L’Occident et les pays arabes coalisés coupables de génocide des Yéménites
Une contribution de Khider Mesloub – Le secrétaire général adjoint de l’ONU pour les Affaires humanitaires, Martin Griffiths, a déclaré que la guerre au Yémen continue de menacer des millions de vies à travers le pays. «Et pour l’instant, cette crise ne montre aucun signe d’apaisement», a-t-il précisé devant le Conseil de sécurité. Au contraire, ces deux derniers mois, la guerre, dans l’indifférence générale, a pris une dimension génocidaire du fait des dommages collatéraux sur les populations. Actuellement, contrairement aux Ukrainiens massivement et promptement aidés par les pays occidentaux, les populations civiles yéménites sont toujours livrées à elles-mêmes, sans aucune possibilité de fuir leur pays soumis à une avalanche de missiles américano-britanniques tirés par la coalition arabe dirigée par l’Arabie Saoudite.
«Nous avons assisté au cours des six dernières semaines à une escalade brutale et dangereuse du conflit. Cela a eu des conséquences dévastatrices pour les civils et les infrastructures civiles», a ajouté Martin Griffiths.
Selon les statistiques de l’ONU, dix-neuf millions de Yéménites sont considérés comme affamés, dont 160 000 confrontés à des «conditions proches de la famine». En outre, plus de 400 000 Yéménites sont décédés au cours de l’actuelle barbare guerre livrée par la coalition des pays arabes dirigée par l’Arabie Saoudite. Or, malgré les millions de Yéménites affamés et le presque demi-million de morts, selon les médias occidentaux, l’Ukraine constitue actuellement la pire zone de conflit au monde.
Par ailleurs, alors qu’en quelques jours des milliards de dollars ont été débloqués par l’ensemble des pays occidentaux pour soutenir militairement l’Ukraine et aider humanitairement les réfugiés ukrainiens, les Nations unies peinent à réunir 4,3 milliards de dollars pour le Yémen en proie à la famine. En effet, le secrétaire général adjoint de l’ONU pour les Affaires humanitaires, Martin Griffiths, a appelé vainement les donateurs à débloquer près de 4,3 milliards de dollars pour venir en aide à 19 millions de personnes au Yémen, confrontées à la faim, aux maladies ou à d’autres dangers mettant leur vie en péril.
Près des trois quarts de la population auront besoin d’une assistance humanitaire en 2022, selon Martin Griffiths. «C’est cette proportion qui nous fait dire que la situation humanitaire au Yémen est parmi les pires au monde», a-t-il dit en conférence de presse. L’appel de l’ONU est d’autant plus urgent que les fonds dont disposent les organisations humanitaires sont en voie de tarissement. «Les agences sont obligées de réduire ou d’arrêter la distribution d’aide alimentaire, ainsi que la mise à disposition des services de santé et d’autres aides vitales», a déploré Martin Griffiths. «Aujourd’hui, nous espérons réunir les fonds nécessaires pour réalimenter la chaîne d’acheminement des denrées alimentaires, approvisionner les centres de santé, pour fournir un abri aux personnes déplacées et faire savoir aux Yéménites que nous ne les oublions pas», a-t-il lancé.
Sans injection de l’argent dans la caisse de l’organisation humanitaire de l’ONU, près de 4 millions de personnes n’auront plus d’eau potable à boire. En effet, des millions de Yéménites n’ont toujours pas accès à l’eau potable, à l’assainissement et aux sanitaires, provoquant l’apparition du choléra. En raison de la malnutrition, de multiples maladies mortelles se sont également propagées. Ce faisant, réduits à vivre comme des bêtes, dans l’indifférence de la bonne conscience universelle occidentale et arabe toujours prompte à s’émouvoir de la disparition de quelques richissimes célébrités musicales, cinématographiques ou footballistiques, à quelques encablures des pays musulmans du Moyen-Orient les plus riches au monde, de nombreux Yéménites continueront à périr.
Par ailleurs, dans cette période marquée par l’exacerbation des tensions inter-impérialistes, le renchérissement des matières énergétiques, la flambée du prix du pétrole, provoquée par l’embargo sur le pétrole russe, la situation des Yéménites pourrait s’aggraver. Particulièrement depuis que les Etats-Unis ont décidé de ménager l’Arabie Saoudite pour atténuer la crise du prix du pétrole. En effet, le président Biden a fait pression pour inciter Riyad à augmenter sa production de pétrole brut afin d’abaisser les prix du carburant (pour les consommateurs occidentaux, dont le mécontentement croissant menace la stabilité sociale). Joe Biden n’ignore pas que, pour obtenir satisfaction auprès de Riyad, il doit intensifier son soutien à la guerre de l’Arabie Saoudite au Yémen. Incontestablement, à la faveur de la crise pétrolière actuelle, désormais, dans ce dossier de la guerre au Yémen, l’Arabie Saoudite est en position de force. Elle a les mains libres. Le feu vert occidental de poursuivre sa guerre génocidaire au Yémen.
Rappelons que c’est dans le sillage des «Printemps arabes» des années 2010 que les forces houthistes, à la faveur des manifestations antigouvernementales et anticorruption, avaient conquis une grande partie du pays en 2014. De guerre civile opposant les rebelles chiites houthistes aux partisans d’Abd Rabbo Mansour Hadi, le président du Yémen, exilé en Arabie Saoudite en 2015, le conflit avait pris une dimension internationale en mars 2015. En effet, c’est à cette date que la coalition sunnite des pays arabes dirigée par l’Arabie Saoudite s’était constituée pour intervenir militairement au Yémen en vue de rétablir Abd Rabbo Mansour Hadi dans ses fonctions. Des potentats moyenâgeux des Emirats arabes unis, du Koweït et du Qatar figurent parmi les membres de cette coalition génocidaire, de même le dictateur égyptien Al-Sissi, l’ex-président islamiste soudanais, Al-Bashir. Tous ces tyrans criminels sont appuyés par les puissances impérialistes, notamment la France, par leur soutien logistique et militaire. L’Iran participe également à cette curée géopolitique, elle qui tisse sa toile impérialiste autour de l’Orient et de l’Afrique.
Précisément, c’est pour contrer l’influence grandissante de l’Iran dans ces régions stratégiques, notamment au Yémen, que l’Arabie Saoudite se résolut à lui couper l’herbe sous les pieds, avant de lui décapiter bientôt sa tête en la supprimant de la carte géographique avec l’aide des Etats-Unis, déterminés à engager une guerre exterminatrice contre l’Iran. En effet, l’Arabie Saoudite craint surtout l’encerclement de son territoire par l’Iran, dont l’emprise s’étend des frontières turques jusqu’au Liban, en passant par la Syrie et le golfe d’Aden au Yémen. L’expansion géostratégique et l’accroissement de l’influence régionale de l’Iran inquiètent au plus haut point l’Arabie Saoudite, ennemie invétérée des Chiites et, par extension, des houthis.
Le houthisme est une nébuleuse organisation chiite revivaliste apparue dans les années 1990, baptisée Forum des jeunes croyants. Les Iraniens le désignent sous le nom d’Ansar Allah (les partisans d’Allah). Le mouvement houthiste est très proche de l’Iran et du Hezbollah. Les houthis, ces seigneurs de la guerre sainte, sont réputés pour leur sagesse belliqueuse. En décembre 2017, quand l’ancien président Ali Abdallah Saleh s’était détourné de l’Iran et des houthis pour se rallier à l’Arabie Saoudite, il a été religieusement assassiné, rappelant ainsi les exécutions de la CIA commis dans les années soixante, méthode très employée également par le Hezbollah.
Par ailleurs, dans cette guerre génocidaire perpétrée contre les Yéménites, de nombreuses victimes civiles sont tuées par des armes vendues par la France à l’Arabie Saoudite. En effet, le royaume saoudien a acheté pour plusieurs milliards d’euros de matériel de guerre français. Des armes françaises ont été trouvées au Yémen. La France compte parmi les pays impliqués dans cette guerre génocidaire, en fournissant des armes à l’Arabie Saoudite.
Ainsi, pendant que les «citoyens humanistes» occidentaux défilent dans les rues contre la guerre en Ukraine, ils continuent à observer le même criminel silence complice devant le massacre génocidaire perpétré contre les Yéménites par les armes et les gouvernants de leurs respectifs pays : Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, etc. Aux yeux des Occidentaux, le massacre génocidaire de 400 000 Yéménites s’apparente à un épiphénomène. Mais la mort de quelques centaines d’Ukrainiens à une tragédie. Comment pourrait-on qualifier cet humanitarisme à géométrie variable, sinon de racisme ontologique européen invariable ?
Tous les jours, dans toutes les écoles et sur de nombreuses chaînes de télévision du monde entier, on fait verser des océans de larmes de lamentations aux enfants et aux téléspectateurs pour le génocide des juifs commis au siècle dernier – génocide barbare commis par le capitalisme, dans sa phase de militarisation totalitaire de la société et de guerre totale exterminatrice, comme celle que l’on vit actuellement avec la résurgence de la barbarie guerrière en pleine Europe –, et depuis peu pour le massacre des populations ukrainiennes, mais l’holocauste des Yéménites exécuté à notre époque ne suscite qu’indifférence.
A croire que la vie d’un Yéménite vaut moins qu’un shekel israélien, un animal ukrainien.
K. M.
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