Ce que révèle le soutien franc du chef du parti islamiste MSP aux hordes talibanes
Par Mohamed K. – Le soutien affiché par le chef de file du parti islamiste MSP aux talibans dès leur retour au pouvoir à Kaboul n’est pas fortuit. Il coïncide avec les déclarations triomphalistes du président turc, Tayyip Recep Erdogan, qui s’est félicité du deal secret passé entre les Etats-Unis et cette mouvance extrémiste qui s’est soldé par le retrait définitif des troupes américaines et l’abandon de millions d’Afghans dont des dizaines de milliers se préparent à quitter le pays, désormais livré à ces hordes sauvages.
On comprend ainsi que les Frères musulmans, conduits par le patron de l’AKP turc, ont réagi en ordre de bataille à l’avènement des talibans au pouvoir après en avoir été écartés momentanément par les Occidentaux, le temps, sans doute, de leur permettre de faire l’apprentissage de la gestion des affaires, selon les normes dictées par Bush, Obama, Trump – qui avait maintenu les troupes américaines sur place malgré sa promesse faite durant sa campagne de les retirer après son élection –, puis Biden qui a admis que les milliers de soldats américains envoyés en Afghanistan ont été sacrifiés pour rien.
L’inféodation d’Abderrazak Mokri au sultan d’Istanbul n’est, en réalité, un secret pour personne. En décembre 2018, plusieurs députés algériens se retrouvaient en Turquie, pour assister aux travaux d’un congrès de la Ligue des parlementaires pour Al-Qods, organisation qui sert de vitrine à l’Internationale islamiste. Ce conclave des membres de la secte des Frères musulmans venus de tous les pays islamiques s’ouvrait à Istanbul sous le slogan pompeux «Al-Qods, capitale éternelle de la Palestine». Présent lui aussi pour assister à cet événement phare des Frères musulmans, le leader du MSP avait profité de l’occasion pour rendre visite à Mohamad Mahathir qui venait d’être nommé Premier ministre en Malaisie pour lui présenter ses félicitations. Mahathir est, par ailleurs, président d’un think thank arrimé, lui aussi, aux Frères musulmans, appelé «Forum de Kuala Lumpur pour la réflexion et la civilisation» dont Abderrazak Mokri est secrétaire.
Deux ans auparavant, Abderrazak Mokri, réagissant à un article d’Algeriepatriotique qui relevait ce qui apparaissait comme un retournement spectaculaire contre Erdogan suite à la tentative du coup d’Etat à Ankara, avait voulu rassurer ses partisans, en affirmant qu’il demeurait «fidèle» à son gourou. Il soulignait que ses critiques, aussi vives fussent-elles, n’enlevaient rien à l’adoration qu’il voue à l’autocrate turc, ni à l’allégeance qui le lie, lui et son parti, à l’AKP, principal représentant des Frères musulmans depuis la chute de cette confrérie en Egypte.
Sur sa page Facebook, Mokri écrivait : «Notre admiration pour l’expérience d’Erdogan est sans limite et notre dévouement pour lui restera inflexible ; chose dont nous sommes fiers. Les reproches que nous avons formulés à son encontre au sujet de sa réaction disproportionnée contre les partisans du mouvement Hizmet, suite au sinistre coup d’Etat raté (…), ne sont que l’expression de notre souci et de notre crainte pour cette expérience.» S’en prenant à ses détracteurs, il affirme : «N’en déplaise à ceux qui abhorrent Erdogan et son parti, pour les mêmes motifs que ceux ayant poussé les putschistes à tenter de le renverser, et qui ont jubilé aux critiques fraternelles et conseils sincères que j’avais adressés à cet homme historique et exceptionnel, leur but n’est pas atteint !»
S’adressant aux membres de son parti, en pleine ébullition préélectorale et sur fond de tiraillements au sein du MSP, il avait insisté : «Nous continuerons à considérer l’expérience du Parti de justice et de développement turc et de son leader, Recep Tayyip Erdogan, comme une expérience de vérité, de justice, de succès et d’excellence. Elle a fait honneur à l’islam et aux musulmans et démontré aux faibles d’esprit, subjugués par le colonialisme et le néocolonialisme, que les musulmans ont leur place dans la compétition civilisationnelle.» Une expérience qui est aussi, pour le leader islamiste algérien, «un modèle à suivre pour développer nos pays de la même façon qu’a été bâtie la Turquie, pour peu que nous disposions des mêmes conditions, et nous continuerons à nous battre pour les avoir».
Le soutien de Mokri aux talibans a le mérite de prouver qu’il est toujours le vassal d’Ankara.
M. K.
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