées et d’entreprises publiques structurellement déficitaires avec une Bourse en léthargie ou cette dévaluation du dinar, de l’intégration de la sphère informelle au moyen de mesures bureaucratiques ou de la maîtrise de l’inflation par des mesures autoritaires, oubliant que dans la pratique des affaires n’existent pas de sentiments, comme mythe de dynamisation des exportations hors hydrocarbures alors que le blocage est d’ordre systémique, une cotation de 5 DA/1 dollar en 1970 et 132/1 dollar en janvier 2011 et toujours 98% de recettes en devises provenant des hydrocarbures ou encore vouloir attirer les IDE, surtout en cette période de crise mondiale, sans lever les contraintes d’un environnement des affaires pour le moins délétère qui prévaut en Algérie et une gouvernance tant centrale que locale à revoir en profondeur, naviguant actuellement à vue.
Evitons d’induire en erreur les plus hautes autorités du pays par un langage de vérité, rien que la vérité, comme ces effets d’annonce dévastateurs qui nuisent au pays existant, un lien dialectique entre sécurité et développement.
A. M.
Expert international
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