Voici ce que les présidents éthiopien, soudanais et égyptien ont dit à Lamamra
Par Abdelkader S. – Des sources diplomatiques égyptiennes ont révélé le contenu de la proposition présentée par le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, aux chefs de l’Etat des trois pays concernés par la crise du barrage de la Renaissance, qu’il a rencontrés lors de son périple qu’il a achevé à Tunis, où il a été reçu une seconde fois par le président Kaïs Saïed.
Selon ces sources, qui se sont confiées au journal panarabe Al-Araby, l’initiative algérienne s’appuie sur l’article 10 de l’accord de principe conclu en mars 2015, lequel prône la mise en place d’un compromis qui doit mettre fin au statu quo. Les sources d’Al-Araby ont indiqué que l’Algérie est appelée à jouer un «grand rôle» dans l’activation dudit alinéa «contraignant». «L’Algérie œuvre à convaincre les trois Etats d’appliquer ce principe en tant que solution unique au problème», apprend-on. L’Algérie pourrait se joindre aux pays concernés, «le cas échéant», dans le cadre d’un «groupe formé de plusieurs pays ou de plusieurs parties» pour «proposer une médiation» ou «faciliter l’aboutissement à un accord tripartite sur un médiateur unique», explique-t-on encore.
Si l’Algérie a insisté sur l’article 10 de l’accord de 2015, c’est parce que toutes les discussions ont achoppé sur ce point précisément, chacune des trois parties avançant ses propres arguments. «Le Soudan semble bénéficier des deux aspects technique et économique de la construction du barrage de la Renaissance et a, de ce fait, à chaque fois renouvelé sa confiance en la possibilité de transcender les désaccords en poursuivant les pourparlers avant de demander une médiation», relève le journal édité à Londres, en se référant à ses sources égyptiennes.
«Quant à l’Ethiopie, poursuit le quotidien arabophone, elle refuse, après le round de discussions qui a eu lieu à Washington, le recours au contrôle ou à la médiation politique, en arguant que le problème est éminemment technique.». Pour sa part, l’Egypte «craint une nouvelle perte de temps sans aboutir à un accord définitif contraignant, surtout après le second remplissage du barrage par l’Ethiopie», croit savoir Al-Araby, selon lequel «Lamamra s’échine à trouver un terrain d’entente qui fasse que les trois Etats se mettent d’accord sur l’application de l’article 10 dans le cadre de rencontres tripartites en présence de l’Algérie et de représentants de l’Union africaine au niveau ministériel mais également présidentiel».
L’Algérie a offert d’accueillir ces rencontres pour «faciliter les négociations» et «atténuer les sensibilités», rapporte le journal à capitaux qataris, qui précise que le Soudan et l’Egypte ont donné leur accord de principe à l’initiative algérienne, en ce que les deux pays se disent ouverts à tout effort régional ou international pour résoudre la crise. Le Caire et Khartoum se sont engagés à faire preuve de «souplesse» envers les différentes propositions qui «pourraient aboutir à un accord». A Addis-Abeba, Ramtane Lamamra a, par contre, été accueilli avec «circonspection». «Les autorités éthiopiennes ont demandé à l’Algérie de prouver sa bonne foi en l’invitant à inciter la Ligue arabe à revenir sur sa position favorable de façon absolue à l’Egypte et au Soudan et unanimement hostile à l’Ethiopie», a fait savoir Al-Araby auquel ses sources égyptiennes ont assuré que «Lamamra n’a, cependant, pris aucun engagement dans ce sens». Le chef de la diplomatie algérienne «s’est contenté de s’efforcer de rapprocher les points de vue entre l’Ethiopie et les Etats arabes en tant que pays voisin et profondeur stratégique de l’Afrique du Nord et du Golfe arabe, d’autant plus que des relations économiques, politiques importantes la lient à la majorité des pays arabes».
Bien que les responsables politiques égyptiens aient salué la médiation algérienne, ils ne seraient pas très enthousiastes car celle-ci braquerait les projecteurs sur le rôle prépondérant d’un pays arabe aux côtés de l’Egypte en tant qu’acteur majeur dans la région, explique Al-Araby. Une information à prendre avec des pincettes, sachant la source de financement du journal et le grincement de dents à Doha devant tout rapprochement entre Alger et Le Caire, tous deux allergiques aux Frères musulmans vassaux du régime des Al-Thani.
A. S.
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