Une enquête révèle les graves dérives de la diplomatie française en Afrique
Par Mohamed El-Ghazi – Une enquête publiée sur le site Média TV vient de jeter un pavé dans la mare en révélant les exploits peu glorieux des ambassadeurs de la France en Afrique. Sous le titre «En Afrique, le déshonneur de nos ambassadeurs», le journaliste Thomas Dietrich relate les scandales cachés des diplomates français, présents et passés, en Afrique. «Soutien aux dictateurs, affairisme, trafic de visas et même complicité d’assassinat, les ambassadeurs de France se retrouvent souvent dans de beaux draps», écrit Thomas Dietrich. Ce dernier affirme que les relations entre la France et le Mali se sont détériorées depuis août 2020. «Il y avait un président très francophile, ami de la France, Boubacar Keïta, lequel a été renversé par une junte. Cette dernière a eu le malheur de se rapprocher des Russes, ce qui fait qu’elle cristallise toutes les critiques d’une certaine classe politique française.»
Alors que l’ambassadeur français vient d’être expulsé, l’enquête illustre le mépris, l’arrogance et le paternalisme de la France vis-à-vis des peuples de l’Afrique. Le rapprochement du gouvernement malien actuel de la Russie fait craindre à la France la perte de sa chasse gardée. «On ne critique pas la junte malienne parce qu’elle fait preuve de moins de démocratie ou parce qu’elle est venue de manière illégitime au pouvoir. On n’a jamais hésité en France à composer avec des dictateurs !» affirme Thomas Dietrich sur une vidéo, dénonçant le «naufrage de notre diplomatie française, de nos diplomates qui n’ont pas pu sauver l’image de la France en Afrique et qui l’ont même ternie».
Thomas Dietrich fait remarquer que les ambassadeurs de France en Afrique pouvaient être «plus puissants que les présidents locaux». Les ambassadeurs interventionnistes existent encore, ajoute le journaliste qui les décrit comme étant «les portes-flamme d’une France-Afrique qui est en train de mourir», donnant l’exemple de Bernard Cochery, le symbole de ces ambassadeurs «très dirigistes» au Tchad. Bernard Cochery qui continue à faire un travail très conséquent, en coulisses, pour soutenir «la transition tchadienne, laquelle n’est pas un putsch pour la France», rappelle Dietrich.
Pour le journaliste, Marc Fonbaustier restera dans les annales de la diplomatie française. Marc Fonbaustier était consul à Hong Kong. Il a été rappelé à Paris pour avoir «piqué deux bouteilles de vin de grands crus, dans une soirée, planqué dans son pantalon et s’est barré avec». Il a fini par atterrir en Guinée et s’est adonné aux basses besognes.
Selon Dietrich, la diplomatie économique a pris le pas sur celle des droits de l’Homme. «Nos ambassadeurs servent beaucoup plus les groupes français que la France», fait-il savoir. Il donne quelques exemples comme celui de l’ambassadeur de France en Ouganda, Jules-Armand Aniambossou qui favorise les desseins de Total. Même chose au Mali et en Côte d’Ivoire où un ambassadeur français du nom de Jules Berson, un ancien de Saint Cyr, qui a été mis d’office à la retraite pour violences sexuelles, favorisait les sociétés françaises pour des contrats mirobolants.
Certains d’entre eux se sont reconvertis dans le domaine privé. «On se sert avant de servir la France», clame-t-il, en citant l’exemple «de Jean-Marc Simon qui était ambassadeur en Côte d’Ivoire et au Nigéria. Il a permis le renversement de Gbagbo et l’installation de Ouattara. Il a fondé son entreprise qui aide les sociétés françaises à s’installer en Afrique et bénéficient d’une entrée privilégiée avec le président Ouattara».
Dans l’enquête, il raconte les délits commis par certains ambassadeurs. L’exemple de Charles Malinas est des plus étonnants. «En poste en Centrafrique, il faisait le commerce des visas, même avec des terroristes, en contournant les voies officielles. Il a été mis à la retraite sans être inquiété.»
La voyoucratie de certains ambassadeurs français est allée très loin même. Bruno Foucher, un agent de la DGSE, ambassadeur français au Tchad de 2006-2011, «a couvert l’assassinat d’un opposant tchadien Ibni Oumar Mahamet Saleh». «Voici, les bassesses dont sont capables certaines personnes pour défendre les intérêts de la France».
«Aujourd’hui, la diplomatie française est dépassée. Jean-Yves Le Drian ne comprend pas qu’on ne peut plus agir comme au temps des réseaux Foccart. L’Afrique a changé. Il y a eu l’irruption des peuples. Les gouvernements successifs ne sont plus dociles vis-à-vis de la France. On n’est plus les maîtres du jeu», conclut Thomas Dietrich.
M. E.-G.
Comment (18)