Sahara Occidental, le drone et la baudruche !
Contribution d’Ali Akika – La presse algérienne a annoncé qu’un drone marocain a frappé le 7 avril 2021 aux confins de la frontière du Sahara Occidental un groupe de combattants sahraouis à leur tête un général. La mort d’un officier supérieur sahraoui a quelques encablures de la frontière marocaine me rappela l’audacieuse opération menée par le chef du Polisario, Mustapha Sayed El-Ouali en 1976 dans la capitale mauritanienne où il trouva la mort. Cette opération sonna le glas de la présence de la Maurétanie dans une partie occupée du Sahara Occidental.
A l’évidence, la Mauritanie ne pouvait jouer au conquérant quand elle affichait son incapacité à défendre ses propres frontières. La Mauritanie évacua alors illico presto la partie du Sahara qu’elle occupait. C’est pourquoi mon intuition m’a fait dire que l’opération sahraouie du 7 avril 2021 était doublement symbolique. Elle brisait le rideau du silence entretenu par l’embargo médiatique du Maroc qui niait la reprise de la guerre depuis le 23 novembre 2020. Les combats au plus près du mur du sable, et peut-être même à l’intérieur du territoire marocain, dirigée par un officier supérieur, laisse entendre qu’une opération de grande envergure a eu lieu et non de simples bombardements habituels de l’artillerie du Polisario. L’importance des combats a obligé certainement l’ennemi à sortir de sa tanière pour combattre les «agresseurs» (1).
Evidemment, sortir mais pas à pied, ni à cheval. L’ennemi choisit la voie des airs plus sûre, courageux mais pas téméraire. Il envoya un drone, un jouet téléguidé d’un bureau confortable lequel bureau reçoit des images et des coordonnées du terrain. Il suffit à un Rambo de pacotille dans ledit bureau d’appuyer sur un bouton sur des êtres vivants qui bougent dans le paysage. La mort au combat d’un général sahraoui était une aubaine pour l’armée marocaine qui pouvait crier victoire dans Facebook pour faire oublier la reprise des combats par le Polisario. Jusque-là, cette armée était muette. Pourtant, ladite armée est censée être chez elle et continuellement attaquée lui donnait le prétexte de qualifier le Polisario de terroriste. Elle ne l’a pas fait jusque-là.
En sortant de son mutisme, l’armée de Mohammed VI avec son cri de victoire à la Pyrrhus a dévoilé sa dépendance politique et militaire à l’égard d’Israël qui lui a fourni le drone et formé des techniciens. Erreur de communication, et voilà aux yeux des peuples du monde arabe, le Maroc ne peut plus cacher sa traitrise. Il a regagné la cohorte des pays du Golfe qui ont confié leur sécurité à un pays qui finira par les rouler dans la farine. Voici donc un événement dont on peut vérifier les faits facilement dans la presse internationale. C’est mon regard sur cette journée sur un pays occupé où un peuple, avec son courage et animé de son droit comme armes principales, résiste à un pays voisin qui a fait entrer un loup dans la bergerie. Un loup qui a déjà dépecé la Palestine et dont la stratégie consiste à démembrer des pays pour garantir sa sécurité et, une fois cette garantie acquise, il se lance dans des aventures de rapines chez les voisins plus occupés à protéger leurs intérêts mesquins des «chefs» au détriment de la dignité de leurs peuples (2).
Voyons maintenant ce que cette bataille du 7 avril a inspiré à un «expert» en citations religieuses. Une baudruche de chez nous, à travers un article indigeste et stupide, se pâme des exploits de sa majesté M6 qui devient sous sa plume un grand politique pour avoir barguigné la Palestine contre une misérable plaque consulaire au Sahara Occidental. Hélas, il n’est pas tout seul dans ce genre de posture d’éblouissement dans le domaine de la géopolitique et stratégique. Je me souviens avoir écrit ici même un article contre ceux qui veulent envoyer combattre l’ANP en dehors des frontières. J’avais répondu à un «professeur» en stratégie qui conseillait et applaudissait à une pareille et funeste «idée».
En contrepartie du sang versé par les soldats de l’ANP, le pays serait payé, tenez-vous bien, en prestige diplomatique pour avoir l’honneur d’être invité dans les forums et les collations de petits fours qui suivent les bavardages de tribune. Enfin, réapparaît aujourd’hui une quelconque personne, la tête remplie de citations de l’islam pour impressionner les lecteurs. Des lecteurs à qui on veut faire oublier le passage dudit personnage dans les allées du pouvoir. Alors que des intellectuels et artistes se fatiguent leurs méninges pour éviter que le charlatanisme n’occupe l’espace social, véritable entreprise d’abrutissement.
Faute de briller sur les problèmes du pays où le peuple se bat pour un Etat démocratique dans une Algérie libérée des chaînes de l’histoire féodale et coloniale, une société où les femmes auront les mêmes droits que les hommes, d’aucuns essuient leurs chaussures pleines de boue sur le Polisario, le Hezbollah et l’Iran. Au profit de qui, de quoi ? D’un roitelet voisin qu’on nous fait passer pour un haut stratège alors qu’il mendie son soutien en livrant les richesses du pays à des Etats qui, au fond, le méprisent. On insulte le Hezbollah qui, depuis 2006, a interdit à l’armée israélienne de ne plus fouler la terre libanaise. On attaque l’Iran qui a aidé la Syrie à briser Daech et autres zombies de la terreur. Un pays qui empêche les féodaux du Golfe, Netanyahou et l’état-major de son armée de dormir. Un Etat qui est sous embargo depuis des dizaines d’années et construit malgré tout des missiles, sous-marins, avions et qui ne fournit aucun prétexte à Israël de l’attaquer ouvertement.
Et notre doukteur en islam, ignorant des lois de l’art de la guerre qui consiste à désarmer l’adversaire sans faire la guerre, ne comprend pas les joueurs d’échecs que sont les Iraniens. Et c’est précisément cet exploit que réalise l’Iran aujourd’hui en obligeant les Etats-Unis à revenir à la table de négociation (3) sur le nucléaire, à Vienne, et ce, à partir des conditions de l’Iran. Quant à Israël, notre baudruche en stratégie qui se pâme devant l’armée d’Israël, il devrait savoir que cette armée a été téméraire pour aller bombarder une petite usine d’Irak en 1982 où l’on tâtonnait à fabriquer quelques grammes d’uranium. Pourquoi l’invincible armée ne réalise pas le même exploit aujourd’hui alors que l’Iran est à deux pas de fabriquer une vraie bombe atomique ?
Pourquoi Netanyahou fait sans cesse des allers-retours à Moscou pour quémander l’aide de la Russie pour faire sortir l’Iran de la Syrie ? Oui, l’Iran est présent face à l’armée israélienne qui occupe une partie du Golan et pourquoi ladite armée ne traverse pas la barrière de la frontière pour régler ses comptes à l’Iran, etc. La réponse est simple, Monsieur le séduit qui fait les yeux de Chimène à cette armée d’occupation. Netanyahou hurle, court à l’ONU, ses généraux font le pied de grue devant le Pentagone américain parce que Netanyahou sait que s’il attaque l’Iran, ses avions ne reviendront pas comme jadis d’Irak, avec la victoire en chantant.
Un dernier mot pour terminer, les baudruches, au lieu de nous bassiner avec leurs connaissances superficielles, devraient les renforcer avec les faits têtus de l’histoire. Si l’on prend l’histoire de la colonisation de la Palestine et du Sahara Occidental, les singeries du Maroc sont frappantes. Sans rentrer dans les détails, voyons les singeries en question. Comme Israël, le Maroc avance un argument mystificateur de l’histoire pour justifier la conquête d’un pays. La Bible pour les uns, les actes d’allégeance tribale pour les autres. Le retour de populations sur des terres et des maisons qu’ils volent au sens propre du mot. Pour justifier leur répression, ils construisent des murs pour se protéger des «terroristes», etc. et, au final, ils utilisent la technologie des drones et des satellites pour se battre à distance.
A. A.
1- Mon article du 30 décembre 2020 : L’ennemi harcelé jour et nuit finira par sortir de sa tanière pour tenter des contre-attaques. C’est à ce moment-là que les petits groupes de guérilléros dans leurs 4/4 Mad-Max iront à la rencontre de leurs ennemis. C’est cette tactique que semble mettre en œuvre le Polisario depuis le 13 novembre si l’on se réfère aux images de son artillerie qui bombarde différents points du mur de sable.
2- La Jordanie goûte aux délices de son traité de paix. Israël refuse d’évacuer des terrains loués à la Jordanie le long du fleuve du Jourdain. Quant à l’Egypte, elle est au bord de la guerre avec l’Ethiopie qui a fait un gigantesque barrage sur le Nil qui empêche l’Egypte de recevoir de l’eau vitale pour son agriculture. L’Ethiopie qui laisse les falashas émigrer en Israël reçoit en contrepartie l’aide d’Israël. L’eau du Jourdain, l’eau du Nil, voici le moteur de la prochaine guerre dans la région.
3- Voir article du 26 mars 2021.
Comment (8)