431 météorites appartenant à l’Algérie sont conservées au Muséum de Paris
Par Ali-Farid Belkadi – Aucun chauvinisme rétrospectif n’anime mes formulations, rédigées selon les normes journalistiques, issues d’une volonté saine et du désir de faire connaître aux Algériens l’histoire ancienne de notre pays. Pour sauver de l’oubli les monuments et les documents qui sont encore, 59 ans après l’indépendance, aux mains de l’ancien colonisateur. Sans lesquels l’histoire de l’Algérie ne peut pas être reconstituée. Les écrits pernicieux, voire malsains des auteurs de la colonisation ne doivent plus être en mesure de nous berner.
«Honte à qui me trompe une fois, honte à moi s’il me trompe deux fois» (dicton)
Le Muséum de Paris (MNHN), ce n’est pas seulement 24 crânes rapatriés en juillet dernier, à l’occasion de la fête de l’Indépendance. Des dizaines de têtes de résistants décapités durant l’époque coloniale se trouvent toujours au MNHN de Paris, où ils sont considérés comme des objets appartenant au patrimoine français.
Ces crânes issus de la bataille de Zaâtcha (Biskra), de celles de Koudiat Ati, lors de la prise de Constantine par les colonnes de l’armée d’occupation, ainsi que d’autres régions de l’Algérie, dont Oran et Khenchela, font l’objet d’interminables tractations diplomatiques. La partie française du comité mixte d’experts du MNHN de Paris s’est montrée particulièrement exigeante concernant l’identification de chaque individu. C’est tout juste si les Français n’ont pas exigé les empreintes digitales de chaque algérien supplicié.
Une affaire à suivre
Ce n’est pas seulement une seule affaire à suivre car d’autres domaines scientifiques dont s’occupe le MNHN de Paris réservent aux Algériens bien des surprises. La discipline scientifique qui étudie les planètes et, plus généralement, l’ensemble des objets du système solaire en fait partie.
Un inventaire succinct des biens algériens détenus en France, indépendamment des crânes des résistants qui appartient au domaine de l’anthropologie, s’élève à 431 dans la série «Météorites».
Outre les météorites, plusieurs milliers de documents – c’est ainsi que sont nommés ces larcins appartenant à l’Algérie sont conservés dans la catégorie «Paléontologie», une matière scientifique qui étudie les restes fossiles des êtres vivants disparus.
De même que le domaine de la préhistoire, qui se divise en deux grandes parties, le Paléolithique, âge de la pierre taillée, et le Néolithique, âge de la pierre polie, eux-mêmes subdivisés en d’autres choses.
Des centaines de spécimens appartenant à l’Algérie sont conservés dans la série «Ethnologie», un domaine en liaison avec les sciences humaines et sociales.
A ces différents patrimoines scientifiques s’ajoute la série «Entomologie», une branche de la zoologie dont l’objet est l’étude des insectes et d’autres bestioles.
La numérisation des spécimens-échantillons de chacune des catégories est incomplète, ce qui suppose que les biens soustraits à l’Algérie sont plus nombreux et négligés dans les réserves du Muséum de Paris.
L’Algérie, c’est 1 000 cavernes d’Ali Baba. Les Français sont venus pour tout prendre, tout enlever, depuis les terres confisquées aux paisibles paysans désarmés, jusqu’à l’honneur des familles. Au moment de quitter l’Algérie, des fanatiques pieds-noirs ont même incendié des milliers de livres rares et des manuscrits d’une valeur inestimable appartenant à la bibliothèque de l’Université d’Alger.
La météorite de Tamentit à Adrar
Au XIe siècle, dans son traité d’alchimie et de minéralogie, connu sous le titre latin De congelatione et conglutinatione lapidum, Avicenne mentionne la chute dans la province de Djordjan en Perse, d’une météorite, sous la forme de fers et pierres tombés du ciel.
Bien avant lui, le poète Virgile, parlant de la guerre de Troie et de la fuite d’Anchise, écrit : «Le tonnerre retentit soudain à grand fracas ; une étoile glissa du ciel, traversa les ténèbres, traînant un flambeau d’une grande clarté. Nous la voyons glisser par-dessus le toit, éclatante, puis disparaître, dans la forêt de l’Ida, traçant une route. Elle laisse derrière elle un long sillon de lumière et ses abords répandent au loin une fumée de soufre (Enéide 2 : 693 et suivantes).
Bien avant encore, dans L’épopée de Gilgamesh, rédigée il y a 4 000 ans en Mésopotamie, le héros éponyme s’exprime ainsi : «Je marchais fier parmi les héros. Le ciel brillait d’étoiles et une étoile, comme un héros du ciel d’Anou, est tombée vers moi. J’ai voulu la porter, elle était trop lourde. J’ai voulu la pousser, je n’ai pu la bouger. Autour d’elle, les gens du pays s’assemblaient et lui baisaient les pieds.»
Cela nous amène à parler de la météorite métallique d’un peu plus de 500 kg, tombée à une dizaine de km de la localité de Tamentit, au sud d’Adrar. Elle gisait à demi-enfouie dans le sable, sur l’une des places publiques de l’oasis. La légende locale fait remonter la chute de cette météorite au XIVe siècle. Le bloc, dit cette tradition, était en or quand il s’abattit sur terre, mais les disputes intertribales locales pour accaparer le précieux trésor firent que Dieu décida de transformer le bloc en argent, puis définitivement en fer, pour effacer la cupidité qui s’était emparée de la population. Cette météorite, qui fut l’objet d’une vénération superstitieuse, attira des foules de femmes qui venaient s’asseoir sur la pierre en exprimant le vœu d’avoir un enfant. Les Français, qui découvrirent la météorite en 1864, la firent transporter au Muséum national d’Histoire naturelle de Paris en 1927 où elle se trouve jusqu’à nos jours sous la référence «MNHN-GT-1577, poids 500 000 grammes, météorite origine Tamentit, classification de météorite IIIAB, date de chute 1864. Origine Algérie».
Tiberrhamim, Akhricha, Bou Hadid, Ouallen et d’autres lieux
431 météorites appartenant à l’Algérie sont recensées dans la rubrique «Météorites» de la base de données du Muséum de Paris. Leur nombre doit être bien plus important car seuls figurent dans cet inventaire les spécimens informatisés et non l’intégralité des collections du Muséum de Paris. Ce musée conserve des biens patrimoniaux d’un grand nombre de branches scientifiques provenant de toutes les régions d’Algérie, dont l’ethnologie, la préhistoire, l’entomologie, l’anthropologie, la paléontologie, outre les météorites.
Concernant les météorites, elles ont été trouvées à Tiberrhamim, Akhricha, Bou Hadid, Ouallen, Tadjera, Selnourak, Zerhamra, Aumale (Sour El-Ghozlan), Hassi-Jekna, Ikraren, Bir Rebaa, Acfer ou encore dans le désert de Tanezrouft, etc.
Le spécimen Isoulane-n-Amahar, 27°7’45 » nord, 8°40’2″ est , trouvé le 19 mai 1945 – portant la référence MNHN GT-2269 – s’avère être un fragment d’astéroïde polyvalent. Son origine, après analyses, provient de la ceinture d’astéroïdes située entre Mars et Jupiter. Cette météorite a rejoint la Terre à la suite d’une violente collision.
Un corps extra-terrestre voyageant dans l’espace est nommé astéroïde. Lors de son entrée dans l’atmosphère terrestre, il est nommé météoroïde. Une fois qu’il a touché le sol terrestre, il devient une météorite.
D’autres météorites d’Isoulane-n-Amahar se trouvent au MNHN, où elles portent les références : Mnhn-Gt-Isoul000pe1, Mnhn-Gt-Isoul000pe2, Mnhn-Gt-Isoul000pe3, Mnhn-Gt-Isoul000pe4, Mnhn-Gt-Isoul000pe5, Mnhn-Gt-Isoul000pe6 et Mnhn-Gt-2268.
Adam et Eve ont chevauché un astéroïde
Selon les scientifiques, l’apparition de la vie humaine serait due à une pluie de météorites qui s’est abattue sur la Terre il y a 4 milliards d’années. Cette page de l’histoire de l’homme coïncide avec l’apparition des premières bactéries, micro-organismes vivants, sur Terre. L’explication donnée par les religions, les mythes et les croyances est différente. Les religions du monothéisme abrahamique relient Adam et Eve à l’apparition de la vie sur terre. Ce qu’affirme la science. Concernant la pierre sacrée de la Kaaba, celle-ci n’est pas l’objet d’un quelconque culte polythéiste, comme le prétendent les détracteurs de l’islam. Il s’agit de la gratitude rendue à Dieu pour avoir permis à l’Homme de vivre et d’exister sur Terre.
Certaines de ces météorites algériennes sont classées Norwest-Africa, comme celle qui porte la référence MNHN-GT-4012.
Le Maroc autorise l’exportation de météorites, alors que la plupart des pays dans le monde les considèrent comme un patrimoine d’Etat. En ce qui concerne l’Algérie, ces biens extraterrestres font partie de notre identité et de notre imaginaire national.
Moralité
Le concept de souveraineté nationale exige un surinvestissement moral et idéologique de l’Etat algérien dans ces affaires multidisciplinaires du MNHN.
Il s’agit de biens du peuple, de la nation algérienne qui saura en faire bon usage dans ses universités et parmi ses chercheurs. En attendant, nos biens enrichissent la culture française.
Il faudrait un bateau pour rapatrier les biens escamotés par la France à l’Algérie.
A.-F. B.
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