Ce que dit la loi française sur l’argent «de» Belkecir, Bouchouareb et Saïdani
Par Nabil D. – La loi française relative à l’affectation des recettes provenant de la confiscation des biens détenus par des personnes étrangères politiquement exposées, reconnues coupables d’infractions en matière de probité, donne pleine latitude au gouvernement français d’en faire l’usage qu’elle veut. Une loi qui compromet la possibilité, pour l’Algérie, de récupérer les sommes détournées dont le président Tebboune a promis le rapatriement. Une action qui semble quasi impossible.
Dans ladite loi française, il est stipulé, en effet, que les sommes recouvrées et le produit de la vente des biens confisqués aux personnes étrangères coupables de délits de recel ou de blanchiment du produit de biens ou de revenus provenant d’un crime ou d’un délit commis, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, au préjudice d’un Etat étranger, «sont affectées à l’amélioration des conditions de vie des populations et au renforcement de l’Etat de droit ainsi qu’à la lutte contre la corruption dans le ou les pays où les infractions susvisées ont eu lieu». Par cet article, la France laisse entendre qu’elle pourrait destiner cet argent à l’opposition, en appuyant cette «procédure d’affectation des fonds» sur «les principes de transparence, de redevabilité, d’efficacité, de solidarité et d’intégrité».
En cas d’impossibilité «absolue» d’affecter les fonds dans les conditions prévues par la loi en question, ces derniers sont versés au «budget général de l’Etat français». Autrement dit, la France s’octroie le droit d’accaparer les capitaux transférés illégalement d’Algérie. Or, c’est principalement en France que se trouve le plus gros des sommes détournées, notamment par l’ancien commandant de la Gendarmerie nationale, objet d’un mandat d’arrêt international pour corruption, l’ancien ministre de l’Industrie, Abdeslam Bouchouareb, et l’ex-président de l’Assemblée populaire nationale (APN, Parlement) et ex-patron du parti FLN, actuellement réfugié au Maroc, Amar Saïdani, entre autres.
Selon le texte français en vigueur depuis 2019, trois caractéristiques principales la distinguent des autres formes de corruption : l’importance des transactions et des sommes en cause ; la grande mobilité de ces flux financiers et la capacité de les dissimuler à l’étranger grâce à une ingéniosité juridique et financière ; les lourdes conséquences économiques et sociales pour les pays d’origine.
«A l’instar d’autres pays développés, la France héberge une partie de ces flux financiers illicites. La législation actuelle prévoit bien des sanctions patrimoniales et des mécanismes de recouvrement afin d’appréhender les produits de la corruption transnationale», précise le Sénat français, qui explique qu’une agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC), créée en 2010, assure la gestion des biens saisis et procède à leur aliénation en vue d’en transférer le produit.
Si la loi prévoit quatre destinations en France, même pour les fonds provenant des avoirs confisqués, il existe des règles de partage au profit de l’Etat étranger ayant ordonné la confiscation, mais le partage n’est pas automatique, le législateur français ayant estimé que «la confiscation des produits de la corruption transnationale se trouvant en France emporte le plus souvent le transfert de leur propriété à l’Etat français et rien ne permet de garantir l’affectation des avoirs illicites confisqués au profit des pays et des populations qui en ont été privés», il a mis en place, par le biais de la loi de 2019, «un fonds dédié afin d’organiser l’affectation des avoirs, avec le double objectif de garantir que les avoirs illicites recouvrés en France contribuent au développement des pays qui en ont été privés».
Autrement dit, une ingérence d’un nouveau type qui s’est manifestée lors de l’explosion du port de Beyrouth suivie du déplacement du président français dans la capitale libanaise où il avait dicté aux autorités locales la ligne de conduite à suivre, en leur donnant un ultimatum d’un mois avant de revenir et de vérifier si ses «ordres» avaient été exécutés à la lettre.
N. D.
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