L’Italie mesure les risques d’un conflit en Ukraine sur son approvisionnement en gaz
De Rome, Mourad Rouighi – En parcourant les principaux titres des médias de la Péninsule, l’on ne peut que déceler ce sentiment diffus d’inquiétude parmi les opérateurs du secteur énergétique, des retombées négatives d’un conflit qui viendrait à éclater en Ukraine sur l’économie du pays.
Les déclarations faites par les dirigeants américains et européens de promettre des sanctions sans précédent à l’égard de Moscou en cas d’invasion du territoire ukrainien ont eu l’effet d’une bombe sur le conglomérat industriel italien.
Selon le quotidien la Repubblica, le président Vladimir Poutine ne manquera pas d’utiliser son influence sur le marché énergétique international, en commençant par une réduction intentionnée des contrats de fourniture liant la Russie avec certains pays d’Europe, de l’Est comme de l’Ouest.
Et en Italie, le ministre des Activités productives, Giancarlo Giorgietti, a décidé d’anticiper à la semaine prochaine la réunion du Comité d’urgence et d’évaluation du marché gazier.
La rencontre était initialement fixée pour début avril, ce qui démontre que Rome prend très au sérieux les bruits de bottes entre Moscou et Kiev.
Et selon des sources bien informées, la réunion évaluera l’impact de la baisse des importations en provenance de Russie sur l’approvisionnement italien et analysera la situation et les mesures à adopter pour faire face à cette situation nouvelle, y compris l’appel du gouvernement lancé aux sociétés italiennes importatrices de porter le volume de leurs importations à un niveau maximum.
De même que nombre d’experts soulignent que l’Italie paiera, encore une fois, sa décision de renoncer définitivement à l’énergie nucléaire, ce qui la rend très vulnérable aux moindres soubresauts du marché mondial.
Quant aux dirigeants d’ENI, tout en rappelant que le deuxième fournisseur en gaz de l’Italie, l’Algérie (22% du total des importations italiennes) pouvait suppléer à ce manque temporaire, ils préfèrent que ces deux sources d’approvisionnement (Russie et Algérie) soient renforcées et garanties. Et selon il Sole 24 Ore, organe officiel du patronat, l’Italie va sans doute devoir puiser sérieusement dans ses réserves stratégiques.
«Sans les importations de gaz, Rome a à peine quinze jours d’autonomie, tout en ajoutant qu’en cette période de froid glacial qui traverse toute la péninsule, l’Italie consomme environ 400 millions de mètres cubes/jour, que le pays a des réserves avoisinant les 7 milliards de mètres cubes, ce qui, en théorie, lui permet de résister 15 jours, sans importations de l’étranger.»
«La situation est donc sérieuse, mais elle n’est pas encore grave, il n’y a pas que le gaz russe, il y a aussi le gaz algérien, norvégien, hollandais et celui produit en Italie.
Probablement le gouvernement de Mario Draghi devra se résigner à mettre les sociétés importatrices dans les semaines prochaines, en compétition, pour s’assurer la rallonge d’importation, qu’elles devront négocier avec les colosses gaziers internationaux que sont Sonatrach, Shell, Equinor, etc.»
L’Exécutif italien aura également à anticiper certaines éventuelles dérogations à son approvisionnement, et ce en prévision du dénouement de la crise ukrainienne qui semble ouverte à tous les scenarii.
M. R.
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