Pierre Audin : «L’Algérie n’est pas ce pour quoi mes parents se sont battus»
Par Houari A. – «Mes parents ont lutté pour chasser le colonialisme et créer une Algérie fraternelle, solidaire, multiculturelle. L’Algérie est devenue indépendante, certes, mais elle n’est toujours pas ce pour quoi ils se sont battus, le pays auquel aspiraient les Algériens», a affirmé le fils de Maurice Audin dans un entretien au quotidien francophone El-Watan.
Pierre Audin, qui a apporté son soutien aux journalistes algériens qui «subissent un harcèlement policier et judiciaire», a fait remarquer qu’«à l’approche des élections du 12 décembre 2019 (date de l’élection présidentielle, ndlr), la répression s’était durcie» et qu’«il semble qu’à l’approche des élections du 12 juin (date des législatives, ndlr), ce soit de nouveau le cas». Il a, par ailleurs, fait un parallèle – sans doute maladroit – entre Maurice Audin qui «a été torturé et assassiné» parce qu’«il s’occupait de planquer la machine qui imprimait le journal du PCA», et l’interpellation de Rabah Karèche à Tamanrasset. «Ce journal (imprimé par Maurice Audin, ndlr) s’appelait Liberté, vous comprendrez que j’aie une certaine sensibilité lorsque j’apprends que l’actuel journal Liberté subit la répression du pouvoir actuel», a-t-il dit.
S’agissant des relations entre Alger et Paris, Pierre Audin a soutenu que l’apaisement des mémoires entre la France et l’Algérie lui «tient particulièrement à cœur» du fait de son histoire familiale. «Par exemple, a-t-il expliqué, une coopération entre les deux pays pour retrouver où a été enterré le corps de Maurice Audin serait une avancée prodigieuse tant sur le plan de la recherche de la vérité que sur le plan symbolique.» «Pour le moment, aucune des deux parties ne fait un geste : ni l’Algérie, alors qu’une demande a été faite par notre avocat en 2014, ni la France qui referme un peu plus ses archives», a-t-il poursuivi.
Pierre Audin a rappelé que le président français avait annoncé à sa mère, en septembre 2018, «l’ouverture de toutes les archives concernant les disparus de la Guerre de libération, qu’ils soient Français ou Algériens, qu’ils soient civils ou militaires». «Le combat se concentre donc aujourd’hui sur l’accès aux archives, qui concerne des milliers d’Algériens, comme en témoigne le site web 1000autres.org qui a déjà obtenu des renseignements sur plus de 300 personnes disparues en 1957», a-t-il fait savoir.
Le fils de Maurice Audin, membre du Collectif secret défense – Un enjeu démocratique, qui regroupe seize affaires, dont la moitié concerne la néocolonisation, nous apprend que parmi celles-ci est inscrite l’affaire de l’opposant marocain Mehdi Ben Barka, assassiné par les services de Hassan II avec l’aide du Mossad israélien, et celle de Henri Curiel, militant communiste et anticolonialiste, lui aussi assassiné à Paris en mai 1978.
H. A.
Comment (63)