Militarisation de l’information : médias français au service des puissants (II)
Une contribution de Khider Mesloub – Preuve du pouvoir de nuisance des médias consécutivement à toute révolte populaire : les calomnies colportées régulièrement sur les mouvements de contestation. Systématiquement, les médias français relayent le narratif du pouvoir. Comme cela s’était produit lors du mouvement des Gilets jaunes. Dans le sillage de toute la presse française, l’organe du pouvoir, le journal Le Monde avait propagé, sans discontinuer, la fable selon laquelle les Gilets jaunes étaient affiliés idéologiquement à l’extrême-droite (comme, en 2020-2021, les opposants au pass sanitaire ou au vaccin expérimental ARN-m, étaient qualifiés de complotistes, voire d’irresponsables. En revanche, les fabricants de ces vaccins en phase d’essai clinique, opposés à toute garantie médicale sur l’innocuité de leur nouveau produit chimique, opposés, par ailleurs, à toute responsabilité pénale ou financière en cas d’effets indésirables des vaccins, sont toujours considérés comme irresponsables). Mais ce mensonge n’ayant pas eu l’effet escompté, les médias français avaient agité le sempiternel épouvantail lucratif de l’antisémitisme (également brandi contre les opposants au pass sanitaire et au vaccin pour avoir exhibé l’étoile jaune lors d’une manifestation. Or, le port de l’étoile jaune par quelques manifestants, monté en épingle par les médias, n’avait nullement de signification antisémite. Au contraire, il reconnaissait le caractère raciste de l’étoile jaune et en fait un symbole de tous les ostracismes, donc de celui contre les non-vaccinés notamment. La perversité journalistique française transforme un hommage, par identification persécutive, rendu aux juifs contraints de porter l’étoile jaune en outrage antisémite).
Le Monde des 20-21 janvier 2019 avait titré «Les Gilets jaunes, terrain d’influence pour la nébuleuse complotiste» (déjà les mêmes calomnies et accusations étaient employées par les journalistes pour disqualifier les protestataires). On pouvait y lire : «Des figures conspirationnistes de l’ultra-droite se servent du mouvement», «les dérapages se sont multipliés depuis le début du mouvement», «la colère contre les institutions démocratiques est le résultat d’une entreprise idéologique», «ces obsessions complotistes antisémites autour de Macron et de la banque Rothschild s’affichent désormais dans les cortèges», «en se servant du mouvement né le 17 novembre pour démultiplier leur influence, les complotistes et antisémites liés à l’extrême-droite gagnent en visibilité depuis plusieurs semaines». Et de conclure : «Le jour de l’acte X, des figures complotistes et antisémites et d’extrême-droite se sont finalement donné rendez-vous.» Ainsi, parce qu’il avait osé défier courageusement la classe dominante et le gouvernement Macron, le mouvement des Gilets jaunes avait été outrageusement calomnié.
Pour accréditer l’imposture de l’antisémitisme, les médias avaient brandi des images d’un fait divers où un dénommé Finkielkraut, philosophe de son Etat bicéphale, avait été traité de sioniste par un manifestant. Aussi, pour accuser l’auteur de l’apostrophe d’antisémitisme, les médias français avaient prétendu que la qualification de sioniste serait assimilable à de l’antisémitisme. Assurément, par leur asservissement à certains lobbies communautaires bien implantés en France, les médias français auront amplement participé à la criminalisation de l’antisionisme.
Pour rappel, en France, on se souvient qu’à l’époque de l’épidémie de Covid-19, les médias enrégimentés par Big Pharma jouèrent un rôle négativement déterminant dans la propagation et la perception des risques et des conséquences potentielles liés au coronavirus. En effet, les professionnels de l’information, en particulier les journalistes, avec leur traitement de l’information délibérément catastrophiste, contribuèrent, dès le début de l’épidémie, au processus d’amplification de la perception anxiogène de la crise sanitaire du Covid-19. Et pour cause, il fallait vendre le vaccin des groupes pharmaceutiques américains. Aujourd’hui, avec le déclenchement de la pandémie guerrière, dont l’épicentre demeure circonscrit provisoirement à l’Ukraine, ces mêmes journaleux récidivent et s’activent cette fois au service de l’OTAN pour vendre la guerre impérialiste à la population française. Autrement dit, pour l’enrôler militairement dans la guerre généralisée en cours. (2)
Pour mieux éclairer notre étude sur le rôle de l’information française, décortiquons la mission politique, idéologique et sociale des médias mainstream.
Le rôle des médias, quelle que soit leur obédience politique (de gauche comme de droite), est crucial dans les sociétés occidentales urbanisées – multiethniques – criminogènes – pathogènes –, densément peuplées, soumises à de fortes tensions économiques (chômage et pauvreté), sociales (réduction des services sociaux), criminelles (drogues, délinquance, vols et crimes contre la personne). Au milieu de cette confusion sociétale, les médias sont une source d’insécurité et de chaos supplémentaire, en même temps d’agent d’endoctrinement et d’obscurcissement de la réalité, l’une de ces fonctions rendant les autres possibles et nécessaires.
De manière générale, à l’époque de la domination totalitaire du capital, notamment en France, l’activité médiatique remplit de multiples fonctions. D’une part, les médias diffusent une vision du monde – celle de la classe dominante –, c’est leur première activité principale. Par cette activité, ils conditionnent la conscience collective et individuelle à accepter ce monde capitaliste tel qu’il est : avec ses inégalités sociales «naturalisées», ses valeurs marchandes, son esprit de prédation, son culte de la compétition et de la performance, son apologie de l’idéalisation des célébrités riches, imitées et jalousées par les petits-bourgeois envieux, anxieux, aigris, dévorés par l’ambition de se hisser un jour, à leur tour, croient-ils, au paradis des parvenus.
De surcroît, les médias à la solde ont pour mission d’exhiber sans vergogne les bas-fonds du monde sombre, l’envers du décor de la belle société civilisée normative : le monde du lumpenprolétariat, des SDF, de la pauvreté et de la criminalité vénielle, le monde interlope du vol à grande échelle, du blanchiment d’argent, du crime organisé, qui alimentent les rubriques faits divers. Cette outrancière médiatisation de cette criminalité protéiforme vise à susciter la psychose «sécuritaire», mais surtout à accréditer le mythe de la fonction protectrice de l’Etat capitaliste érigé au service de toute la population : l’Etat démocratique totalitaire, avec ses forces de répression, ses palais de justice, ses prisons et son armée, assure votre protection, braves citoyens (sic), propagent à longueur de diffusion informationnelle les médias français. Et non la sécurité et la tranquillité des classes possédantes.
L’autre activité des médias consiste à soutenir les contestations sociétales contre le système (cela est permis et encouragé à titre individuel), mais en respectant les règlements et les lois, c’est-à-dire l’ordre public, autrement dit la dictature du capital. Les médias dominants couvrent chaque jour les multiples lilliputiennes protestations parcellaires féministes, syndicalistes, environnementalistes, gauchistes, communautaristes, et autres organisations versées dans l’apologie des homosexualités débridées, incarnées par les LGBT. Tous les pleurnichards revendicatifs et vindicatifs, gémissant contre les vénielles injustices sociétales, sont reçus et encouragés par le pouvoir. Parfois, ils obtiennent une idoine loi bienveillante pour récompenser leur bonne conduite pacifique respectueuse de la démocratie totalitaire.
L’autre activité des médias français consiste à exhiber la vie somptueuse des personnalités riches et célèbres. Il s’agit d’étaler leur fortune, leur aisance et l’abondance de leurs biens obtenus grâce à leurs «efforts» exceptionnels, personnels et professionnels, ayant permis leur ascension sociale et leur intégration dans le système capitaliste, ce magnifique système économique offrant à chacun la chance de s’enrichir, comme par hasard toujours les mêmes : les déjà riches.
Enfin, sans conteste, l’activité fondamentale des médias du capital est de mystifier la réalité afin d’en rendre la lecture complexe, de rendre le monde (la société, l’économie, la politique, l’idéologie) incompréhensible et opaque. Les médias français imposteurs, avec leur habituelle vision policière ou psychologisante de l’histoire et des faits sociaux, accomplissent cette mission de déformation de la réalité, en présentant toute activité humaine, particulièrement les activités économiques, politiques, idéologiques, diplomatiques, judiciaires, militaires, comme étant le fruit soit du hasard, soit la résultante de la subjectivité de tel ou tel individu – génial ou caractériel – (l’imprévisible Donald Trump ou l’irascible Poutine, le doctrinaire Khamenei ou l’autocrate Xi Jinping). Mais jamais comme le produit des lois imparables de l’économie, de la sociologie et, surtout, de la lutte des classes. Quoi qu’il en soit, par le travail manipulatoire opéré par ces médias inféodés au capital, la société est délibérément complexifiée, enrobée dans une opacité politique machiavélique.
Ce travestissement de la réalité a pour dessein d’éviter que les «citoyens» accèdent à la compréhension authentique des lois dialectiques régissant l’ensemble de la société déchirée par des antagonismes de classe. En lieu et place, les médias proposent des rumeurs, des allégations, des «fake news» et des complots machiavéliques, ourdis dans l’antichambre des puissants, conduisant chacun à spéculer sur tel ou tel dirigeant (le Jupiter arrogant Macron, l’imprévisible Trump, Merkel la Reich-Woman, etc.). Ainsi, en lieu et place d’une conception matérialiste et dialectique de l’histoire et des évènements, les médias colportent une vision policière, où chaque fait social est perçu par le petit trou de la serrure «décervelante» et débilitante. Les médias asservis au capital proposent de supputer sur les manies et les travers des célébrités. Ces journalistes appliquent au monde de la politique, de l’économie et de l’idéologie les recettes de la morale vulgaire, de l’idéalisme, de la psychologie de comptoir. Ainsi, Macron serait arrogant, expliquant son dédain pour le peuple. Remplacez Macron par Mélenchon ou par Marine Le Pen, et vous changerez de régime, suggèrent subrepticement les médias français à l’étroitesse d’esprit criante de vacuité intellectuelle et historique. Or, Mélenchon comme Marine Le Pen appliqueront, dans l’éventualité de leur propulsion au sommet de l’Etat capitaliste, la même politique dictée par le capital. Voilà à quoi se réduit l’activité idéologique des grands médias français, de droite comme de gauche.
De manière générale, on distingue trois catégories de médias. En effet, en Occident, en général, et en France, en particulier, pour accomplir ce travail de fragmentation sociologique (les médias subdivisent le lectorat en fonction de sa catégorie sociale), de mystification, d’enrôlement et d’aliénation idéologique, les médias se répartissent en trois catégories. Histoire d’accréditer la thèse de la diversité médiatique, et l’imposture de la liberté de la presse. Or, l’ensemble des journaux et périodiques sont détenus par les mêmes groupes.
En premier lieu, il y a la presse de divertissement, abondamment diffusée en France. Ces médias «people» ont pour fonction de divertir et d’anesthésier le public en vue de lui permettre de s’évader dans les rêves d’un monde spectaculaire meilleur, accessible probablement dans une autre vie. Dans cette France «laïque», la presse people est le nouvel opium du monde civilisé. Cet «opiacé médiatique», consommé sans modération sur fond de publicités alléchantes de vies paradisiaques illusoires, a remplacé la religion.
En second lieu, il existe la presse d’information au service du capital, incarnée par Le Monde, Le Figaro, L’Express, etc. pour la presse écrite ; BFM, LCI, CNEWS, Europe1, RTL, pour les médias audiovisuels. Ces médias de «formatage» idéologique adjoignent à la fonction «people» des prétentions déontologiques à informer objectivement sur l’actualité et des ambitions savantes à analyser scientifiquement les informations. En vrai, ces médias ont pour mission de façonner l’opinion publique aux fins de susciter son adhésion aux différentes politiques des gouvernants, mais surtout d’entretenir la résignation des classes populaires à leurs misérables conditions de vie. Pour ce faire, ces médias recourent aux services des experts autoproclamés, des analystes stipendiés, des universitaires affidés, dans le dessein d’emberlificoter l’opinion publique, de pérenniser l’aliénation du peuple.
En outre, il existe une troisième catégorie de médias destinée à l’élite intellectuelle, politique et patronale. Ces médias rigoureux méritent d’être lus, car ils analysent consciencieusement la conjoncture économique, politique, internationale et militaire, aux fins d’informer «scientifiquement» la classe capitaliste et ses commis politiques. Ces médias d’«influence» donnent le ton aux grands patrons et orientent leurs décisions. Le grand capital et ses saltimbanques politiciens ne disposent pas d’une grande marge de manœuvre. Il faut le rappeler, les lois implacables de l’économie politique capitaliste s’imposent à eux comme à tout un chacun. Mais les puissants milliardaires et leurs fonctionnaires financiers disposent du pouvoir d’accélérer ou de ralentir l’évolution de la crise, voire de la prolonger, quitte à l’amplifier.
Enfin, il existe également une autre catégorie de médias, que nous n’avons pas intégrée à notre taxonomie informationnelle, à savoir la presse numérique alternative, la presse révolutionnaire, la presse de certains pays résolument anti-impérialistes. En rupture radicale avec les valeurs politiques de la pensée dominante occidentale et les catégories marchandes de la société bourgeoise ou féodale (pour les pays musulmans dominés par des monarchies ou des dictatures archaïques), cette presse est évidemment, du fait de sa faiblesse financière et de l’ostracisme dont elle est victime, très peu visible, voire méconnue. Parce qu’elle ne se plie pas aux normes médiatiques mercantiles, aux valeurs occidentales impérialistes, cette presse numérique libre, révolutionnaire ou «tiers-mondiste» est vilipendée, ostracisée ou boycottée par les médias mainstream, mais également par la presse de gauche comme de droite.
K. M.
(Suite et fin)
2- Voir notre livre Chroniques contre la guerre généralisée en cours, éditions L’Harmattan, 2022.
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