La cause de la fourberie et de l’indigne trahison des monarchies
Une contribution d’Ali Akika – L’utilisation de la traîtrise et la fourberie à l’encontre des Sahraouis et des Palestiniens donnent une idée de la nature féodale et politique des monarchies. Leur faute politique est telle qu’il ne faille pas perdre son temps à disséquer la psychologie de ces rois et émirs qui s’adonnent à cet «art». Restons sur le terrain du politique et de l’histoire. La position politique des monarchies du monde arabe à l’égard du Sahara Occidental et de la Palestine n’est pas le fait du hasard. Il en est de même de l’Occident qui est un espace politique et non géographique. Cet Occident a abandonné le qualificatif de chrétien pour intégrer dans son aire des pays comme le Japon et Israël. Sa nouvelle religion est le binôme capitalisme/libéralisme qui seraient une frontière indépassable, c’est-à-dire «éternelle».
C’est le propre des imbéciles d’enfermer l’Homme et l’Histoire dans leur petit univers qui repose sur l’arrogance et l’ignorance. Ainsi, il n’est pas étonnant que l’on assiste à des alliances entre des monarchies qui prétendent descendre des familles des prophètes (1) et l’Occident qui cache son histoire de conquêtes coloniales sous le vocable de la civilisation et la liberté. Mais quand on pointe la focale de l’histoire sur ces monarchies et sur l’Occident, c’est d’autres historiettes (hikâyât) qui apparaissent sur la photo. Le socle sur lequel reposent les alliances entre ces deux entités politiques a pour nom pétrole et gaz, la richesse des monarchies est une matière première indispensable à la gloutonne industrie du capitalisme triomphant.
Cette richesse se trouvant dans des pays situés au carrefour de trois continents, toute la région du Moyen-Orient acquiert une importance géostratégique et géopolitique qu’il fallait protéger et défendre contre toute convoitise, un facteur qui fait partie des appétits des puissances. Le pétrole et son transport le plus rapidement possible vers le monde industrialisé nécessitaient la protection de la région et des routes maritimes. Le canal de Suez, par exemple, qui relie l’Asie à l’Europe en faisant une économie de temps d’un mois aux navires, augmenta l’importance stratégique de l’Egypte déjà immense due à son histoire antique et sa centralité au sein du monde arabe et africain (2). On n’a pas besoin de faire un dessin pour comprendre l’importance de la région pour l’Occident et l’impératif qui s’impose à lui, faire des alliances dans la région (3).
Pour l’Occident, le choix de ses alliances ne repose pas sur la bonté et la morale. Son attitude est dictée par ses intérêts, son cynisme et ses capacités à manœuvrer dans une région dont il est éloigné par la géographie, l’histoire et la culture. Pour déterminer la qualité du carburant de son moteur, un détour par l’histoire peut nous éclairer. L’Occident, bien longtemps après les Croisades, remit les pieds en Orient après la chute de l’Empire ottoman qu’il dépeça et se partagea. L’Angleterre s’offrit la plus grande part du gâteau et laissa des miettes à la France. Normal, la Perfide Angleterre mit la main sur la région grâce à ses ruses et à son espion Laurence d’Arabie, amateur d’aventure et séduit par la vie du désert.
L’Occident ne débarquait pas cependant dans un désert politique. Cette région flirtait, déjà sous les Ottomans, avec les remous des changements du siècle, et le monde arabe avait déjà mis un pied dans la nahda (renaissance). Celle-ci va engendrer des mouvements nationalistes qui s’opposaient à la colonisation. Des royaumes comme l’Egypte et l’Iran s’effondrent et viennent renforcer ces mouvements politiques. L’Occident paniqua et voyait déjà l’URSS s’installer au Moyen-Orient. Ne restait à l’Occident qu’à renforcer ses alliances avec les monarchies contre ces mouvements nationalistes qui, du reste, balayèrent en 1958 le pacte de Baghdad, nationalisèrent le canal de Suez 1956, l’Algérie sur le chemin de l’indépendance (1954-1962), prise du pouvoir en Irak et en Syrie par le Baath, naissance d’une République du sud du Yémen (1965), etc.
Ce sont là les facteurs économiques et géopolitiques qui ont engendré les ingrédients des confrontations qui n’ont pas cessé depuis l’entrée en scène des Etats-Unis après la Guerre mondiale et l’installation d’Israël en Palestine en 1948. C’est du reste un pays non arabe, l’Iran, qui inaugura la nationalisation du pétrole et qui sera aussi le pays sur qui la CIA inaugura son premier coup d’Etat contre Mossadegh (1953). Ce sont donc des facteurs purement politiques et non religieux ou autres qui sont à l’origine des alliances et des guerres actuelles. On comprend l’intérêt de certains à masquer ces facteurs. Il est vrai qu’il n’est pas agréable pour des dirigeants de paraître aux yeux de leur peuple comme des pleutres, en faisant appel pour leur sécurité à des puissances étrangères ou bien de trahir leur peuple dans l’unique but de garder le pouvoir.
Ainsi, les agressions dont été victimes les peuples et les pays de la région trouvent leurs origines dans la convoitise des richesses du sous-sol. Et pour perdurer et protéger lesdites richesses, l’Occident à l’aide de sa «riche» imagination mit en place des stratégies diverses et variées, allant de l’alliance «pacifique» à la trahison, en passant par les coups d’Etat. Mais pour réussir ces exploits, il a exploité habillement la chute de l’Empire ottoman en 1920. L’Occident commença par diviser entre deux puissances de l’époque, l’Angleterre et la France, des pays dont la civilisation se perd dans la nuit des temps. Et à l’intérieur de ces pays où cohabitaient une mosaïque d’ethnies et de religions, son cœur se pencha vers les grandes tribus des pays et la religion majoritaire qui habitait La Mecque et qui se trouve être, évidemment par hasard, dans un pays qui dormait sur un océan de pétrole. A la tête de ce pays, l’Angleterre avec son agent-espion qui aida le royaume d’Arabie à se libérer des Ottomans, aida à mettre sur le trône la tribu des Ibn Saoud, en 1936.
Ayant installé de solides liens avec le principal royaume, l’Angleterre essaima de petits émirats et autres royaumes comme l’Irak, la Jordanie et l’Egypte. Mais la Perfide et machiavélique Angleterre ne pensa pas à tout et, surtout, pas aux vents de l’histoire qui balayèrent certaines monarchies. Il se trouve que dans des pays au passé millénaire, Egypte, Syrie, Irak, sous l’empire ottoman, germait la Nahda, la renaissance qui allait renouer avec un passé prestigieux et préparer l’entrée dans l’époque moderne. Cette Nahda devient le vecteur qui renoue avec l’histoire prestigieuse mais aussi pour intégrer d’autres facteurs sociologiques comme les ethnies, les croyances religieuses (le christianisme est né dans la région et non une importation, comme le croient les imbéciles et les ignorants).
Voici donc la photo du Moyen-Orient dominé hier par l’Occident mais où de nos jours cohabitent deux mouvements politiques et idéologiques, des républiques issues des mouvements nationalistes et les monarchies féodales. Sans entrer dans les détails, les pays issus des mouvements nationalistes sont, depuis leur naissance, l’objet d’agressions de la part des Etats-Unis et d’Israël. En revanche, les monarchies du Golfe jouissent d’une paix royale sous la protection des Etats-Unis et la complicité intéressée d’Israël. Pour camoufler les relations secrètes avec Israël, ces émirs lâchaient quelques aides qui ne leur coûtaient pas grand’chose tant elles ne savent pas quoi faire de leurs dollars.
La différence de traitement de la part de l’Occident/Israël à l’égard des pays de la région n’est pas due au hasard.
Outre la dépendance des monarchies vis-à-vis de l’Occident pour leur sécurité et leur commerce, ces monarchies, qui se veulent des modèles de l’islam, partagent des affinités idéologiques avec les «mécréants» américains et européens. Leur idéologie nie les contradictions au sein des sociétés, donc la lutte des classes car, selon cette idéologie, les hommes seraient frères au sein de la oumma. En outre, les monarques privilégient, et même sacralisent, le commerce comme activité économique. Situation qui s’imposait à une époque pour des raisons évidentes comme ce fut l’agriculture pour l’aristocratie en Europe. De nos jours, ces pratiques économiques limitées seraient du simplisme. Les pays qui sont puissants sont à la fois producteurs de richesses et maîtres du commerce (voir Etats-Unis et Chine).
Voilà pourquoi, de nos jours, l’Occident chouchoute ces monarchies, arme des intégristes biberonnés au salafisme pour les envoyer à l’assaut des Républiques plus ou moins dictatoriales, des dictatures, certes, mais suffisamment patriotiques pour bouter hors du pays les occupants.
L’Occident aussi bien en Asie, au Moyen-Orient qu’en Afrique a connu et multiplié ses défaites pour avoir simplement misé uniquement sur la force brute et a méconnu la soif de dignité des peuples….
Si, en dépit de l’histoire, l’Occident continue de s’étonner de ses défaites, il faut se tourner, pour comprendre son aveuglement, vers Einstein qui écrivit : «La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent.» Ou bien encore : «Ne dit-on pas que l’erreur est humaine, la répéter à l’infini ne peut que produire des monstres ?»
A. A.
1- Les rois de Jordanie et du Maroc ont cette prétention. Il ne faut pas se laisser bluffer par leur «légitimité» construite sur le mensonge et éviter de parler donc de royaume chérifien, référence aux sharafs (nobles) descendants des prophètes. La légitimité de nos jours, sa source, c’est le peuple.
2- Voir le discours de Nasser sur l’appartenance arabe et africaine de l’Egypte.
3- Outre ses liens avec les monarchies, l’Occident trouve en Israël une sorte de base occidentale au Moyen-Orient. Les médias israéliens le chantent fièrement tous les jours pour différencier cet Etat, la seule «démocratie» de la région.
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