Des sources marocaines «autorisées» nient : le roi ne se rendra pas à Alger
Par Kamel M. – Des sources marocaines «autorisées» ont démenti l’information rapportée il y a quelques jours par Jeune Afrique, selon laquelle Mohammed VI représenterait le Maroc en personne au Sommet de la Ligue arabe prévu à Alger les 1er et 2 novembre prochains. D’après ces sources, qui se sont confiées à un média marocain repris par le journal arabophone londonien Al-Quds Al-Arabi, le Maroc sera représenté par le Premier ministre, Aziz Akhannouch, et le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita.
L’information avait été présentée comme un scoop. Contre toute attente, Mohammed VI avait été annoncé à Alger. Cette «révélation» avait suivi celle, faite par les Marocains également, à peine un ou deux jours auparavant, faisant état de la visite du ministre de la Justice, Abderrachid Tebbi, à Rabat où il avait remis l’invitation au souverain marocain pour se rendre chez le voisin de l’Est, qualifié d’«ennemi» par l’ancien consul général du Maroc à Oran.
C’est au magazine pro-Makhzen qu’avait échu la mission d’informer les Algériens que le roi du Maroc «honorera» l’Algérie de son «auguste» présence à la réunion des dirigeants arabes, puisque ce déplacement s’inscrit dans un cadre multilatéral et n’engage en rien Rabat dans une quelconque entreprise de «réconciliation». Pourtant, les observateurs étaient unanimes à prédire une exploitation de ce rendez-vous par la partie marocaine pour régler ses comptes avec le pays hôte, Mohammed VI ou son représentant, comptant bien sauter sur cette occasion inespérée pour «narguer» les responsables algériens sur leur propre territoire, couvert par l’extraterritorialité que leur confère le Sommet.
La divulgation de la «décision» des Marocains de faire faire à leur souverain le voyage «périlleux» à Alger est l’œuvre des services secrets marocains, avaient compris les fins connaisseurs du dossier algéro-marocain. Elle vise, en premier lieu, à montrer que c’est le Makhzen «pacifiste» qui tend la main, encore une fois, à l’Algérie «belliqueuse». Pourtant, on se souvient de la réaction complètement contradictoire du ministre marocain des Affaires étrangères qui criait au micro de la chaîne d’information du Quai d’Orsay France 24 le refus de son pays de participer à une conférence à laquelle l’Algérie a fixé la date «à sa guise», en «foulant aux pieds» les lois internes de la Ligue arabe dont les Sommets se tiennent au mois de mars.
Que s’est-il passé dans l’intervalle pour que le régime marocain change d’avis ? A priori, rien. Aussi avait-on compris de ce côté-ci de la frontière que la nouvelle «sensationnelle» donnée en exclusivité par le média des Ben Yahmed n’était qu’un ballon de sonde à l’effet de jauger la réaction d’Alger – coïncidemment avec le déroulement du tapis rouge au patron de l’armée marocaine en Israël –, qui l’a considérée, encore une fois, comme un non-événement, les Algériens étant habitués aux simagrées et aux contorsions d’un régime monarchique fourbe et indigne de confiance.
Il va sans dire que Mohammed VI et son régime ne pouvaient prendre une telle décision sans en référer à Tel-Aviv qui, faut-il le rappeler, s’était sérieusement inquiété de la visite du ministre algérien de la Justice au Maroc, une visite qui «tombait mal» en ce qu’elle coïncidait avec une grave crise entre les régimes marocain et israélien sur fond d’un retentissant scandale qui a éclaboussé la représentation diplomatique israélienne à Rabat. Les Marocains se rendent de plus en plus compte que la relation nouée par le Makhzen avec l’entité sioniste, non seulement est à sens unique mais, plus grave, démontre que le pouvoir monarchique marocain s’est officiellement vassalisé à l’Etat hébreu.
Les médias israéliens s’étaient littéralement «rués» sur le communiqué du gouvernement marocain annonçant la visite d’Abderrachid Tebbi à Rabat, une annonce précipitée, comme si le Makhzen coulant à pic s’accrochait à une brindille en voulant instrumenter cette mission et la présenter comme un «réchauffement» dans les relations entre les deux pays. «Il n’en est absolument rien», avaient assuré des sources algériennes proches du dossier. «Ce n’est pas un ministre algérien mais le représentant d’un Etat membre de la Ligue arabe qui se rend dans un autre pays membre de la Ligue arabe, il y a un distinguo à établir entre les relations bilatérales et un événement multilatéral», avaient corrigé nos sources, en rappelant que l’Algérie avait participé à deux sommets arabes tenus au Maroc alors que les relations diplomatiques étaient rompues.
«Un tel événement aurait été ordinaire dans un contexte autre que celui qui prévaut en ce moment, mais il revêt un caractère particulier à l’heure actuelle», commentaient des médias israéliens et franco-israéliens. «La question se pose néanmoins de savoir pourquoi Alger a dépêché son garde des Sceaux et non pas le ministre des Affaires étrangères», s’interrogeait-on encore à Rabat et Tel-Aviv. «Le président algérien sait que Ramtane Lamamra n’aurait pas été accueilli par les autorités marocaines en raison de ses prises de position hostiles au Maroc», avait-on allégué.
«Ramtane Lamamra n’est pas un surhomme pour pouvoir effectuer au moins vingt-deux voyages en un temps record et le ministre de la Justice préside aux destinées d’un portefeuille régalien dans le gouvernement», avaient rétorqué des sources informées qui expliquaient cette nouvelle chicane du régime marocain par «sa persévérance maladive dans sa politique puérile, fondée sur la sempiternelle auto-victimisation au travers de laquelle il a, du reste, justifié sans même un soupçon de scrupule la normalisation de ses relations avec Israël», avaient expliqué nos sources.
K. M.
Comment (66)