Quand cyniquement la politique d’austérité est baptisée plan de sobriété
Une contribution de Khider Mesloub – A l’époque antique, déjà Platon soulignait que «la perversion de la cité commence par la fraude des mots». Son quasi-contemporain philosophe chinois Confucius écrivait : «Lorsque les mots perdent leur sens, les gens perdent leur liberté.» Actuellement, la classe dominante européenne sénile et décadente, faute de révolutionner les forces productives atones pour nourrir sa population précipitée dans la paupérisation généralisée et la frigorification résidentielle, transforme constamment sa sémantique pour alimenter le peuple en souffrance de termes euphémistiques, censés moderniser la société. Illusoire moyen lexical littéralement créatif pour tenter de perpétuer son système en pleine déliquescence.
Ainsi, pour mystifier leurs peuples respectifs, la maffia gouvernementale européenne fabrique à profusion de nouveaux termes afin de doter la vétuste réalité sociale, effroyablement délabrée, d’un langage prétendument moderne. Cette novlangue a pour dessein de reconfigurer la même misère par l’esthétisation lexicale, de régénérer artificiellement la même réalité par le badigeonnage terminologique. La bourgeoisie occidentale, au lieu de soigner les maux, préfère créer de nouveaux mots pour maquiller linguistiquement la réalité, travestir lexicalement l’existence. Cette chirurgie esthétique lexicale tente de redonner une nouvelle jeunesse à une réalité tailladée par les injustices sociales, entaillée par la lutte des classes, secouée par les bruits de bottes.
Ce n’est pas le lieu ici d’inventorier l’ensemble des néologismes euphémistiques, souvent inventés pour atténuer ou mystifier une réalité effroyablement épouvantable. Pour détourner la réalité, contourner un problème, la classe dominante occidentale se paye de(s) mots. Elle préfère dire «croissance négative» pour éviter le terme de récession. «Technicienne de surface» au lieu de femme de ménage. Facteur se dit aujourd’hui «préposé aux postes». L’aveugle un «non-voyant», le sourd un «non-entendant», un coiffeur, un «visagiste capillaire», un chômeur, un «demandeur d’emploi». Le terme bourgeois a été banni du langage (car il fait sale : effectivement le bourgeois est moralement sale). Prolétaire est devenu une honte, une insulte (on avait «salaud de pauvre», aura-t-on bientôt «canaille de prolétaire» ?).
Dernière lubie des lexicographes du sérail gouvernemental français, l’invention du terme «sobriété» pour baptiser la nouvelle politique spartiate imposée aux prolétaires.
Camus avait écrit que mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. Les mots ne sont jamais neutres, plus particulièrement de nos jours où la classe dominante occidentale ne manque pas d’imagination pour redorer son «blason lexicographique», faute de rehausser sa crédibilité, recouvrer sa dignité, si tant est qu’elle en ait acquis un jour cette vertu.
Ainsi, par une opération de prestidigitation lexicale rondement bien exécutée par les saltimbanques de l’Elysée (qui consonne avec sales banquiers), une politique d’austérité est baptisée politique de sobriété.
«Les cons, ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît», a dit Michel Audiard dans Les Tontons flingueurs. Comment une politique d’austérité, voire d’hostilité, peut-elle être nommée politique de sobriété ? Les flingueurs de vie de l’Elysée osent tout, y compris l’outrance verbale pour masquer leur politique létale.
Une chose est sûre : en Occident, en particulier en Europe, sous couvert de politique de sobriété, aujourd’hui la guerre sociale, entamée à la faveur de la pandémie, menée par la classe dominante contre le prolétariat, se poursuit par l’orchestration des pénuries des produits essentiels. Et surtout le renchérissement des tarifs des matières énergétiques, ces inflations spéculatives infamantes et affamantes.
Ces politiques antisociales étatiques européennes pourraient être qualifiées de terrorisme social, perpétré par les fanatiques gouvernants capitalistes contre le prolétariat, précipité dans l’insécurité alimentaire structurel et un état de frigorification résidentielle permanent.
Assurément, en Occident, singulièrement en Europe, on est passé d’une société gouvernée par un Etat tuteur à une société administrée par un Etat tueur. De l’Etat providentiel à l’Etat létal. De l’Etat protecteur à l’Etat exterminateur. Une Europe, fanatiquement radicalisée et politiquement fascisée, dirigée par des scélérats et des psychopathes prêts à euthanasier socialement les peuples, le prolétariat, par la destruction de leurs conditions de vie et les massacres de masse provoqués par les guerres exterminatrices en préparation.
Pour perpétuer leur hégémonie déclinante, leur dernière guerre ourdie par le Pentagone contre la Russie, tombée naïvement dans le piège conflictuel inextricable, ces vaillants et téméraires Occidentaux sont déterminés à la mener jusqu’au dernier Ukrainien !
Certes, Poutine et ses acolytes oligarques mènent une effroyable guerre fratricide aux Ukrainiens en utilisant les prolétaires russes comme chair à canon. Mais Macron et ses satrapes européens, vassaux des Etats-Unis, mènent une impitoyable guerre de classe à leurs populations respectives, en transformant leur corps en instrument d’expérimentation sociale spartiate, dans le cadre de l’économie de guerre vouée à devenir la norme, à se pérenniser.
Si Poutine et ses collègues présidents de la Fédération de Russie massacrent par la guerre leurs peuples, Macron et ses complices dirigeants européens, eux, sous couvert de politique de sobriété (en vrai un suicide énergétique et économique), affament leurs populations par la malnutrition et la frigorification provoquées par la perte du pouvoir d’achat, par suite du renchérissement spéculatif des prix des produits essentiels et des matières énergétiques.
Les dirigeants européens, de l’Est comme de l’Ouest, érigés en parangons de la civilisation moderne, sont pitoyables. Ils n’offrent à l’humanité que misère, famine, guerre, détresse, oppression, répression et propagande.
L’humanité, c’est-à-dire les peuples opprimés, doit sobrement se détourner de ces diaboliques modèles capitalistes européens, régis par l’esclavage salarié et le fétichisme de la marchandise, l’esprit de prédation et la mentalité belliciste, les jeter dans les poubelles de l’Histoire pour construire noblement sa propre civilisation socialement et économiquement émancipatrice, politiquement libératrice.
K. M.
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