Henri Pouillot administre une leçon sur la Guerre d’Algérie à Valérie Pécresse
Par Houari A. – C’est une véritable leçon d’histoire qu’Henri Pouillot a administrée à la candidate de droite à la présidentielle française. Dans une lettre ouverte «A propos des crimes contre l’humanité commis en Algérie», publiée sur son blog dans Mediapart, le militant anticolonialiste réagit aux propos de la disciple de Nicolas Sarkozy qui a affirmé qu’«en Algérie, il y a eu effectivement des exactions, il y a eu des pages sombres de l’histoire de France qui ont été écrites mais crimes contre l’humanité, c’est ce qu’on reproche aux nazis et à Hitler, et je ne pense pas qu’on puisse parler de crimes contre l’humanité».
«Je dois dire que je suis inquiet qu’une candidate à la présidence de la République puisse déclarer une telle énormité», écrit Henri Pouillot qui rappelle à la présidente du Conseil régional d’Ile de France avoir été affecté de juin 1961 à mars 1962 à la Villa Susini à Alger, «cette Villa [qui] a eu le privilège d’être un centre de torture qui a fonctionné pendant toute cette période», alors que «d’autres centres de torture à Alger n’ont fonctionné que quelques mois ou quelques années». «C’est là que Jean-Marie Le Pen s’est remarquablement distingué pendant la Bataille d’Alger, faisant disparaître, selon les rumeurs, des corps dans des cuves d’acide», poursuit-il, en ajoutant que la Légion étrangère avait «abrité de nombreux SS qui s’y étaient réfugiés pour échapper aux jugements, mais qui ont mis en œuvre leur expérience et formé des tortionnaires français».
L’auteur de Mon combat contre la torture joint à la négationniste Pécresse son livre de témoignage sur cette «triste expérience» qu’il a vécue dans cette villa. «Je vous invite aussi à visiter mon site qui devrait vous permettre de combler une partie de vos lacunes au sujet de cette période», blâme-t-il, en interrogeant la mauvaise élève : «Comment pouvez-vous dire, compte tenu de la pratique institutionnalisée de la torture, qu’il ne se serait pas commis de crimes contre l’humanité ?» «En 2002, explique-t-il, dans le cadre des émissions qui allaient éclairer la commémoration du 40e anniversaire de la fin de cette guerre, un documentaire, essentiellement tourné à la Villa Susini – dans lequel je témoigne – est passé sur France 2 relatant justement ces tortures et tout particulièrement les viols massivement utilisés alors.»
«Mais il n’y a pas eu que ce type de crimes contre l’humanité commis au nom de la France. La liste est longue : il y a eu aussi les crevettes Bigeard, les camps d’internement pudiquement appelés de regroupement – à ce sujet, le rapport Rocard établi avant la fin de cette guerre dénombrait déjà plusieurs centaines de milliers de morts», souligne encore l’ancien appelé du contingent, qui rafraîchit la mémoire de la potentielle future présidente de la France : «Il y a eu aussi ces crimes de guerre comme les villages rasés au napalm : les historiens estiment entre 600 et 800 villages.» «Sur mon site, lui dit-il, vous trouverez le reportage que j’ai fait quand j’ai découvert les ruines de ce village de Zaâtcha, village alors de 800 habitants, dès novembre 1954. Dans les crimes de guerre, il y a aussi l’utilisation du gaz VX et sarin, les essais nucléaires au Sahara, etc.» «Il y a eu également ces crimes d’Etat – même si dans ce cas il n’y a pas eu de définition juridique – commis à Paris le 17 octobre 1961 et le 8 février 1962 où la décision de répression a été prise en Conseil des ministres», indique encore Henri Pouillot à l’adresse de celle qui veut «ressortir le Karcher remisé à la cave» depuis l’ère Sarkozy.
«Cette liste n’est malheureusement pas exhaustive», regrette Henri Pouillot qui juge les propos de la femme politique française «inacceptables». «D’autant plus, déplore-t-il, pour une candidate à la fonction suprême à la présidence de la République». «Un tel négationnisme est comparable à celui de Jean-Marie Le Pen considérant que les chambres à gaz sont un point de détail de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale», conclut l’ingénieur français.
H. A.
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