FIS, Sant’Egidio, Mehri, Haddam, Abassi, Kebir : les révélations d’Ahmed Merani
Par Mohamed K. – Ahmed Merani a fait un certain nombre de révélations dans un entretien qu’il a accordé à la chaîne de télévision privée Essalam. L’ex-membre fondateur du Front islamique du salut (FIS, dissous) a notamment affirmé que le défunt président Mohamed Boudiaf projetait de «mettre le Front de libération nationale au musée» et que l’ancien parti unique n’existerait plus s’il n’avait pas été lâchement assassiné par Boumaârafi.
«En réalité, le FLN ne représente rien», a asséné Ahmed Merani, en expliquant que le parti que dirige actuellement Abou El-Fadhel Baadji a toujours servi à remplir le Parlement aux fins de faire passer les décisions des pouvoirs exécutifs successifs. L’ex-ministre des Affaires religieuses dans le premier gouvernement d’Ahmed Ouyahia a estimé que la création du Rassemblement national démocratique (RND), en 1997, était un message clair du pouvoir à l’époque à l’endroit des responsables du FLN, une façon de leur dire qu’il pouvait réduire le parti à néant d’un claquement de doigts.
Interrogé sur la rencontre de Sant’Egidio, le membre fondateur du FIS, qui avait fini par s’en éloigner, a indiqué que le principal instigateur de cette réunion qui avait eu lieu à Rome, en janvier 1995, n’était autre qu’Abdelhamid Mehri dont il a assuré qu’il était loin d’avoir l’aura et les qualités vertueuses que certains lui prêtent faussement. «Si Mehri a fait preuve d’autant de zèle, ce n’était que pour venger son beau-frère, l’ex-président Chadli, dont il estimait qu’il avait été poussé à la démission», a soutenu Ahmed Merani qui suivait les événements de très près, au point d’avoir toujours essayé, a-t-il assuré, de conseiller les tenants de la décision, depuis Boudiaf jusqu’à Zeroual. «En vain», a-t-il déploré.
«La rencontre de Sant’Egidio, a-t-il fait remarquer, n’avait pas pour but d’ouvrir un dialogue avec le pouvoir, mais de faire pression sur le pouvoir en Algérie avec la bénédiction des services des renseignements français, américains et italiens». Ahmed Merani en veut pour preuve le fait que l’apologue du terrorisme islamiste Anouar Haddam s’est déplacé de Washington jusqu’à Rome dans un avion spécial mis à sa disposition par la CIA, alors que son acolyte établi en Allemagne, Rabah Kebir, n’avait pu faire le déplacement en Italie car les autorités allemandes l’avaient mis en demeure de respecter les règles qui régissent le statut de réfugié politique. «S’il avait quitté le territoire allemand, il n’aurait pas pu y retourner, il a donc préféré ne pas prendre ce risque», a-t-il précisé.
Au sujet des deux dirigeants du FIS emprisonnés à Blida, Ahmed Merani a rappelé que Liamine Zeroual «s’est rendu lui-même voir Abassi Madani et Ali Benhadj à la prison de Blida pour les convaincre de chercher une solution à la crise», démentant, par-là, la fausse idée selon laquelle c’est le pouvoir qui aurait entretenu celle-ci. Ahmed Merani a fait ce rappel nécessaire pour réfuter l’information selon laquelle Abdelhamid Mehri aurait été mû par quelque volonté sincère de sortir le pays du bourbier dans lequel il se débattait. «Quand Mehri a demandé à Zeroual de libérer les deux chefs de file du FIS, ce dernier a répondu qu’ils devaient d’abord dénoncer les actes terroristes, ce qu’ils ont refusé de faire, ils étaient donc complices», a-t-il souligné.
A ce sujet, Ahmed Merani a révélé que lorsqu’un moudjahid – dont il n’a pas divulgué le nom –, qui avait des relations à la fois avec Liamine Zeroual et Abassi Madani s’était rendu chez ce dernier dans sa résidence surveillée pour le persuader d’aider à calmer les esprits, il lui avait répliqué, sur un ton condescendant, qu’il «n’était pas rancunier» et qu’il était «prêt à passer l’éponge si Zeroual se retirait de la présidence et restituait le pouvoir au FIS». «Abassi Madani avait été grisé par sa libération qu’il avait interprétée comme un signe de faiblesse de la part du pouvoir», a commenté Ahmed Merani qui dit regretter «amèrement» que Sid-Ahmed Ghozali ait présenté sa démission à Ali Kafi après l’assassinat de Mohamed Boudiaf. «S’il n’avait pas commis cette erreur monumentale, il n’y aurait eu ni Zeroual ni Bouteflika et le pays ne serait pas dans la situation catastrophique actuelle», s’est-il désolé.
M. K.
Comment (33)