Ce baisemain du Point qui trahit la peur née de l’entrée de l’Algérie aux BRICS
Par Kamel M. – Il n’y a pas l’ombre d’un doute quant à la neutralité et au professionnalisme des médias français. Ce respect scrupuleux de la déontologie et de l’éthique chez nos confrères d’outre-Méditerranée nous avons eu à le constater avec la guerre en Ukraine et, avant, en Syrie, en Libye et partout ailleurs où le pouvoir français s’est ingéré pour détruire des pays entiers. Parmi ces médias, un magazine se distingue par ses articles d’une «neutralité absolue» lorsqu’il s’agit du Maroc. Le Point vient de se fendre d’une interview qui s’ajoute à la collection d’articles louangeurs à la limite du baisemain à l’égard de Mohammed VI et de son régime prédateur.
Et c’est la conception même du site de l’hebdomadaire qui trahit cette allégeance au roi, en rappelant les articles sur le même thème : «Abdelmalek Alaoui : le Maroc dans le club des prétendants à l’émergence» ; «Maroc, un futur champion d’Afrique ?» ; «Maroc : comment le royaume a construit son leadership africain» ; «Le Maroc est en capacité d’avoir un projet collectif ambitieux et réaliste».
Dans sa dernière livraison, Le Point fait parler le patron d’un institut d’études de géopolitique. L’entretien est précédé de l’exergue que voici : «C’est peu de dire que les relations entre la France, l’Union européenne et l’Afrique naviguent de plus en plus sur des eaux tumultueuses. La raison : un environnement politique et économique en pleine mutation dans un monde qui se fragmente et où les pays du Sud exigent de plus en plus de rapports équitables dans une logique gagnant-gagnant. Au vu de cette réalité, la question que pose l’Institut d’études de géopolitique appliquée sur le statut du Maroc, puissance régionale en émergence, vis-à-vis de la France et de l’Europe, vaut le détour.» «Le rapport de l’Institut d’études de géopolitique appliquée (Institut EGA) pose une question qui interroge la realpolitik française et européenne appliquée aux pays africains en tête desquels se trouve le Maroc», se gargarise l’outil de François Pinault que dirige Etienne Gernelle.
Suit l’interview au travers de laquelle le président dudit institut, Alexandre Negrus, «nous instruit sur les éléments géopolitiques, géoéconomiques et sociaux qu’il convient désormais d’intégrer pour plus de réalisme et de pragmatisme dans l’approche même de la coopération avec le royaume chérifien et au-delà avec l’Afrique subsaharienne. Autrement dit, sur la nécessité de sortir des postures», insiste encore et encore Le Point qui demande : «Pourquoi est-il pertinent aujourd’hui de préciser le statut du Maroc vis-à-vis de la France et de l’Europe ?» Réponse : «Le Maroc assume aujourd’hui un nouveau statut que la France et l’Union européenne doivent prendre en compte» car c’est un «pivot à plusieurs échelles […] fort de sa stabilité macroéconomique et institutionnelle, ainsi que par son approche sécuritaire».
L’expert met en garde Paris : «A tous les niveaux, l’installation dans la durée de relations crispées entre les deux pays est une mauvaise nouvelle pour la France, tant le Maroc affiche désormais son ambition de devenir la nouvelle puissance régionale et le point d’entrée incontournable vers l’Afrique de l’Ouest francophone», «se positionne comme un acteur clé dans la lutte contre le terrorisme» et «gère d’importants flux migratoires». Aussi Alexandre Negrus invite-t-il l’Europe à payer le régime de Rabat en euros sonnants et trébuchants. Mieux, «la France et l’Union européenne ne peuvent prétendre à des parts de marché, notamment en Afrique de l’Ouest francophone, sans qu’il y ait une contrepartie à la hauteur pour les autorités marocaines», suggère-t-il, en glissant la formule magique : «La France et d’autres Etats membres de l’Union européenne sont favorables au plan d’autonomie avancé par le Maroc.» A ce sujet, Negrus affirme que «le président français n’a donné aucun motif de satisfaction à l’Algérie».
Pourquoi cette interview et pourquoi maintenant ? Il ne faut pas chercher loin, répondent des observateurs avertis. «Elle coïncide évidemment avec la demande officielle introduite par l’Algérie pour son adhésion aux BRICS.» Une adhésion qui inquiète au plus haut point la France.
K. M.
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