Quels sont les enjeux de la diplomatie sahélienne de l’Algérie ?
Une contribution de Mohamed-Salah Benteboula – La journée des Nations unies est célébrée chaque année le 24 octobre, date anniversaire de l’entrée en vigueur de la Charte des Nations unies en 1945. Cette célébration s’inscrit dans le cadre de la campagne de promotion de la candidature de l’Algérie à un siège non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU pour la période qui s’étend de 2024 à 2025, lors des élections qui se tiendront dans le cadre de la session de l’Assemblée générale en juin 2023. A ce titre, la diplomatie algérienne aspire à contribuer aux travaux du Conseil de sécurité, en formulant des propositions sur les écueils politiques présents au Sahel, notamment au Mali.
Depuis la démission du président Ibrahim Boubacar Keita au mois d’août 2020, le Mali est engagé dans une transition qui s’achèvera le 26 mars 2024 par le transfert de pouvoir aux autorités élues. D’ici à ce délai, les responsables de la transition ont lancé les réformes institutionnelles et politiques avant d’organiser des élections.
En outre, l’annonce du gouvernement malien de son retrait de tous les organes et instances de l’organisation G5 Sahel, en mai dernier, marque un nouveau jalon sur l’action du comité de suivi de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (CSA) de 2015 présidé par l’Algérie et assisté du Burkina Faso, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad. Cependant, le retrait du Mali du G5 Sahel constitue une rupture géographique entre ses Etats membres, entraînant de surcroît une reconsidération du CSA. Rappelons que le G5 Sahel est une organisation de coopération économique et sécuritaire créée le 16 février 2014 regroupant cinq pays : Burkina-Faso, Niger, Mali, Mauritanie et Tchad.
En effet, le rôle de la géographie dans l’élaboration d’une nouvelle coopération régionale a évolué. De plus, la dislocation du G5 Sahel remet en question les stratégies et les moyens d’actions communes des pays membres en matière de développement économique.
Il est à noter que les organisations de coopération (G5 Sahel, Comité d’état-major opérationnel conjoint, Conseil de l’entente) se superposent partiellement au sein du Sahel (dont le terme comporte plusieurs significations), de sorte que les récents développements consécutifs du G5 Sahel peuvent contribuer à un nouvel élan au Comité d’état-major opérationnel conjoint (CEMOC). Le CEMOC est une organisation de coopération sécuritaire créée en 2010 qui regroupe quatre pays (Algérie, Mali, Mauritanie et le Niger).
Dans ce nouveau contexte, il s’agit pour le gouvernement algérien de maximiser ses atouts géographiques et diplomatiques face aux défis auxquels sont confrontés les pays du Sahel.
A l’instar des pays d’Afrique de l’Ouest et afin d’impulser une nouvelle orientation à l’Accord issu du processus d’Alger et au panafricanisme, tout l’enjeu est de créer une consultation politique algéro-malienne au niveau des ministères des Affaires étrangères qui sera chargée d’organiser le premier Conseil des ministres algéro-maliens ouvrant la voie à des initiatives communes en relation : d’une part, avec la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger de 2015, en tant qu’outil de résolution durable de la crise qui affecte le septentrion malien ; d’autre part, avec la réalisation de la route transsaharienne projet phare de l’agenda 2063 de l’Union africaine.
C’est en ce sens que les pays membres du projet de la route transsaharienne (Algérie, Tunisie, Niger, Nigeria, Mali et Tchad) se sont accordés sur l’établissement d’un corridor économique, en juin 2022 à Alger.
Face à l’échéance décisive qu’est la prorogation du délai de la mission de la commission de rédaction de la nouvelle Constitution malienne jusqu’au 31 octobre 2022, il s’agit de procéder à une réévaluation de la coopération entre l’Algérie et le Mali dans la perspective d’opérationnaliser les dispositions requises pour l’adoption des mesures règlementaires, législatives, voire constitutionnelles nécessaires à la mise en œuvre des dispositions de l’accord, dont il faut rappeler que l’une des missions de la transition consacrée par la Charte de transition du Mali mentionne l’application dudit accord.
M.-S. B.
Géographe
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