Pourquoi Ben Zayed a-t-il si peur qu’un Algérien représente l’ONU en Libye ?
Par Nabil D. – Le travail de sape dont a été victime l’actuel ministre des Affaires étrangères à New York est en train de se répéter. Pour la seconde fois, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a jeté son dévolu sur un diplomate algérien pour conduire la difficile transition en Libye après l’échec de l’Américaine Stéphanie Williams, mais les Emirats opposent leur «veto» et travaillent en coulisses à empêcher la désignation de Sabri Boukadoum. Le même scénario se reproduit deux ans plus tard, alors qu’aucun élément ne vient rassurer quant à l’évolution de la situation chez le voisin de l’Est.
En avril 2020, Ramtane Lamamra avait fini par jeter l’éponge avant même d’être officiellement désigné en Libye en remplacement de Ghassan Salamé. «Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a pris l’initiative, le 7 mars 2020, de me proposer personnellement le poste de représentant spécial et chef de la Mission d’appui des Nations unies en Libye. J’ai donné mon accord de principe dans un esprit d’engagement en faveur du peuple libyen frère ainsi qu’envers les organisations universelles et régionales concernées par la résolution de la crise libyenne», avait déclaré Ramtane Lamamra. «Les consultations d’usage auxquelles procède Guterres depuis lors ne semblent pas susceptibles d’aboutir à l’unanimité du Conseil de sécurité et d’autres acteurs qui est indispensable à l’accomplissement de la mission de paix et de réconciliation nationale en Libye», avait-il indiqué sans plus de précisions.
Algeriepatriotique avait, auparavant, fait état des manœuvres menées dans les coulisses par les Emirats arabes unis, l’Egypte et le Maroc pour empêcher la désignation du diplomate algérien auquel ils préféraient un ancien ministre jordanien de l’Intérieur acquis aux thèses émiraties en Libye. Le journal français Le Monde avait confirmé cette information en soulignant que Washington avait pris parti pour son allié du Golfe et fait barrage à la désignation de Ramtane Lamamra. «Le retrait de Ramtane Lamamra est moins un désaveu pour l’Algérie qu’un échec cuisant pour les Nations unies», avait confié une source proche du dossier, selon laquelle «la Libye perd ainsi un médiateur qui aurait pu jouer un rôle déterminant dans les efforts de sortie de crise, d’autant qu’il jouit du respect de toutes les parties au conflit dans ce pays meurtri par une guerre civile qui n’a que trop duré».
A la place de Ghassan Salamé, qui a admis son incapacité à résoudre l’inextricable équation libyenne, Mohamed Ben Zayed s’échine à placer un pion à sa solde, l’ancien ministre jordanien de l’Intérieur, Samir Habachna, que les médias émiratis affublent de tous les mérites, le décrivant avec emphase comme une «personnalité consensuelle» et «jouissant de la confiance et de l’estime de tous les Libyens». Quatorze membres du Conseil de sécurité avaient abdiqué devant Washington qui a opposé son veto de façon implicite en s’alignant sur son confédéré du Golfe contre la volonté de l’écrasante majorité au sein de l’organe exécutif de l’organisation internationale.
«Le cas Lamamra devrait inciter les pays membres de l’ONU à en accélérer la réforme pour en finir une fois pour de bon avec les mécanismes archaïques qui continuent de la régir depuis soixante-quinze ans», avait relevé notre source, convaincue que, dans les coulisses des Nations unies, ce énième coup de force des Américains allait avoir forcément des conséquences sur le fonctionnement aberrant de l’ONU. Depuis, le monde a connu d’immenses bouleversements, mais l’organisation internationale demeure figée, n’aidant pas à résoudre les nombreux problèmes qui secouent le monde, concourant même à les aggraver.
N. D.
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