Stora accuse Macron d’avoir anéanti son rapport dans le cadre d’un jeu politique
Par Abdelkader S. – Benjamin Stora a dénoncé «un jeu politique» qui a faussé son rapport avant même sa remise au président français, Emmanuel Macron. «Franchement, je ne suis pas dans le secret des dieux, dans les luttes de pouvoir intérieures, dans la façon de penser différemment, dans le fait de se préserver à gauche et à droite en fonction des propositions, c’est un jeu politique», a affirmé l’historien sur TV5 Monde. «Moi, ce que j’ai – encore une fois – essayé de faire, c’est de trouver des passerelles et des cheminements pratiques qui permettraient d’avancer réellement», a-t-il expliqué.
L’auteur des vingt-cinq propositions qui ont reçu un accueil défavorable dans les médias algériens relève que «la presse algérienne n’a retenu [dans mon rapport] qu’une seule chose que je n’ai pas écrite, [à savoir] pas d’excuses, pas de repentance». Ce à quoi le chroniqueur de la chaîne de télévision publique française réplique, en soulignant que «l’Elysée ne vous a absolument pas aidé lors de la parution de ce rapport». «Je dirais même que la manière dont l’Elysée a communiqué vous a totalement desservi en réalité», a appuyé le journaliste, en insistant sur le fait que «les premières informations qui filtrent de l’Elysée, qui sont des éléments de langage distribués en briefing off à des journalistes, c’est effectivement pas de repentance et pas d’excuses». «La dépêche de l’AFP, en milieu de journée, le 20 janvier, titre sur ça et le coup est parti», poursuit le journaliste, avant de conclure que «c’est sous cette forme que l’information arrive en Algérie, les gens ne retiennent que ça et le débat et la controverse se focalisent autour de la repentance».
Benjamin Stora abonde en rappelant que la dépêche en question a été diffusée à midi et que, lui, a été reçu par Macron à 17 heures. L’animatrice l’interroge : «Qu’est-ce qu’il faut comprendre de cette communication de l’organe qui vous a quand même commandé ce rapport ?» «Du côté algérien, les réactions sont assez compliquées, parce qu’il y a effectivement cette polarisation extrême sur une seule proposition qui n’est pas la mienne», a-t-il répondu, avec un sourire ironique. «Mais cela renvoie aussi à une question très importante, une deuxième question algérienne et, dans le fond, la réponse algérienne par rapport à ce rapport en termes de thématiques algériennes sur la guerre d’indépendance», a encore déclaré l’historien, avant de s’interroger à son tour : «Quelles sont ces thématiques et quelles sont les historiens algériens qui peuvent, disons, avancer avec la France, non pas pour la rédaction d’une histoire commune, mais la rédaction d’une histoire algérienne qui soit écrite parallèlement à une histoire française ?»
«Le rapport renvoie aussi, en Algérie, dans l’opinion publique, dans la presse, à une grande interrogation relative au fait que les Algériens ne peuvent pas attendre que les Français écrivent leur histoire pour écrire la leur propre», a assuré Benjamin Stora, en estimant que «c’est cela aussi la réaction algérienne, ce n’est pas seulement la réaction du refus du rapport par rapport à la question des excuses».
A. S.
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