Le Maroc refuge pour cyberagitateurs et corrompus : un Vanuatu à nos frontières
Par Kamel M. – Le Maghreb a son Vanuatu. Il s’appelle Maroc. En effet, l’arrestation de Nabil Karoui, l’homme d’affaires tunisien et propriétaire de la chaîne de télévision Nessma, dans l’extrême-est de l’Algérie, a révélé que ce dernier avait l’intention de se rendre dans ce pays devenu le refuge par excellence pour les délinquants économiques et les agitateurs sur les réseaux sociaux hostiles à l’Algérie. Un des auteurs du crime ignoble dont a été victime le jeune Djamel Bensmaïl avait, lui aussi, été intercepté à l’extrême-ouest du pays alors qu’il tentait de traverser la frontière.
Le Maroc a accueilli l’ancien patron du FLN, Amar Saïdani, qui a choisi de s’y établir lorsqu’il a senti l’étau se resserrer autour de lui et que la justice algérienne allait finir par le faire extrader de France où il compte de nombreux biens acquis par la corruption. L’ex-président de l’APN avait montré, bien avant sa décision de demander la protection du régime marocain, sa connivence avec ce dernier en prenant fait et cause, dans un entretien à un site connu pour sa proximité avec le Quai d’Orsay, pour le Makhzen dans le conflit du Sahara Occidental.
Actuellement, tous les membres de l’organisation islamiste Rachad, succédanée du FIS dissous, désormais classée terroriste par l’Etat algérien, s’apprêtent à se rendre au Maroc pour y bénéficier de la bienveillante caution des services secrets marocains pour lesquels ils travaillent à partir de Londres, Paris, Genève et Istanbul notamment. Le chef de file de ce mouvement s’emploie, a-t-on appris de sources sûres, à organiser l’exfiltration des membres de Rachad depuis l’extradition de l’ancien gendarme, Mohamed Abdallah, par les autorités espagnoles. Ce dernier a été entendu par le juge à Alger et il va de soi qu’il divulguera l’organigramme de l’organisation et révélera le juteux business via les réseaux sociaux et les cotisations qui rapportent au cartel de grosses sommes d’argent, sans compter les financements occultes qu’il reçoit d’officines étrangères.
L’offensive judiciaire de l’Algérie a coïncidé avec la nouvelle orientation politique du président turc, Recep Tayyip Erdogan, qui a décidé de divorcer d’avec la secte des Frères musulmans et de privilégier les intérêts économiques et diplomatiques de la Turquie dans ses relations avec l’Algérie et l’Egypte. Une première mesure avait été prise qui a consisté en l’interdiction de toute critique du pouvoir d’Abdelfattah Al-Sissi et l’expulsion d’un certain nombre de membres de la confrérie égyptienne qui ont trouvé refuge au Qatar. Des youtubeurs algériens activant à partir d’Istanbul connaîtront le même sort et se préparent déjà à quitter la Turquie de peur d’être livrés à leur tour à la justice algérienne qui les réclame de longue date.
Ces activistes à partir de l’étranger ont, pour la plupart, cessé d’intervenir sur les réseaux sociaux, tandis que d’autres sont carrément entrés dans la clandestinité, fuyant la police dans les pays où ils se croyaient inatteignables. L’un d’eux, Mohamed Benhalima, ancien caporal de l’armée algérienne, se cache en Espagne où il est activement recherché par les services de sécurité. Ses mentors cherchent à le faire sortir du pays à travers la frontière terrestre avec la France, avant de le faire entrer provisoirement dans un autre pays européen, vraisemblablement la Belgique ou la Suisse, où se trouve un autre élément de Rachad, originaire de Mostaganem, qui a quitté l’Algérie clandestinement par voie maritime.
C’est au Maroc que tout ce beau monde compte finir ses jours, même si le souvenir du cas Layada leur donne des frayeurs, conscients qu’ils ne sont, désormais, à l’abri nulle part. Sauf, sans doute, au Vanuatu où le ripou Ghali Belkecir se morfond sous les cocotiers à 18 000 kilomètres de l’Algérie.
K. M.
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