Joseph Borrell en visite au Maroc pour enterrer définitivement le Marocgate
De Paris, Mrizek Sahraoui – Officiellement, la visite que le chef de la diplomatie européenne, Joseph Borrell, effectue au Maroc, les 5 et 6 janvier, est «l’occasion d’échanger sur le partenariat UE-Maroc à approfondir à l’aune des défis communs». Dans la réalité, expliquent des observateurs, Joseph Borrell est allé au Maroc pour enterrer définitivement le scandale qui secoue, depuis mi-décembre, le Parlement européen dont le royaume de l’Ouest est l’un des principaux protagonistes.
Au fil des jours et à mesure que les révélations se sont succédé, il est vite apparu que le Maroc, manifestement intouchable, a bénéficié d’une grande indulgence de la part des institutions européennes (Commission et Parlement de Strasbourg). D’ordinaire prompts à prendre des décisions radicales s’agissant d’autres pays, mais peinent dans ce cas précis à donner corps à la moindre petite sanction contre le Maroc pourtant empêtré jusqu’à la garde, selon la justice et la police belges.
Ce qui laisse penser que les «affaires diplomatiques» reprendront leur cours normal après cette visite de deux jours du haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères chez le voisin de l’Ouest, bien que des preuves se soient accumulées ne laissant planer même pas l’ombre d’un doute sur l’implication de l’ambassadeur de Sa Majesté en poste en Pologne et d’un agent des renseignements marocains. En clair : circulez, y a plus rien à voir !
D’aucuns pensaient que l’époque où les représentants diplomatiques du royaume du Maroc (dont l’image est aujourd’hui franchement abîmée après cet immense scandale) haussaient le ton, tout emplis d’arrogance et à la limite de l’agression verbale en toute impunité, est révolue. L’on pouvait s’attendre, en toute logique, que cette affaire vînt à signer la fin d’une époque, époque maculée et à jamais marquée du sceau de l’ignominie dans l’histoire des relations internationales, où les lobbies au service du Maroc passaient le temps à squatter les couloirs du Parlement européen ouvert aux quatre vents.
Et qu’après ce scandale de corruption qui a ébranlé l’institution européenne, temple de la démocratie s’il en est, les membres de l’UE, les eurodéputés, les députés aux Assemblées nationales, ainsi que les gouvernements, les partis politiques, les ONG, les associations citoyennes, et même les hommes d’affaires, finiront-ils par comprendre et, surtout, faire la distinction entre un pays, l’Algérie, qui a toujours agi en toute transparence dans ses liens avec la communauté mondiale, dans le respect des règles régissant les relations internationales, en vertu de principes immuables, et un royaume du Maroc dont les méthodes de fonctionnement relèvent des règles selon lesquelles tous les coups sont permis et la fin justifie les moyens ; autrement dit, du gangstérisme plus que de la politique internationale au sens le plus noble du terme ?
Le traitement pour le moins bienveillant dont bénéficie le royaume du Maroc de la part de cette Europe qui se délite à vue d’œil indique clairement que tout sera mis en œuvre pour étouffer cette affaire de corruption. Mais l’UE et le Parlement européen ne peuvent plus détourner le regard et faire comme si de rien ne fut. Ainsi, parler désormais d’amitié solide avec le Maroc, de crédibilité, comme le fait Joseph Borrell à l’occasion de cette visite, n’a aucun sens.
A moins d’être indulgent, bienveillant, voire complice.
M. S.
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