Ces barons énigmatiques qui détiennent jusqu’à 10 000 milliards de dinars
Par Nabil D. – Le président Tebboune a estimé la masse détenue par les barons du marché parallèle entre 6 000 et 10 000 milliards de dinars. Un argent qui circule en marge des circuits officiels et qui gangrène l’économie nationale. Pourtant, jamais l’identité des détenteurs de cette fortune n’a été révélée au grand public et jamais elle n’a été inquiétée. Qui se cache derrière cette omnipotente sphère parallèle qui vend et achète la devise au pied du tribunal d’Alger et à quelques encablures à peine du Palais du gouvernement, comme un pied-de-nez à l’Etat ?
«Autant les hommes d’affaires qui ont profité de la gouvernance hasardeuse de Bouteflika sont jetés en pâture à la vindicte populaire, condamnés à de très lourdes peines par les tribunaux, malmenés du matin au soir dans les médias lourds et dépossédés de leurs biens mal acquis, autant les milliardaires qui comptent leur argent à la pesée à l’intérieur de sous-sols bunkérisés et de coffres-forts géants continuent de fructifier leur business et de dominer le marché noir en toute quiétude», s’étonne une source spécialisée dans le secteur financier.
«Au lieu de sévir contre cette mafia comme il le fait avec les hommes d’affaires, l’Etat lui tend la main et la supplie presque de réinjecter dans le circuit officiel les sommes monumentales qu’elle détient», tacle cette source qui ajoute que «le gouvernement a été jusqu’à multiplier les banques islamiques pour inciter ces nababs à y déposer leurs sacs remplis de billets en leur offrant toutes les garanties possibles et imaginables». «Par cette démarche infructueuse, l’Etat identifie, en réalité, les barons qui sont donc des islamistes et, parfois même, des terroristes repentis qui ont investi l’argent des rançons et du racket durant la décennie noire», peste notre source.
A ceux qui suggèrent de remplacer les grosses coupures actuelles par des billets différents, le président de la République a répondu qu’une telle solution serait «obsolète» car ces caïds paieraient des citoyens lambda pour faire de longues queues devant les banques, craignant ainsi que cela crée un grand désordre sans que cela mette fin à ce monopole.
Abderrahmane Mebtoul met constamment en garde contre la détérioration du dinar algérien et l’absence d’un système financier efficace, pointant «des banques déstructurées qui croulent sous le poids des créances douteuses», une «majorité d’entreprises publiques structurellement déficitaires, avec des comptabilités défectueuses» et «une Bourse d’Alger en léthargie». L’expert financier relève que «dans une conjoncture politique et économique instable, où même un ex-chef de gouvernement reconnaît avoir utilisé le marché parallèle pour écouler ses lingots d’or, il est illusoire de canaliser l’épargne de cette sphère où le taux d’intérêt ou le taux de profit est de loin inférieur aux actes spéculatifs qui peuvent procurer un gain monétaire largement supérieur et sans risques».
«Dans ce cadre, poursuit-il, après un tapage publicitaire de plusieurs mois, le ministre des Finances doit informer l’opinion publique sur le montant de l’épargne via la finance islamique à travers les nombreux guichets de certaines banques publiques installées au niveau du territoire national», «cerner les causes essentielles de la distorsion entre la valeur officielle du dinar et celle du marché» et «s’attaquer à l’essence du mal et non aux apparences».
N. D.
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