Trêve des confiseurs
Par Ramdane Ahemouth – Ou trêve de plaisanterie. Excepté les vœux que les candidats déclarés ou non ne manqueront pas d’adresser aux Français à l’occasion des fêtes de fin d’année, après un long et horrible an pour tous, la campagne devrait, normalement, observer la trêve des confiseurs. Une coutume datant de la fin du XIXe siècle, censée depuis qu’elle a été instaurée suspendre les hostilités et les joutes politiques en cette période de Noël et d’avant l’an neuf.
Mais demeure tout de même cette lancinante question de savoir (si) cette séquence, plus propice aux retrouvailles familiales festives, ira dans le sens d’une prise de conscience des Français – hypnotisés par le miroir aux alouettes – sur le péril que fait peser la candidature du polémiste d’extrême droite sur la France, patrie de Voltaire, de Victor Hugo que Zemmour ne cite jamais(?), des droits de l’Homme, et désormais de la chimère.
Si le tartarin des quartiers huppés de Paris se dit être l’homme providentiel qui va régler la question de l’immigration, son principal et quasi unique thème de campagne, Eric Zemmour n’en est pas moins un danger désormais identifié pour la cohésion nationale, mettent en garde des pontifes des médias français hostiles à un radicalisé aux services de conventicules de racistes de tous bords, auxquels il faut ajouter les catholiques intégristes nostalgiques des lointaines croisades avec, comme entre autres objectifs communs, la restauration de l’ordre moral et social ancien, débarrassé de l’empreinte et de la menace migratoire.
Dans un monde où les rapports de force se font et se défont à grande vitesse, où de nouveaux coriaces acteurs internationaux émergent, outre le fait de faire courir un gros risque de guerre civile, l’éventuelle élection du petit polémiste sans réelle épaisseur ni envergure fragilisera et mettra sérieusement en péril les intérêts de la France dans le monde, notamment dans les pays arabes et musulmans, l’Algérie au premier chef, compte tenu de l’histoire, du présent, mais aussi de l’avenir.
Evoquant dans son livre sorti en 2016 une opération secrète dans les cartons ayant pour nom «Opération Ronces» qui viserait à reconquérir «ces terres perdues devenues étrangères», l’écrivain-businessman écrit : «Un nettoyage. C’est la bataille d’Alger qui recommencera.» Un «fantasme», avait catégoriquement réfuté l’état-major des Armées. C’est pourquoi nombre de commentateurs de bonne foi, et avec de très bonnes raisons, s’accordent à prévenir que si Eric Zemmour venait à être élu, le boycott de la France n’en serait pas moins de l’ordre de l’anecdote.
Ainsi que l’eut dit Paul Valéry : «Le mensonge et la crédulité s’accouplent et engendrent l’Opinion», ajoutons : destructrice, si la citation indiffère.
R. A.
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