De l’urgence de mettre en place une plateforme d’alerte et de détection précoce de maladies infectieuses
Contribution de Saâd Hamidi – Dans son allocution liminaire lors du symposium sur les vaccins et la santé en date du 23 février 2021, le directeur de l’OMS déclarait : «Le schéma directeur en matière de recherche-développement, publié en 2016, définissait une liste de maladies prioritaires dont le Sras, le MERS(*) et les maladies à coronavirus en général, ainsi que la maladie X, due à un agent pathogène inconnu, et établissait une feuille de route pour la recherche sur chacun d’elles.»
En effet, selon l’OMS, la maladie «X» est une maladie hypothétique et inconnue, comme indiqué, et qui est susceptible de provoquer une épidémie grave pour l’ensemble de la planète. La maladie «X» est donc une menace sanitaire potentielle qui pourrait anéantir une bonne partie de la population mondiale et affecter durablement ses rapports sociaux et provoquer un changement draconien dans sa relation à l’environnement, à la nature et donc tout simplement à la vie. Il faut donc pour cela définir une stratégie d’évaluation des risques, en mettant en avant des outils de bio-surveillance et de détection précoce des éclosions de maladies infectieuses liées aux bouleversements mondiaux tant les changements climatiques que la mobilité induite par la mondialisation. Cela peut être aussi l’œuvre de bio-terroristes dans le but d’affaiblir durablement les structures étatiques d’un pays en s’attaquant insidieusement à «sa colonne vertébrale», c’est-à-dire à ses systèmes de défense. Certains pays travaillent d’arrache-pied pour améliorer leurs outils en utilisant surtout l’apprentissage profond ou les techniques de l’Intelligence artificielle (IA) basées sur le traitement avancé du langage naturel.
J’ose espérer que nous avons mis en place une plateforme d’alerte et de détection précoce de maladies infectieuses, y compris aussi pour le Covid-19 et ce, à l’échelle du pays. La cellule de crise qui gère cette plateforme n’aura qu’à sortir en temps et lieu les plans de contingence, les procédures, les processus et les actions découlant pour faire face à tout imprévu.
Le manque d’oxygène ou ce qui s’apparente comme étant de la mauvaise gestion est là pour nous rappeler notre improvisation, notre impréparation et notre précipitation et tâtonnement pour rafistoler des solutions hâtives et incomplètes de dernière minute.
La solidarité citoyenne fait partie de l’ADN de l’Algérien. C’est tant mieux. Par contre, une meilleure organisation donnera plus d’élan et d’efficacité à cette solidarité. L’intervention de notre ambassadeur à Paris pour centraliser les dons est on ne peut plus pertinente. Les dons doivent répondre à des impératifs de contrôle, de sécurité, de dates de péremption comme pour les médicaments par exemple. Mais ce qui compte le plus, c’est de diriger les dons vers un lieu commun centralisé comme la Pharmacie centrale relevant du ministère de la Santé et qui veillera à bien gérer la distribution, selon les informations colligées des besoins et des insuffisances constatées à travers le territoire national.
Dans cet élan, il s’est trouvé des gens malintentionnés pour propager toutes sortes de rumeurs. Une maîtrise réelle dans la distribution et dans la bonne gouvernance coupera l’herbe sous les pieds de ceux qui veulent créer le chaos. Pour dénoncer ces ragots, un directeur d’hôpital n’a pas trouvé mieux que d’affirmer : «Je confirme qu’il n’y a pas eu 14 morts par manque d’oxygène, comme propagé par certaines vidéos, mais seulement 3 patients qui sont morts par manque d’oxygène.» Horreur à glacer le sang ! Il n’y en aurait qu’un seul patient qui meurt par manque d’oxygène, et c’est de trop. Je l’ai lu et cela s’est passé à l’hôpital de Sour El-Gozlane. J’étais choqué, ému et je me suis mis à rêvasser :
A côté du Comité scientifique et des orientations ministérielles quotidiennes, nous avons une cellule de crise au ministère de la Santé qui travaille d’arrache-pied pour juguler les effets de cette crise en déployant à travers tout le pays les plans de contingence déjà préparés à l’avance. Chaque directeur de santé publique (DSP) au niveau de chaque wilaya sait ce qu’il doit appliquer comme procédures et processus déjà cartographiés. Chaque matin, devant sa plateforme locale d’évaluation de risques et de détection précoce d’alertes, des informations lui parviennent en temps réel des différentes structures hospitalières, des officines et d’autres endroits sensibles de toute la wilaya. Il prend des décisions éclairées et conduit les opérations avec une efficacité redoutable. Tout est acheminé dans les règles de l’art et la distribution des concentrateurs d’oxygène se fait d’une manière fluide. Il veille avec les directeurs d’hôpitaux que les fournisseurs d’oxygène respectent scrupuleusement leur engagement et honorent leur contrat sous peine de poursuite en cas de manquement. Avec les données affichées sur une carte géographique interactive et comme pour anticiper le manque, la veille il a fait venir de la Pharmacie centrale un certain nombre de concentrateurs d’oxygène pour couvrir les besoins de sa wilaya.
Cette plateforme a été l’œuvre d’un bureau conseil, suite à un appel d’offres en bonne et due forme, en collaboration étroite avec le ministère de la Santé et l’Ecole nationale supérieure d’informatique de Oued Smar(**) dont ses ingénieurs font le bonheur de beaucoup de pays. Dans cette plateforme, la collecte de l’information se fait par le biais d’applications sous forme de robots conversationnels (Chatbots) installés sur les téléphones cellulaires des personnes habilitées à saisir l’information. L’analyse de toutes les sources de données est réalisée à l’aide d’algorithmes puissants basés sur l’IA, l’apprentissage profond et le traitement du langage naturel.
A signaler que nos compatriotes à l’étranger ont participé énormément à la conception et à la mise en place de cette plateforme. Je continuais à rêvasser comme, par exemple, fournir à travers cette plateforme un chiffre exact des vaccinés en temps réel ou donner une information exacte de la production d’oxygène, etc. quand j’entendis ma femme me tirer de ce rêve lucide avec une voix presque éteinte : «Asmaâ… il y a des feux de forêts terribles dans le pays !»
S. H.
(*) Sras/Mers : Syndrome respiratoire aigu sévère/Middle East Respiratory Syndrome
(**) Dans le cadre d’une mission ministérielle mixte (nationaux/diaspora) en mars 2018, j’ai eu l’honneur d’auditer cette école avec un compatriote professeur à l’Ecole des travaux publics de Kouba. Nous avons été agréablement surpris de l’excellence du niveau des étudiants, des programmes ainsi que de la bonne gouvernance de l’équipe dirigeante de cette école.
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