Mesure de rétorsion après l’affaire Amira Bouraoui : le silence gêné de la France
Par Mrizek Sahraoui – La mesure prise par l’Algérie de suspendre la délivrance des laissez-passer consulaires permettant aux autorités françaises d’extrader des Algériens sans papiers ou déboutés du droit d’asile, mesure décidée à la suite de l’affaire Amira Bouraoui, n’a pas été commentée par le gouvernement français, commentaire sans nul doute attendu avec impatience par les médias marocains.
Sur le plan médiatique, seule la fachopresse, composée de CNews, Valeurs Actuelles, Boulevard Voltaire, Causeur, Europe 1, a relayé l’information révélée par Sud Radio, notamment reprise par Algeriepatriotique. Ces médias à la ligne éditoriale clairement dédiée à la galaxie nationale-raciste française ont commenté l’information à la seule fin, bien évidemment, de nourrir le discours anti-algérien.
Les relations entre la France et l’Algérie continuent ainsi de faire le yoyo. Au plus haut à quelques rares épisodes, avant d’enregistrer aussitôt de longues séquences de raidissement, mais elles ne sont jamais au beau fixe de façon pérenne. Alors, se pose inévitablement la question de savoir à qui la faute. A l’une, à l’autre, aux deux ? La réponse est, sans l’ombre d’une hésitation : à la France.
La faute à la France car, aussi loin que l’on remonte dans le temps, il n’y a pas une trace de provocation venant des responsables politiques, militaires, de la société civile ou des médias algériens. En revanche, celles dont les responsables français – jusqu’au sommet de l’Etat – ont été les auteurs sont récurrentes et, rassemblées, peuvent constituer un catalogue gros comme ça, subséquemment source de tension allant jusqu’au rappel de l’ambassadeur d’Algérie à Paris.
La France provoque l’Algérie qui, forcément, se défend, rien de plus simple et de plus normal. C’est même devenu la règle régissant les relations entre l’ancienne puissance coloniale récidiviste et une Algérie qui s’agace du comportement d’une France incorrigible. Des antécédents d’attaques et de provocations émanant du sommet de l’Etat français, de responsables politiques, des médias ou de spadassins à la solde de puissances étrangères hostiles à l’Algérie moyennant pécule sonnant et trébuchant, ces exemples donc sont légion.
Faisons abstraction de toutes les fois où des histrions politiques et/ou médiatiques qui, à chaque fois que la France traverse des moments difficiles, embouchent le mirliton de la propagande et déversent leur fiel sur l’Algérie. Ceux-là ont pour nom Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie ; Thomas Legrand, plumitif à Libération ; Ivan Rioufol, Charlotte d’Ornellas, Véronique Jacquier et consorts, les bas-bleus mégaphones de l’extrême droite chez CNews. Ainsi contentons-nous juste de rappeler les nombreuses pathétiques philippiques et autres propos provocateurs du président Macron, «déplorable oiseau de plumes historique», propos tenus dans un rare moment de lucidité par un tartuffe nostalgique de l’Algérie française, Gilbert Collard, pour ne pas le citer.
Passons donc sur la dernière provocation en date, celle en relation bien sûr avec l’affaire Amira Bouraoui, alors même que celle-ci relève carrément d’atteinte à la souveraineté nationale, évoquons la déclaration d’Emmanuel Macron où il a accusé le système «politico-militaire» algérien d’entretenir une «rente mémorielle», avant de s’interroger sans la moindre gêne, ni retenue s’«il y avait une nation algérienne avant la colonisation française». C’est l’historien Pascal Blanchard qui vient indirectement de répondre aux arguties insipides et de mauvaise foi d’Emmanuel Macron.
Pascal Blanchard, dont personne n’a à ce jour mis en cause l’intégrité intellectuelle, a déclaré, vendredi dernier dans une émission sur France 5, que seule la France demeure réglée à l’heure de la colonisation plus de soixante ans après les indépendances. Alors, s’impose la question de savoir qui entretient et se nourrit de la «rente mémorielle». Le pouvoir français à l’évidence qui n’a eu de cesse d’instrumentaliser la question de la colonisation à des fins électoralistes. Sinon, comme l’ont fait d’autres pays, la Belgique et l’Allemagne notamment, la France aurait dû tourner la page depuis longtemps.
Et définitivement !
M. S.
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