Des universitaires français dénoncent l’appui de Paris aux velléités marocaines
Par Houari A. – «A n’en pas douter, si la monarchie marocaine continue d’être soutenue par les autorités françaises dans ses velléités actuelles, en dépit flagrant du droit international, la situation risque de s’aggraver encore davantage au détriment de la stabilité de la région et, surtout, de la paix entre les peuples», ont mis en garde quatre universitaires français dans une tribune parue dans L’Humanité, intitulée «Algérie, Maroc : la guerre ou le droit ?» Les signataires de la réflexion, qui estiment que la France porte «une très lourde responsabilité», s’inquiètent de ce que «le spectre de la guerre refait surface en Afrique du Nord», soulignant qu’«un conflit armé entre l’Algérie et le Maroc apparaît maintenant possible».
«La vérité est que la guerre a déjà commencé en raison de l’incapacité de la communauté internationale, et de l’absence de volonté claire de la France en particulier, à faire valoir le droit international dans la région», déplorent les anthropologues Yazid Ben Hounet, Sébastien Boulay et Mark Drury et le sociologue Larbi Mehdi. «En novembre 2020, rappellent-ils, dans un relatif silence complice de nombreux médias, la République arabe sahraouie démocratique (Front Polisario) a dû reprendre les armes, après avoir attendu pendant près de trente ans le référendum d’autodétermination sur le Sahara Occidental, conformément à la résolution 690 du Conseil de sécurité de l’ONU du 29 avril 1991, et qui n’a jamais eu lieu.»
«Ce nouveau conflit armé a déjà généré ses crimes de guerre : entre autres, trois commerçants civils algériens tués par une attaque au drone attribuée au Maroc dans la bande libérée du Sahara Occidental, le 1er novembre 2021, 11 victimes civiles sahraouies le 17 novembre et, le 27 novembre, un adolescent sahraoui, tous bombardés par des drones de l’armée marocaine», précisent les auteurs de la tribune qui avaient déjà interpellé, en avril 2018, le président français sur la «lourde responsabilité de la France dans la non-décolonisation du Sahara Occidental». Ils reprochent à Emmanuel Macron de ne pas se conformer au droit international bien qu’il ait reconnu à Alger que la colonisation était un crime contre l’humanité.
Les universitaires français fustigent l’installation par la France d’une délégation de la Chambre française de commerce et d’industrie à Dakhla, «dans la partie illégalement occupée par le Maroc», d’avoir permis la «mise en place via l’Institut de recherche pour le développement (IRD) de partenariats scientifiques maroco-français couvrant le Sahara Occidental» et d’avoir ouvert une antenne du parti présidentiel, LREM, à Dakhla également. Pour eux, «ce positionnement, de fait, en faveur du Maroc, pour des raisons purement économiques et politiques, a conforté la monarchie marocaine dans ses velléités expansionnistes et illégales».
Qualifiant la normalisation entre Rabat et Tel-Aviv d’«accord entre colons», les universitaires français dénoncent «l’instrumentalisation du groupuscule MAK, Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie, dont le chef est domicilié en France, par la monarchie du Maroc, pour impulser un séparatisme en Algérie», saluant la réaction des autorités algériennes qui ont fait preuve de «retenue». «Mais pour combien de temps encore, sachant que le Maroc s’apprête à bâtir, en coopération avec Israël, une base militaire près de Melilla, à quelques encablures de l’Algérie ?» s’interrogent-ils, tout en alertant «à nouveau» les autorités françaises et la société civile en France, ainsi mises face à leurs responsabilités.
H. A.
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