Les hydrocarbures représenteront encore 98% des recettes en devises en 2021
Contribution du Dr Abderrahmane Mebtoul(*) – «Pas de bonne économie sans vraie démocratie» (professeur indien, Sen, A. K., prix Nobel d’économie). Comme je le rappelais dans une contribution parue sur le site Algeriepatriotique, les déclarations tant du ministère du Commerce, des Finances d’une appréciation du dinar et de la maîtrise de l’inflation, de l’agriculture d’une augmentation des exportations agricoles de plus de 1,1 de dollar en 2020 que du ministère de l’Energie, début avril, et de la direction générale de Sonatrach, début avril 2021, reprises par l’APS et de l’ augmentation des exportations d’ hydrocarbures durant le premier trimestre 2021, ayant fourni le volume physique et non la valeur, doivent être nuancées, pouvant induire en erreur les autorités du pays. D’ailleurs, le 29 avril 2021, un organisme public chargé de répertorier les importations et exportations, les statistiques douanières, donne des éclairages sur la structure des exportations. Cela montre l’urgence d’un organisme indépendant de l’exécutif chargé de l’information statistique, les données contradictoires afin d’éviter les manipulations des données qui nuisent tant à la cohérence de la politique socio-économique qu’à l’attrait de l’investissement national et étranger qui exigent une visibilité.
Ainsi, pour les deux premiers mois de 2021, janvier et février 2021, le montant global des exportations de l’Algérie a atteint 4,3 milliards de dollars (américains), dont 3,898 milliards de dollars hydrocarbures malgré un cours ayant fluctué entre 62/66 dollars le Brent. Nous avons 402 millions de dollars américains hors hydrocarbures, une légère augmentation par rapport aux deux premiers mois de 2020 où le montant était de 339 millions de dollars américains. Mais une analyse structurelle fait ressortir que les engrais représentent 33,1% du montant global des exportations hors hydrocarbures suivis par les produits chimiques inorganiques pour 17,0% et 6,7% pour le fer et l’acier, soit au total 56,8% pour un montant de 2,283 milliards de dollars, 19,8% étant réalisés par l’exportation d’autres produits que les statistiques ne définissent pas. Concernant l’agriculture dont bon nombre d’inputs sont importés en devises, le cas de la pénurie d’aliments de bétail pour le poulet ayant été une exemple frappant, le sucre et les préparations à base de sucre et de miel représentent 16,2% et les fruits et légumes 7,1%, soit au total 23,3% donnant 99 millions de dollars.
Les exportations ont donc connu une régression de 22,7% par rapport aux deux premiers mois de 2020 où l’économie mondiale a connu une crise inégalée où le montant était de 5,6 milliards de dollars américains. La raison est que, selon les organisations patronales, entre 50/70% % de l’appareil productif, selon les secteurs, sont en léthargie et que la structure productive du pays n’a pas changé, les entraves bureaucratiques freinant toujours l’investissement productif, rendant utopiques les extrapolations d’exportation de 5 milliards de dollars, comme je le soulignai dans l’interview donnée au quotidien El-Khabar le 27 avril 2021.
En effet, si on prend la même tendance, nous aurons une valeur des exportations, fin 2021, de 25,8 milliards de dollars dont les hydrocarbures 23,4 milliards pour les hydrocarbures et, contrairement à ce qu’a avancé le ministre de l’Agriculture lors de son audition par le Sénat, pour le segment fruits et légumes, nous aurons 305 millions de dollars et le secteur agricole, dans sa globalité, nous aurons un montant qui ne dépassera pas 600 millions de dollars.
En résumé, comme les années passées, les hydrocarbures avec les dérivés représenteront encore environ 98% des recettes en devises du pays en 2021. D’où l’importance face aux tensions géostratégiques et budgétaires avec de vives tensions sociales, d’un discours de vérité impliquant une vision stratégique fondée sur une nouvelle gouvernance et la valorisation de l’économie de la connaissance si l‘on veut dynamiser les segments hors rente. Il y va de la sécurité nationale.
A. M.
(*) Professeur des universités, expert international
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