Le Washington Institute : «La guerre en Ukraine inaugure le retour de l’Algérie»
Par Abdelkader S. – «L’Algérie ne s’engage presque jamais dans une diplomatie de contrepartie ; une fois qu’elle adopte une position de politique étrangère, elle a tendance à tenir bon», écrit le politologue américain Geoff Porter dans une étude publiée par le Washington Institute. «Le plus souvent, cette position consiste à se présenter comme un arbitre neutre des conflits internationaux plutôt que sur le choix de camp. La guerre en Ukraine n’est pas différente – Alger s’efforcera de rester complètement à l’écart de la crise», souligne-t-il.
«Compte tenu de cette réticence à s’engager dans la diplomatie transactionnelle, les Etats-Unis et l’Union européenne ont peu d’options pour obtenir ce qu’ils veulent d’Alger», constate le président de North Africa Risk Consulting, selon lequel «Alger progresse en matière de politique étrangère, après avoir stabilisé sa situation intérieure». «Un torrent de diplomates a cherché à s’exprimer avec le président Tebboune, dont le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, en janvier, le ministre italien des Affaires étrangères, Luigi Di Maio, en février, et deux visiteurs clés ce mois-ci : la secrétaire d’Etat-adjointe américaine, Wendy Sherman, et le ministre portugais des Affaires étrangères, Augusto Santos Silva», note le professeur de sciences politiques à l’Université Fordham. «Après la visite […] du secrétaire Blinken le 30 mars, le Premier ministre français Jean Castex se rendra à Alger dans les prochaines semaines(*), tandis que le ministre algérien des Affaires étrangères Ramtane Lamamra est attendu à Washington en avril», ajoute-t-il.
L’analyste américain explique que «le principal moteur de ces visites est le rôle de l’Algérie en tant que fournisseur d’énergie de l’Union européenne». «Washington et les capitales européennes, précise-t-il, veulent avoir l’assurance que même si le gouvernement de Tebboune ne se révèle pas disposé à augmenter ses exportations, il livrera de manière fiable les quantités auxquelles il s’est déjà engagé, en particulier si les approvisionnements russes sont perturbés.» Cependant, Geoff Porter affirme qu’«il est peu probable que l’Algérie comble les lacunes en matière d’approvisionnement énergétique» car l’Algérie, souligne-t-il, ne prendra pas de mesures qui «donnent l’impression de choisir un camp» contre un autre dans le conflit qui oppose la Russie à l’OTAN conduite par les Etats-Unis par régime ukrainien interposé.
«Alors que la Tunisie dérive vers l’autoritarisme, que la Libye s’achemine vers une guerre civile et que le Mali est confronté à une instabilité intensifiée, les Etats-Unis devraient reconnaître la valeur de la stabilité politique et économique retrouvée de l’Algérie», conseille l’auteur de l’étude, qui dirige North Africa Risk Consulting, une officine spécialisée dans les risques politiques et la sécurité dans le secteur des hydrocarbures en Afrique du Nord.
A. S.
(*) La visite du Premier ministre français, prévue le 20 mars, puis décalée au 31 du même mois, a finalement été reportée sine die pour cause de mauvais timing qui coïncide avec les élections présidentielles en France, selon certaines sources. Mais la véritable raison ne serait pas du tout liée à cette échéance politique, selon d’autres sources proches du dossier.
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