Les allusions graveleuses du socialiste Védrine sur l’assassinat de Boudiaf
Par Houari A. – Hubert Védrine qualifie la Guerre d’Algérie de «longue, trop longue, cruelle et qui n’en finit pas de produire dans le temps ses effets empoisonnés». Dans son dernier livre qui vient de paraître en février, aux éditions Plon Fayard, intitulé Dictionnaire amoureux de la géopolitique, l’ancien ministre français des Affaires étrangères estime que «c’est la séquence franco-algérienne qui domine encore aujourd’hui» l’histoire de l’Algérie.
L’auteur, qui relate les enfumades de Bugeaud, rappelle que «l’expédition de 1830, présentée au début comme une opération antipiraterie et transformée après quelques hésitations en conquête, souvent sanglante au début, puis en colonie de peuplement à laquelle s’opposera notamment, jusqu’en 1847, l’Emir Abdelkader», décrit comme une «personnalité extraordinaire» et une «grande figure intellectuelle et religieuse de l’islam philosophique et de dialogue». «Ce qui fait, écrit-il, qu’il est renié par les nationalistes, rejeté et ignoré par les islamistes».
«La suite, toujours présente dans les esprits et les débats, sous des formes schématisées, ce sont les massacres de Sétif en 1945 et, bien sûr, les assassinats du 1er novembre 1954, prélude à l’insurrection combattue par la guerre menée par la France de 1954 à 1962 et qui entraîne, au passage, la chute de la IVe République et le retour au pouvoir du général De Gaulle. Massacres de colons ou de harkis par le FLN. Assassinats par l’OAS. Histoires de colonisation et de décolonisation, comme il y a des dizaines d’autres. Mémoires meurtries», renchérit Hubert Védrine qui met la puissance coloniale et le peuple colonisé sur un pied d’égalité. Un atavisme bien socialiste.
L’ancien conseiller diplomatique de François Mitterrand ajoute que «les relations franco-algériennes passent pendant les soixante années qui suivent [l’indépendance] par des hauts et des bas». «Tous les présidents français, souligne-t-il, essaient, à partir de Valéry Giscard d’Estaing, d’établir les moins mauvaises relations possibles avec l’Algérie, tout en gardant de bonnes relations avec le Maroc et la Tunisie». Hubert Védrine estime que cette façon de tenir le bâton par le milieu n’a pas eu de «résultats probants en ce qui concerne l’Algérie». «Certains présidents algériens, comme Chadli Bendjedid, Mohamed Boudiaf ou Abdelaziz Bouteflika, essaient de décrisper les relations avec la France, mais cela tourne court», affirme-t-il.
Il en explique les raisons. De son point de vue, c’est «la marge de manœuvre des présidents par rapport à l’armée algérienne qui n’est pas prête à bouger sur la France, ni sur le Maroc» qui est «faible ou inexistante». «D’ailleurs, enchaîne-t-il, Mohamed Boudiaf est assassiné», laissant ainsi entendre que ce serait l’armée qui en serait l’auteure. Grave accusation d’un ancien officiel français qui pourrait donner lieu à une nouvelle «crispation» des relations entre Alger et Paris. «La question, aujourd’hui, n’est pas celle des relations entre les peuples (les millions d’Algériens en France, dont 2 millions de binationaux), mais celle des relations entre la France et le régime algérien», insiste-t-il.
Hubert Védrine ne veut pas anticiper les résultats du travail de mémoire confié par Macron et Tebboune à deux historiens français et algérien, mais il estime que «ce serait bien que cela marche», tout en affirmant qu’il serait «difficile de prévoir où cela conduira, ce que demanderont l’armée algérienne et les groupes concernés en France, harkis, rapatriés, doubles nationaux, opinions».
L’ancien chef de la diplomatie française dans le gouvernement de Lionel Jospin appelle implicitement l’Algérie à s’arrimer au Maroc dont il défend bec et ongles le régime monarchique, en «transcendant son souverainisme accusateur et vengeur». «Cela ouvrirait des perspectives nouvelles avec la France, mais surtout au Maghreb et en Afrique», conclut-il, dans une invite à peine voilée à se transformer, comme son voisin de l’Ouest, en un nouveau protectorat français.
Les insinuations graveleuses d’Hubert Védrine sont la preuve, s’il en est, que le «qui tue qui» est bel et bien l’émanation du Parti socialiste français.
H. A.
Comment (47)